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Billet de blog 27 octobre 2023

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Une association, un café, une soirée : Abdellatif Laâbi

La soirée Abdellatif Laâbi, deux artistes, Sandrine Malika Charlemagne, Issam Lemrini, le public est là qui permet ces soirée, l'association Ovale, le Café le Bourgogne, une collecte pour l'association Elma et les magnifiques poèmes d'Abdellatif Laâbi. Notre plus belle et émouvante récompense, ses remerciements

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Illustration 1
Soirée Abdellatif Laâbi, Ovale. SM Charlemagne, Issam Lemrini

Une magnifique soirée dans le beau cadre du café Le Bourgogne.

Aves deux artistes, Sandrine Malika Charlemagne à la lecture et Issam Lemrini au chant et au Oud. Et comme pour les trois précédents" Instants poétiques", ce public qui permet à ces "Instants" d'exister. Sans elles et eux, rien ne serait possible.


ELMA

Comme nous avions dédié cette soirée aux populations endeuillées du Maroc et de Libye (depuis la décision d'organiser cette soirée, d'autres séismes ont causé d'autres morts, blessé.es et destructions, nous associons ces population à cette soirée), nous avons proposé une collecte de dons et une magnifique Chorba. Que nous avons partagée après la lecture. Le café nous permettant  de rester longuement pour partager idées et repas.

pour contacter ELMA : elma.eau@outlook.com

Pour voir les photos de leur action dans le cadre du séïsme : https://www.facebook.com/photo/?fbid=635929451980118&set=pcb.635930021980061

Et sur leur facebook, cette autre photo :

Illustration 2

Quelques POÈMES lus  ...

Sur l'écriture

« Je ne le nie pas
l'écriture est un luxe
mais c'est le seul luxe
où l'homme n'exploite
que lui-même. »

la prison

L''usage de la liberté

"Cela fait déjà quelque temps

il m'arrive

d'être tiré brutalement de mes rêveries

et de regarder autour de moi

en me demandant

Qu'est-ce que je fais là

est-il bien vrai que je sois en prison ?

Étrange sensation qui fait

qu'à l'instant où

par une impulsion irrésistible

vous éprouvez le besoin

de faire usage de votre liberté

à l'instant même

votre condition réelle

vous éblouit

vous strangule

de son évidence

et votre geste tombe

la main qui en portait l'offrande

votre liberté émigré

vers d'autres rêves

qui se mettent à prendre

un goût sauvage

des formes irrédentistes

Ils se multiplient

tournoient follement

autour de votre acte-rêve manqué

devenu noyau du tourbillon

qui tourne tourne

jusqu'à le digérer

pour en nourrir

tous les possibles

tout ce qui ne peut se détruire

qu'une fois ayant réveillé et nourri

l'exigence des hommes

qu'une fois ayant

brisé l'étau »

Maison centrale de Kénitra, 1975-1976

 Etre femme

"...Tu te rappelles combien de fois

j'ai appelé à la créativité de la femme

et ma conviction ferme

de ce que la femme

libérée de son double esclavage

nous révèlera

hommes et femmes

sur nous-même

sur le monde"

Cérémonie de L'Accord

« Tu es venue

au plus fort de la tourmente

Tu t'es avancée vers la grille

nos sourires

nos paroles de bienvenue

s'entremêlèrent

deux torches tournoyant dans la nuit

dessinant des croix

des spirales

de beaux huit évanescents

puis des soleils se levèrent en nous

venus

d’archipels disparus ou inconnus

et que nous avons hélés

reconnus

dans cette longue traversée

où se rassemblait

notre face humaine

Tu me parlais

et un nouveau battement

se mit à cogner dans ma poitrine

cherchant à s'harmoniser avec le mien

qui saisit son rythme

battit sur le même ton

se confondit avec lui

l'intensifia

Tu me parlais mais

c'était un murmure

qui resurgissait de ces matins

de plénitude où tes yeux interpellaient

le printemps qui accourait en refrains

et fragrances s'enrouler autour

de ta taille Tu me parlais

et ta main étendue sur la grille

renaissait dans ma main d'abord

une tiédeur une simple pression

puis la paume, des doigts véritables

qui s'ajustaient aux miens

Tu me parlais et je devais te répondre

mais qui parlait à qui ? Notre dialogue

avait la voix indivisible de la tendresse

Nous parlions nous nous arrêtions pour

que nos yeux ratifient nos paroles

les fassent reluire de

caresses Les grilles disparaissaient

le toit volait comme par enchantement

nous étions loin, loin de l'arène encerclée

et derrière nous filaient

les traînées de ces soleils

de ces fruits de liberté

cueillis à l'arbre de notre accord »

Le corps, la vie, la mort

 « Habiter son corps
n'est pas aisé
c'est une maison hantée
un champ de mines
il faudrait pouvoir le louer
juste pour des vacances » 

Inséparables

« Pauvre corps

étriqué et mal foutu

Je te remercie de ton hospitalité

Tu pousses la tolérance jusqu'au vice

J'en profite sans vergogne

Je t'use

et tu m'uses

Inséparables nous sommes mais pas dupes »

Ailleurs est ici

(Palestine)

"Une maison là-bas

avec sa porte ouverte

et ses deux tourterelles

récitant inlassablement le nom de l'absent

Une maison là-bas avec son puits profond

et sa terrasse aussi blanche que le ciel des constellations

Une maison là bas pour que l'errant se dise

j'ai lieu d'errer tant

qu'il y aura une maison là-bas"

Emblématique

La soirée a été conclue par la lecture du poème écrit en 2015 par Abdellatif Laâbi "J'atteste"

J'atteste

"J’atteste qu’il n’y a d’être humain

que celui dont le cœur tremble d’amour

pour tous ses frères en humanité

Celui qui désire ardemment

plus pour eux que pour lui-même

liberté, paix, dignité

celui qui considère la Vie est encore plus sacré

que ses croyances et ses divinités

J’atteste qu’il n’y a d’être humain

que Celui qui combat sans relâche

la Haine en lui et autour de lui

Celui qui, dès qu’il ouvre les yeux le matin,

se pose la question :

Que vais-je faire aujourd’hui

pour ne pas perdre ma qualité et ma fierté d’être homme ?


Et "l'Instant" le plus bouleversant de cette initiative est ce message de remerciement que nous a adressé à la suite de cette soirée, cet immense poète :

"Quel beau cadeau que vous me faites- là! J'en suis très touché."

Merci Monsieur Laâbi pour ces poèmes, pour ce message.

Dominique Villaeys-Poirré

Ovale,

Le Bourgogne

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