En ce journées consacrées officiellement au "patrimoine", je me souviens de cette affirmation de Paul Ricoeur : "L'objet de l'histoire, c'est le sujet humain lui-même".*
Aussi vais-je oser relier le philosophe de l'histoire à l'historien des "lieux de mémoire", Pierre Nora, pour évoquer rapidement mes propres repères, ceux que je ne visite pas qu'une fois par an...
Le plus récent a fait l'objet d'une séquence mémorable du film de Marcel Ophuls "Le chagrin et la pitié". Il s'agit du "Mont Mouchet", ce combat héroïque d'une poignée de jeunes maquisards auvergnats contre l'armée allemande et la milice, la dernière semaine du mois de mai 1944. Les FFI payèrent un lourd tribu : 260 tués et 180 blessés. Ce "Gergovie des temps modernes" restera sans doute comme l'un des témoignages les plus éclatants de la lutte pour l'indépendance nationale.
Soixante-treize ans auparavant, le 28 mai 1871, 147 combattants de la Commune de Paris étaient fusillés au Père Lachaise et jetés dans une fosse commune. Le Mur des Fédérés rappelle leur martyre. Ce fut d'abord une réaction patriotique contre le siège de Paris par l'armée prussienne puis l'expression d'une révolte sociale. Je n'oublierai jamais ces grands ancêtres dont je partage les idéaux.
Enfin, le moulin de Valmy est aussi un lieu de ma mémoire**. Le 20 septembre 1792, la première armée directement issue du peuple, l'armée des sans-culottes, résista héroïquement aux troupes de la coalition austro-prussienne et des émigrés français. La Convention qui se réunissait le surlendemain de cette victoire, put ainsi proclamer : "Ce jour marque le début de l'an I de la République française."
Patrimoine ?
Patrie-moine.
* lire (ou relire) notamment "Histoire et vérité" (Seuil)
** je lui ai consacré un film qui constitue le troisième volet d'un triptyque, intitulé "Valmy et la naissance de la République" ; le premier volet de ce documentaire historique a été réalisé par Abel Gance.