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Une magnifique soirée dans le beau cadre du café Le Bourgogne.
Aves deux artistes, Sandrine Malika Charlemagne à la lecture et Issam Lemrini au chant et au Oud. Et comme pour les trois précédents" Instants poétiques", ce public qui permet à ces "Instants" d'exister. Sans elles et eux, rien ne serait possible.
ELMA
Comme nous avions dédié cette soirée aux populations endeuillées du Maroc et de Libye (depuis la décision d'organiser cette soirée, d'autres séismes ont causé d'autres morts, blessé.es et destructions, nous associons ces population à cette soirée), nous avons proposé une collecte de dons et une magnifique Chorba. Que nous avons partagée après la lecture. Le café nous permettant de rester longuement pour partager idées et repas.
pour contacter ELMA : elma.eau@outlook.com
Pour voir les photos de leur action dans le cadre du séïsme : https://www.facebook.com/photo/?fbid=635929451980118&set=pcb.635930021980061
Et sur leur facebook, cette autre photo :

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Quelques POÈMES lus ...
Sur l'écriture
« Je ne le nie pas
l'écriture est un luxe
mais c'est le seul luxe
où l'homme n'exploite
que lui-même. »
la prison
L''usage de la liberté
"Cela fait déjà quelque temps
il m'arrive
d'être tiré brutalement de mes rêveries
et de regarder autour de moi
en me demandant
Qu'est-ce que je fais là
est-il bien vrai que je sois en prison ?
Étrange sensation qui fait
qu'à l'instant où
par une impulsion irrésistible
vous éprouvez le besoin
de faire usage de votre liberté
à l'instant même
votre condition réelle
vous éblouit
vous strangule
de son évidence
et votre geste tombe
la main qui en portait l'offrande
votre liberté émigré
vers d'autres rêves
qui se mettent à prendre
un goût sauvage
des formes irrédentistes
Ils se multiplient
tournoient follement
autour de votre acte-rêve manqué
devenu noyau du tourbillon
qui tourne tourne
jusqu'à le digérer
pour en nourrir
tous les possibles
tout ce qui ne peut se détruire
qu'une fois ayant réveillé et nourri
l'exigence des hommes
qu'une fois ayant
brisé l'étau »
Maison centrale de Kénitra, 1975-1976
Etre femme
"...Tu te rappelles combien de fois
j'ai appelé à la créativité de la femme
et ma conviction ferme
de ce que la femme
libérée de son double esclavage
nous révèlera
hommes et femmes
sur nous-même
sur le monde"
Cérémonie de L'Accord
« Tu es venue
au plus fort de la tourmente
Tu t'es avancée vers la grille
nos sourires
nos paroles de bienvenue
s'entremêlèrent
deux torches tournoyant dans la nuit
dessinant des croix
des spirales
de beaux huit évanescents
puis des soleils se levèrent en nous
venus
d’archipels disparus ou inconnus
et que nous avons hélés
reconnus
dans cette longue traversée
où se rassemblait
notre face humaine
Tu me parlais
et un nouveau battement
se mit à cogner dans ma poitrine
cherchant à s'harmoniser avec le mien
qui saisit son rythme
battit sur le même ton
se confondit avec lui
l'intensifia
Tu me parlais mais
c'était un murmure
qui resurgissait de ces matins
de plénitude où tes yeux interpellaient
le printemps qui accourait en refrains
et fragrances s'enrouler autour
de ta taille Tu me parlais
et ta main étendue sur la grille
renaissait dans ma main d'abord
une tiédeur une simple pression
puis la paume, des doigts véritables
qui s'ajustaient aux miens
Tu me parlais et je devais te répondre
mais qui parlait à qui ? Notre dialogue
avait la voix indivisible de la tendresse
Nous parlions nous nous arrêtions pour
que nos yeux ratifient nos paroles
les fassent reluire de
caresses Les grilles disparaissaient
le toit volait comme par enchantement
nous étions loin, loin de l'arène encerclée
et derrière nous filaient
les traînées de ces soleils
de ces fruits de liberté
cueillis à l'arbre de notre accord »
Le corps, la vie, la mort
« Habiter son corps
n'est pas aisé
c'est une maison hantée
un champ de mines
il faudrait pouvoir le louer
juste pour des vacances »
Inséparables
« Pauvre corps
étriqué et mal foutu
Je te remercie de ton hospitalité
Tu pousses la tolérance jusqu'au vice
J'en profite sans vergogne
Je t'use
et tu m'uses
Inséparables nous sommes mais pas dupes »
Ailleurs est ici
(Palestine)
"Une maison là-bas
avec sa porte ouverte
et ses deux tourterelles
récitant inlassablement le nom de l'absent
Une maison là-bas avec son puits profond
et sa terrasse aussi blanche que le ciel des constellations
Une maison là bas pour que l'errant se dise
j'ai lieu d'errer tant
qu'il y aura une maison là-bas"
Emblématique
La soirée a été conclue par la lecture du poème écrit en 2015 par Abdellatif Laâbi "J'atteste"
J'atteste
"J’atteste qu’il n’y a d’être humain
que celui dont le cœur tremble d’amour
pour tous ses frères en humanité
Celui qui désire ardemment
plus pour eux que pour lui-même
liberté, paix, dignité
celui qui considère la Vie est encore plus sacré
que ses croyances et ses divinités
J’atteste qu’il n’y a d’être humain
que Celui qui combat sans relâche
la Haine en lui et autour de lui
Celui qui, dès qu’il ouvre les yeux le matin,
se pose la question :
Que vais-je faire aujourd’hui
pour ne pas perdre ma qualité et ma fierté d’être homme ?
Et "l'Instant" le plus bouleversant de cette initiative est ce message de remerciement que nous a adressé à la suite de cette soirée, cet immense poète :
"Quel beau cadeau que vous me faites- là! J'en suis très touché."
Merci Monsieur Laâbi pour ces poèmes, pour ce message.
Dominique Villaeys-Poirré
Ovale,
Le Bourgogne