"Tous les pouvoirs sont des citadelles délabrées auxquelles nous prêtons fermeté en leur faisant allégeance. Quand serons-nous dissuadés de laisser s'incruster en nous l'autoritarisme que nous prétendons combattre ?
Sans chefs, sans meneurs autoproclamés, sans appareil politico-syndical , les insurgées et les insurgés de la vie quotidienne tissent l'étoffe d'une véritable société humaine. Le possible a besoin d'imagination. La curiosité est insatiable.
Le retour à la vie verra le triomphe de l'acratie, à savoir le dépassement de ces régimes baptisés démocratie, aristocratie, oligocratie, ploutocratie qui proposaient en commun un bonheur dont le peuple a encore les fesses écorchées.
Le retour à la vie implique le retour au local, la reconversion en individu autonome de l'individualiste et du calcul égoïste qui le déshumanise.
Seul le recours à une pratique expérimentale et poétique de l'autogestion et de l'harmonisation des désirs, permettra d'aborder concrètement la question du gouvernement du peuple par et pour le peuple.
On aura beau jeu de railler la Commune de Paris, écrasée par la bourgeoisie, les soviets d'ouvriers, de paysans, de marins, liquidés par les bolcheviks, les collectivités libertaires de la révolution espagnole, décimées par le Parti communiste. Mais ce sont là des tentatives à peine esquissées dont il nous appartient de tirer des leçons salutaires.
Puisque tout semble perdu, qu'avons-nous à perdre en multipliant la création de petites collectivités soucieuses d'aborder localement et concrètement les problèmes que l'Etat et ses commanditaires monopolistiques ne peuvent traiter que de façon mensongère, statistique, abstraite ?
Dans la débâcle du "lâchez tout", nous allons apprendre à ne lâcher rien. Ce qui est donné sans réserve possède en soi la grâce de l'effort qui l'aide à s'épanouir.
L'audace est au coeur de tous les désirs de vivre."