Les chiens de garde
Depuis la sortie ultra-violente de quelques centaines de combattants kamikazes du ghetto de Gaza dans un Israël trop sûr de lui nous observons en France un véritable raz de marée politico-médiatique de soutien inconditionnel à l’état juif. Un soutien tellement massif et partial qu’il apparaît clairement à tout observateur qui possède un peu de mémoire comme une complaisance incongrue à l’égard de la politique menée par l’état juif.
Il est ainsi devenu impossible de se soucier des victimes palestiniennes qui s’accroissent par centaines chaque jour à mesure que la contre-offensive israélienne vient détruire systématiquement la minuscule bande de terre surpeuplée à coups de canons. Pour ce triste monde politico-médiatique de la bien-pensance et de l’émotion correcte, mentionner les victimes palestiniennes ou parler de la violence de la riposte israélienne, ce serait cautionner le Hamas et sa guerre et même, par delà le siècle, se faire complice des nazis et vouloir détruire l’état juif…!!
Une violence sourde et structurelle
Comme si la sortie ultra-violente des combattants du Hamas n’avait aucune cause.
Comme si priver des générations de jeunes palestiniens de tout avenir depuis 75 ans ne pouvait avoir aucune conséquence.
Comme si vivre à enfermés à plus de 2 millions de personnes sur trois cent soixante kilomètres carrés, dans une entière dépendance matérielle à son voisin juif et une quasi totale soumission à l’autorité israélienne était une condition normale et logiquement destinée à perdurer sans limite.
Même mes amis juifs new yorkais vivent dans cet univers clivé où les humains ce sont « nous » (nos amis, nos compatriotes, les gentils) et pas « eux » (les autres, les terroristes, les violents, ceux qui dérangent).
On voit bien là, le degré actuel de vassalisation de la France et d’inféodation à cette vision du monde arrogante et implicitement raciste relayée et portée aujourd’hui par un empire américain en décadence et dont Israël est le prolongement moyen-oriental. Dans cet univers de pensée le palestinien, c’est à dire le sémite non juif (et par extension l’arabe, le noir etc.), ne compte pas. La supériorité militaire de son oppresseur vient effacer jusqu’à son existence au quotidien et, depuis quelques jours, jusqu’à son humanité.
La preuve: dans leurs dernières déclarations les responsables israéliens que sont le chef d’état major, le lieutenant-général Herzi Halevi, et le ministre de la défense, Yoav Galant, les combattants du Hamas sont décrits comme des animaux et sont considérés comme déjà « morts »…
De leur côté les colons ultra-orthodoxes continuent de détruire les maisons palestiniennes qui les gênent: l’armée israélienne musèle toute riposte palestinienne. Ce qui signifie que même en Cisjordanie, pourtant techniquement palestinienne, les habitants légitimes ne sont pas chez eux et ne sont assurés d’aucune sécurité.
Tout cela signifie malheureusement que la violence envers les palestiniens est devenue structurelle et qu’Israël est aujourd’hui un état raciste dans lequel s’est mis en place un système d’apartheid. Les plus hauts responsables israéliens s’y sentent désormais autorisés à tenir sur leurs voisins un langage proche de celui que les nazis tenaient sur les juifs.
La déchirure consubstantielle à la naissance d’Israël.
Bien entendu, être juif et citoyen d’Israël, est difficile. L’état, puisqu’il est confessionnel, ne peut se permettre d’intégrer les palestiniens comme des citoyens à part entière. Ce serait à terme la dissolution d’Israël dans nouvel état arabe à minorité juive. C’est à dire, pour les juifs, le contraire de la sécurité, la négation de tous leurs efforts pour disposer d’une terre inaliénable et défendre leur existence !
Accepter pour voisin un état palestinien aussi intimement et inextricablement soudé au territoire israélien est aussi très difficile et soulève nombre de questions: qui, par exemple, contrôlera l’eau si les palestiniens devaient à terme disposer d’une armée en propre ?
L’option prise explicitement par les colons - et implicitement par les différents gouvernements d’ultra-droite - est radicale. Elle consiste à chasser progressivement les palestiniens de l’ensemble des territoires sur lesquels ils se trouvent encore. Ce qui consiste aussi à suggérer aux états arabes voisins que c’est à eux d’absorber et d’intégrer les palestiniens en leur sein. Ce que ces états ont toujours refusé, quitte à laisser pourrir avec plus ou moins d’humanité les palestiniens dans des camps.
Pour les palestiniens la situation est tout aussi difficile. S’ils veulent une paix avec Israël et pouvoir sortir des camps libanais, jordaniens et du ghetto de la bande de Gaza, il leur faut abandonner tout espoir de retour sur les terres de leurs pères accaparées maintenant depuis 75 ans et se contenter des miettes de territoire qu’a bien voulu leur laisser la suprématie militaire juive en Cisjordanie. Au risque quasi certain de vivre dans la hantise des colons juifs.
L’autre option, radicale et vaine, étant de dénier inlassablement à Israël le droit à l’existence et, avec des moyens infimes et par nature terroristes, viser indéfiniment sa destruction sans jamais y arriver. C’est à dire que - dans une visée symétrique de l’effort des colons juifs - il leur faudrait finir par réussir à accomplir le mantra de leurs leaders extrémistes: « repousser les juifs à la mer » et que, depuis 1948, ils ont toujours échoué à faire:…
Pour nos élites: un gain rapide pour peu d’efforts
Mais revenons à ce monde politico-médiatique qui aboie à toute évocation des souffrances palestiniennes et cherche à terroriser tous ceux qui ont un peu de mémoire et de générosité.
Quelles sont les raisons à l’oeuvre dans ces condamnations et hurlements unanimes?
Ne serait-ce pas la droitisation outrancière de nos pseudo élites?
Le fait qu’il leur est plus simple de flatter le supposé racisme anti-arabe de la population française et d’encourager la pensée simpliste que d’éduquer à la différence et à la réflexion?
Que cela rapporte plus de voix et de lecteurs et bien plus vite!
Constatons aussi que cela dispense de travailler à s’informer, à construire un point de vue étayé et à convaincre.
Tout ceci ne cacherait-il pas, au fond, un narcissisme fragile et la peur de l’autre derrière le masque affiché de la bien pensance et de l’émotion correcte ? Cette arrogance inavouée ne serait-elle pas le produit d’esprits racistes et perdus qui, hors le rapport de domination, ne savent plus comment exister?
Quoi qu’il en soit le hurlement en meute de ce petit monde est le signe certain d’une grande médiocrité dans laquelle le souci de l’autre a disparu. Nous arrivons devant le degré zéro de l’information et de la politique