Cet article est le fruit d’une collaboration entre réseau européen #enTrain et l’association AFITS. Nous remercions Achille Chiari. Il a paru en français et en italien sur le site du réseau européen #enTrain : https://reseauentrain.eu/santhia-arona-rouvrir-une-ligne-regionale-dinteret-paneuropeen/
Au mois de novembre dernier, le gestionnaire de réseau RFI, homologue italienne de SNCF Réseau, a annoncé le lancement d’une étude pour la réouverture de la ligne ferroviaire qui relie les villes d’Arona, au bord du Lac majeur, et Santhià, à environ 100 km au Nord-Est de Turin, toutes deux situées dans la région du Piémont. Il s’agit d’une première victoire pour l’association Associazione Ferrovia internazionale Torino Svizzera (AFITS), proche du réseau #enTrain, qui lutte pour la réouverture de la liaison en soulignant son intérêt paneuropéen.
La ligne ouvre intégralement en 1906, la même année que le Tunnel international du Simplon, qui relie l’Italie à la Suisse ; cette coïncidence lui confère d’emblée un caractère international. De fait, des affiches touristiques de l’époque font la promotion de la liaison ferroviaire entre Nice et San Remo à l’Europe centrale en empruntant cette ligne. Des fiches horaires montrent aussi le parcours de Paris à la Méditerranée en mentionnant la « Santhià – Arona ».
Agrandissement : Illustration 1
Des décennies plus tard, les horaires mis en place sur la ligne en 1986 sont seulement régionaux et confinent la ligne à un intérêt purement local ; l’année précédente, la mise en cadencement de la liaison Turin – Milan assure la desserte de Santhià mais, en confortant une logique d’axe plutôt qu’une logique de réseau, conduit paradoxalement à négliger les correspondances dans cette gare et à supprimer les liaisons directes entre Turin, Arona et Domodossola. Les services de marchandises une fois supprimés, la desserte devient dramatiquement faible, avec huit liaisons d’aller-retour par jour et des trous de dessertes très importants (jusqu’à trois heures sans aucun train au départ, aux deux extrémités de la ligne, en matinée). Le trafic de 880 voyageurs par jour, correspondant à une moyenne de cinquante voyageurs par train restant cependant honorable. Le samedi, dimanche et jours de fêtes, la desserte se bornait à six trains et le trafic à 250 voyageurs par jour.
En 2012, dans le cadre d’un plan d’économies, la région Piémont décide de la fermeture (dite officiellement « suspension ») au trafic de voyageurs de quinze lignes régionales, dont la « Santhià – Arona ». Sur la ligne en question, le remplacement par un service d’autobus conduit certes à un léger relèvement de la fréquence (dix-neuf liaisons au lieu de seize) mais provoque une dégradation sensible du temps de parcours, qui passe à 1 h 40, contre au plus 1 h 04 avant la fermeture.
L’AFITS se bat pour la réouverture, qui est toujours envisagée. Longue de 65 kilomètres, à voie unique et non électrifiée, la ligne parcourt le Piémont des Alpes, les villes d’extrémité sont peuplées de 8 000 habitants et de 13 600 habitants, la plus importante étape intermédiaire étant Borgomanero, peuplée de 21 224 habitants. Santhià constitue un point d’arrêt de la liaison dite « Regionale Veloce » (ou TER de longue distance) entre Milan et Turin, la ligne offre des points de correspondances avec des lignes qui relient la ville de Novare aux massifs alpins, enfin et surtout, Arona est située sur l’itinéraire entre Milan et la Suisse. Au départ de Turin, elle offre le chemin le plus court pour rallier le Lac Majeur.
Agrandissement : Illustration 2
L’agence de mobilité du Piémont envisage la réouverture avec une trame horaire de vingt trains par jour, soit une amélioration légère par rapport à la situation d’avant 2012, en prévoyant un prolongement du parcours du train vers Domodossola, près de la frontière suisse, ce qui permettrait de desservir les bords du Lac majeur, notamment la station balnéaire de Stresa.
De rencontres entre divers élus (notamment le Maire d’Arona) et les dirigeants de RFI, il ressort que le programme d’intervention prévoit l’allongement à 750 mètres de quais de gare, par ailleurs toutes dotées d’installations de croisement, la mise au gabarit dit « PC 80 », qui permet d’accueillir des conteneurs plus grands, l’électrification et la suppression du plus grand nombre possible de passages à niveaux, dans l’objectif de faire circuler des trains de marchandises lourds de grande capacité.
L’AFITS met en œuvre des actions de sensibilisation pour rappeler l’importance de cette ligne pour toute la région du Nord-Est du Piémont et insiste sur son caractère européen, rappelant qu’avant-guerre, elle constituait « un corridor européen avant la lettre ». L’AFITS rappelle qu’il est possible de perpétuer cette tradition historique et que la ligne peut servir d’itinéraire efficace pour renforcer aussi bien le corridor « Méditerranée », qui inclut le Lyon – Turin, que le corridor « Rhin – Alpin », qui inclut les tunnels de base suisses. La réouverture, d’un coût que RFI estime à 25 millions d’euros, peut ainsi renforcer le transport ferroviaire de manière beaucoup plus sobre que la construction du Tunnel Lyon – Turin.
Vincent Doumayrou,
auteur de La Fracture ferroviaire, pourquoi le TGV ne sauvera pas le chemin de fer,
Préface de Georges Ribeill. Les Éditions de l'Atelier, Ivry-sur-Seine, 2007.
=-=-=-
Ce blog se veut écolocitoyen. Par conséquent, il n'utilise de photos qu'à la marge, et uniquement en format réduit. Les billets sont supprimés au bout d'une durée maximale de deux ans, à moins de présenter un intérêt particulier.
=-=-=-
Il est encore possible de signer la pétition de défense de la ligne : https://www.change.org/p/ferrovia-torino-svizzera-blog-riaprire-la-linea-ferroviaria-santhi%C3%A0-arona
Plus d’infos sur le site de l’AFITS : https://ferroviatorinosvizzerablog.wordpress.com/
=-=-=-
Pour me contacter : vincent-doumayrou{a}laposte.net
=-=-=-