Il y a deux-cent-vingt ans, le 10 août 1792, le peuple de Paris, réagissant avec colère au "Manifeste de Brunswick" qui révélait au grand jour la trahison de la famille royale, excédé par les lenteurs et le légalisme exacerbé de l'Assemblée Législative, prenait d'assaut le château des Tuileries. Louis XVI et sa famille se réfugiaient à l'Assemblée ; ils devaient peu après être incarcérés au Temple.
Beaucoup plus que le 14 juillet 1789, cet épisode sanglant de notre histoire (il y eut quelques centaines de morts) marque un tournant décisif de la Révolution française car il ouvrait la voie à l'instauration de la République.
Il est aussi la démonstration que rien ne peut résister à la volonté populaire si elle se fonde sur les intérêts du plus grand nombre et sur les idéaux de la démocratie.
Je compléterai cette commémoration en citant François Furet* : "La démocratie sociale : voilà ce que désire, avec une conscience plus ou moins claire, le petit peuple des villes et des campagnes. Aux paysans il importe de se libérer totalement des entraves seigneuriales qui subsistent et d'accéder plus largement au butin que la bourgeoisie a mis sur la place publique : les biens nationaux. A Paris, boutiquiers et artisans, compagnons et ouvriers, ont renoué avec les vieilles utopies égalitaires de la Ligue et de la Fronde. Les sans-culottes sont devenus une force autonome et redoutable. A leurs yeux le 10 Août est une victoire incomplète. Il va peser désormais d'un poids toujours plus fort, comme si l'histoire pouvait être forcée ; comme si les forces vives du capital pouvaient être contraintes, à peine libérées, à rentrer dans le carcan des communautés vertueuses et pauvres du Moyen Age. Sans le ciment idéologique puissant offert par la guerre, un tel contre-courant se serait vite perdu. Le patriotisme révolutionnaire est devenu une relgion."
A bon entendeur salut !
NB/ le 10 Août est le sujet du film de Jean Renoir "La Marseillaise" où il exalte le rôle joué par les volontaires marseillais de Barbaroux qui étaient "montés à Paris" à l'occasion de la Fête de la Fédération.
* certains de mes correspondants intervenant à propos de mon billet "Le cri de Robespierre" m'ont accusé de sous-estimer François Furet pour qui j'ai la plus grande estime. Nous avons eu les meilleures relations et il apporta sa précieuse collaboration au triptyque "Valmy et la naissance de la République" que je réalisais en 1967 avec Abel Gance.