...C'est ainsi que fut construit ce film, comme s'il s'agissait d'une actualité présente, dans l'esprit de cette collection historique intitulée "Présence du passé" que nous avions, Jean Mauduit, Bernard Revon et moi-même, imaginée comme étant un regard neuf et désaliéné sur l'histoire.
Le récit passionnant du duo de choc Guillemin/Thomas, illustré parfois par quelques documents, est une démonstration évidente et éclatante du scandale judiciaire épouvantable au sujet de cette intolérable affaire qui conduisit un innocent au bagne !
Mais notre propos ne s'arrêta pas à une simple dénonciation de l'injustice, fut-elle celle d'un aréopage militaire complice et pourri...
L'analyse des scandales permet souvent de mieux appréhender les haillons d'une société et d'en examiner les rouages : c'est exactement ce que nous révèle l'affaire Dreyfus, grâce à une sorte de radiographie morale et politique.
Malgré tous les efforts pour républicaniser la République, notre système restait encore paralysé sinon prisonnier du carcan conservateur, des idées reçues et de la bien-pensance bourgeoise...
Comment un fou-furieux comme l'anti-sémite Edouard Drumont était-il arrivé à convaincre une grande partie de l'opinion publique que nous étions trahis par un officier juif alsacien ?
Comment l'appareil massif du clergé français avait-il pris position pour cette injustice ?
Comment avait-on pu croire en la "raison d'Etat" ?
Comment peut-on lyncher un bouc-émissaire ?
(à suivre)