Le 16 mai 1871,dans l'après-midi,il y avait foule sur cette place Vendôme que nous devons à Louis XIV et à Mansart. Car on était en train d'abattre la colonne érigée par Napoléon après Austerlitz...
Il règnait un silence impressionnant tandis que les cabestans commencaient à vibrer sous la traction des câbles. Impassible sur son piédestal,Napoléon narguait la foule. On criait,on le conspuait. Les fanfares des 172e et 190e bataillons s'épuisaient en vain à couvrir la rumeur qui enflait...
A dix-sept heures trente,au deuxième essai,la colonne s'arracha à sa base et se brisa en trois morceaux,projetant au loin la statue de l'empereur (oeuvre du sculpteur Auguste Dumont) dont la tête roula dans un caniveau. La foule se précipita sur les débris de la colonne et planta des drapeaux rouges sur son piédestal.
Cette destruction de la colonne faisait suite à une décision du Conseil de la Commune de Paris qui avait estimé qu'il s'agissait "d'un monument de barbarie,un symbole de force brute et de fausse gloire,une affirmation du militarisme,une négation du droit international,une insulte permanente des vainqueurs aux vaincus,un attentat perpétuel à l'un des trois grands principes de la République française,la Fraternité."
Le principe de cette démolition avait fait auparavant l'objet d'une demande du peintre Gustave Courbet qui avait d'ailleurs publié fin octobre 1870,une lettre "à l'armée allemande et aux artistes allemands" dans laquelle il disait : "Laissez-nous vos canons Krupp,nous les fondrons avec les nôtres ; le dernier canon,gueule en l'air,coiffé du bonnet phrygien,planté sur un piédestal acculé sur trois boulets,et ce monument colossal,que nous érigerons ensemble sur la place Vendôme,sera notre colonne,à vous et à nous,la colonne des peuples,la colonne de l'Allemagne et de la France à jamais fédérées."
Le 16 mai ne serait-il pas une date à retenir pour une commémoration de cet acte magnifique et symbolique ?