Nous y sommes, la censure est tombée. J'adresse ce message avec plusieurs mobiles :
*D'abord, tandis que bruissent les rumeurs d'élection (présidentielle) anticipée, pour relayer l'appel lancé par deux figures politiques qui me semblent aujourd’hui prendre le problème par le bon bout dans notre petite France toute divisée : Lucie Castet et Marine Tondelier me paraissent jouer collectif sans sous-estimer la dimension des personnes et l'importance cruciale de l’incarnation. Elles me semblent à la fois mettre clairement en avant le programme du Nouveau Front Populaire, mettre au coeur des débats la question centrale des services publics et de l'écologie au quotidien, sans non plus ignorer le temps que prend l’édification des consensus. (notamment avec les organisations qui composent le NFP et qui devront par ailleurs aller bien au delà des seules composantes partidaires si on souhaite un mouvement victorieux).
J’ajoute que face à la couillocratie ambiante, la seule vraie certitude d’avoir une femme présidente un jour serait d’avoir une candidate pour représenter le courant écolo-social à la Présidentielle… Nous avons vu avec les législatives qu'il est possible d'arriver en tête lorsque 50 nuances de gauche travaillent de concert. De là, il faudrait peut-être un jour avoir à se prononcer entre deux Marine… c’est presque en soi un argument féministe ! (si l’inéligibilité ne vient pas frapper l’une des 2 d'ici là, inutile de vous dire laquelle est la plus menacée). Ça c'est du côté du relais de l'appel évoqué, que vous trouverez en cliquant ici
*Au delà de cet appel, j'interpelle mes camarades militants (Marine et Lucie incluses) sur plusieurs aspects :
- d'abord sur le fait que la plupart des représentant.e.s politiques nous parlent au fond de gérer plus ou moins sagement un régime économique de plus en plus insoutenable, qui tend à faire monter la violence sociale et les pollutions et à détruire les écosystèmes. Presque tous les élu.e.s nous parlent sans arrêt de "changement" sans jamais remettre en cause sérieusement la marche ordinaire du capitalisme, ses rythmes effrénés, ses maltraitances et la maximisation tout aussi ordinaire du profit priorisée sur tout autre objectif humain. Je crains qu'on ne s'en sorte pas en mettant des pansements sur un système éliminant structurellement de plus en plus de personnes du circuit et produisant des pollutions à la vitesse des IA. Nous avons besoin d'autre chose. Ce n'est même pas l'idée de "rupture" (qui donne l'impression qu'on va tout bloquer avec un couteau entre les dents), mais une évolution radicale qui commence, comme une nouvelle ère. Je crois que face à cela, il est certes indispensable d'avoir un programme précis (et chiffré) comme l'a fait le NFP, mais il faut surtout une vision et réussir à communiquer à des millions de personnes le goût de quelques grandes batailles communes à la plupart des organisations militantes (mouvements, associations, entreprises de l'ESS, partis et syndicats).
- réussir quelque chose, gagner ensemble comme le formulent Lucie et Marine, c'est travailler à faire grandir le mouvement né en juillet 2024, continuer de chercher et rendre visible ce qui nous rassemble; c'est réussir à dire clairement, "nous ne pouvons pas continuer comme ça, nous allons avoir besoin de tout le monde pour organiser un changement qualitatif majeur" : cela commencera par s'attaquer à la pauvreté et signifiera mettre en œuvre tout ce que demande comme changements qualitatifs le ressourcement de nos sols, de nos eaux potables, l'évolution de la place de l'éducation dans la vie humaine, le renforcement massif de nos industries vitales, ou encore la conquête d'une autonomie alimentaire. En trois mots: soigner nos communs. Protéger le vivant et changer les modalités et finalités du travail en discutant, entreprise par entreprise de ce qu'il convient de produire moins, de produire plus, de produire mieux.
- enfin, il y a des "éléments de langage" qui me paraissent décisifs concernant ceux et celles à qui nous souhaitons communiquer le désir de créer une vraie force citoyenne (c'est-à-dire pas celle du capitalisme spéculatif). Je pense en particulier que faire gagner un projet écolo-social ne doit pas être réduit à l'objectif de « battre l’extrême droite » mais témoigner d'une volonté collective de réussir une alchimie politique d’un nouveau type incluant toutes sortes de tendances, y compris toutes sortes de gens paumés ou en rage ou ayant franchement décroché, et qui ne raccrocheront pas pour « battre l’extrême droite ». Je ne les appelle pas les « fâchés pas fachos » mais plutôt les « décrocheurs électoraux ». Je les perçois comme une très large frange de personnes qui ont comme point commun soit d’être largués, dégoûtés, déclassés et qui ne supportent pas qu’on les méprise ou que l’on travaille à leur faire honte… surtout s’ils sortent de prison, sont précaires et isolés, ont des parents pieds-noirs favorables à l’Algerie française ou ont des mots parfois tout à fait navrants pour le versant "bien éduqué" du pays.
J'ai impression que le binôme Marine Tondelier / Lucie Castet est celui qui coche le plus de cases pour être une candidature écolo-sociale crédible dans les temps proches, elle est peut-être farfelue et sans doute loin d'être LA réponse aux grandes crises en cours, mais je vous la livre quand même. Autant je ne crois pas en l'homme (ni en la femme) providentiel.le autant je pense qu'il faut offrir une hypothèse tangible et incarnée dès maintenant. Surtout si les élections arrivent plus vite que prévues. Il faut des figures, des voix, des paroles à taille humaine en plus des "programmes". Ne parler que "programme" donne à lire une vision technocratique et froide du monde et de la politique qui ne soulève aucun enthousiasme ou presque. Et finalement incite au chacun pour soi ou au constat d'impuissance plus ou moins nauséeux ou déprimés.
Alors ce message, au milieu de toutes sortes d'informations laissant peu de place à l'optimisme parce que je crois que nous avons intérêt à être très nombreux à exprimer sans tarder qu'il reste des scénarios possibles en dehors de la brutalité du capitalisme autoritaire, qu'il soit techno-libéral ou néo-nationaliste, en dehors de ces propositions de rappel à "l'ordre" qui sauront sans doute tout-à-fait traquer les bouc-émissaires et réduire les libertés, mais bien en peine d'ouvrir la moindre perspective de progrès humain désirable.
Bien à vous
Vincent Glenn / 4 décembre 2024
Ps étant de longue date fortement critique de notre Jean-Luc national je me permets de ne pas non plus participer aux actuels « Mélenchon bashing » me bornant à suggérer que la gauche gagnera beaucoup (et gagnera peut-être tout court,) à ce qu’il ne soit pas candidat à la fonction présidentielle mais accompagnant de ses riches connaissances politiques un mouvement qui ne demande qu'à monter en puissance. Bien entendu, c’est sans doute assez copieusement utopique, le garçon étant plutôt « habité » mais on ne sait jamais. J'ajoute que les accusations en antisémitisme à l'égard de LFI me semblent globalement et terriblement scandaleuse au vu de ce qu'il se passe à Gaza. Le 7 octobre a été un massacre terrifiant. Ce qu'il se passe depuis à Gaza n'a pas de nom. Mais des dizaines de vies effacées sous les bombes. Je crois que si nous envisageons sérieusement un grand virage qualitatif, autant ici que planétairement, il nous faudra des choses beaucoup plus puissantes que des affects de colère et parfois d'hystérie pure, de défense des mêmes et de négation de l'autre. Une dose de passion est sans aucun doute indispensable, leur donner corps avec des aboiements haineux ne fera qu'aggraver le climat atrocement guerrier qui continue de se perpétuer sous nos yeux.