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Billet de blog 22 février 2016

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De Verdun à Verdun

«L'histoire- comme-il-faut» ou le passé présenté comme un spectacle et commémoré dans un "son et lumière" officiel regardé par quatre millions de téléspectateurs (16% de l'audience nationale).

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il y a cinquante ans, un jeune réalisateur de télévision, Daniel Costelle, se faisait remarquer en signant une émission sur Verdun, dans la série "Les grandes batailles" pilotée par Jean-Louis Guillaud et Henri de Turenne ; son travail fut même couronné par le prix de la critique en 1966.

Ce téléfilm était novateur car, pour la première fois, la guerre était envisagée à hauteur d'homme et on s'intéressait davantage aux victimes du conflit qu'à la stratégie militaire. Par ailleurs, les deux journalistes producteurs de l'émission n'hésitaient pas à aborder les questions principales : les raisons ou les causes de l'affrontement et ses conséquences dans la longue durée.

Aujourd'hui où la télévision publique vient de diffuser "Apocalypse Verdun" dans le cadre du centenaire de la "grande guerre", on peut mesurer à quel degré de régression mentale les médias audiovisuels nous astreignent pour regarder notre propre histoire ; elle n'est envisagée que sous la forme d'un spectacle, ponctué de feux d'artifice, de colorisation intempestive et d'effets sonores appuyés.

Et c'est ce même réalisateur de l'ORTF qui est responsable du téléfilm en question, dont on se demande si il s'inscrit dans le sillage des "Son et lumière" ou s'il s'efforce d'imiter les jeux vidéo ?

En effet, cet album d'archives filmées, colorisées et bruitées, cousues entre elles par un texte approximatif débité d'une voix monocorde, devient vite monotone et fastidieux alors qu'il s'agit de présenter l'hécatombe la plus effroyable du XXe siècle !

Comment peut-on évoquer Verdun en éludant les questions essentielles : pourquoi ce massacre ? quelles en sont les causes ou les raisons ? à qui a profité le crime ? 

Daniel Costelle est sans aucun doute un super-documentaliste et un trés bon technicien mais il ne fait preuve d'aucune volonté d'analyse et de réflexion ni surtout de vision historique, comme il l'avait fait dans son "Verdun" de 1966.

Serait-il, lui aussi, victime de cette commercialisation de la télévision ?

Elle est devenue une machine à décerveler.

NB/ j'ai choisi le titre de ce billet par référence narquoise à "De Nuremberg à Nuremberg", un chef d'oeuvre du documentaire historique à base d'archives, réalisé par Frédéric Rossif avec un texte de Philippe Meyer.

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