Michel Denisot a mis au point avec "Le Grand Journal" une formule excellente qui mêle l'information au spectacle et le spectacle à l'information. De quoi faire pâlir de jalousie les autres chaînes,et aussi de quoi les ringardiser lorsqu'elles sont dans une posture "à vous Cognacq-Jay" ou qu'elles soient devenues une simple braderie commerciale...
Assisté d' une petite équipe de grande qualité qu'il anime avec une souriante autorité,il est aussi le metteur en scène du présent.
Ainsi mercredi soir 17 février avait-il invité sur son plateau,l'ancien Président de la République,Valéry Giscard d'Estaing et la journaliste Florence Aubenas,ancienne otage emblématique,auteur d'un reportage vécu comme employée de ménage. Nous avons donc pu voir côte à côte un vestige prestigieux de la "France des trente glorieuses" et une porte-parole de la France d'aujourd'hui,c'est à dire d'une France de la précarité aux franges de la misère mais toujours debout. Et avec le sens aigü de l'opportunité , Denisot mettait en présence le "séducteur de Lady Di" avec sa réincarnation foutraque en la personne de Florence Aubenas,jeune femme vive et lumineuse. Premier fantôme.
Cerise sur le gâteau de cette émission mémorable : l'arrivée d'un deuxième fantôme,joué par la ravissante miss météo,celui du Président battu aux élections de 1981 qui faisait ses adieux aux français.
Stupeur de Valéry Giscard d'Estaing. On avait l'impression qu'il était un OVNI dans ce studio,temple de la modernité.
Le grand philosophe espagnol Ortega y Gasset disait :"Je suis moi et ma circonstance". Nos consciences sont pétries de tout ce qui nous a effleurés : images,sons,odeurs,frémissements,rêves et souvenirs. Nous ne saisissons jamais totalement l'individu planté devant nous,a fortiori celui dont deux ou trois générations nous séparent. Avec ce moment miraculeux du "Grand Journal",Michel Denisot nous a permis de sentir la présence du passé. Giscard et ses fantômes.