On aura beau gloser à tort et à travers sur ces happenings qui tiennent chaud à la République de bronze de Léopold Morice, ces réunions montrent que l'esprit critique n'a pas été totalement éradiqué et qu'il y a encore des citoyennes et des citoyens qui ont échappé à l'enfumage général.
Ainsi, chaque soirée, une grande place de Paris est-elle transformée en amphithéâtre de plein air comme dans les temps anciens lors de l'acmé de la démocratie athénienne sous Périclès, "l'Olympien", qui avait su confisquer les pouvoirs de l'Aréopage pour les répartir entre la boulê et l'héliée.
Aujourd'hui où la démocratie elle-même est asphyxiée par l'Etat dont les méthodes unitaires et centralistes vont le plus souvent à l'encontre des intérêts du plus grand nombre, il est tout à fait réconfortant d'assister au début d'un mouvement de contestation qui va probablement grandir et s'amplifier jusqu'à prendre la forme d'une révolution.
Et cette vague de remise en question du bien-fondé de la gouvernance républicaine bourgeoise, a de solides racines historiques : que ce soient les sections des sans-culottes de 1792 qui vont être le principal accélérateur de la Révolution française ou les Comités de vigilance républicaine des arrondissements de Paris en 1870, le peuple a su manifester et faire entendre sa voix puissante lorsque l'équilibre de la nation était en péril.
Car en 2016, la France est frappée par la spirale du déclin, dans une construction européenne fabriquée par les oligarchies financières pilotées par Wall Street, et barbotte dans le jus politicien d'une Ve République à bout de souffle.
C'est le prix de la liberté, nous dit-on ? Oui, mais la liberté politique est un leurre sans l'égalité sociale et n'allons pas croire, d'ailleurs, que l'égalité sociale puisse croître et fleurir sans la lumière abondante de la liberté politique.
Seulement, cette liberté, il faut l'aller chercher là où elle est : il faut la demander au fédéralisme et à l'autonomie des groupes. Car nous savons qu'au-delà de la société bourgeoise actuelle, faite d'iniquités par le privilège, il existe une autre société, faite de justice et de fraternité.
Le tout est d'y mettre le pied, de se l'approprier, de la faire passer du monde théorique des conceptions intellectuelles dans le monde pratique des faits matériels.
La forme républicaine est une forme transitoire, car elle possède une souplesse et se prête à toutes les transformations.
"C'est un instrument, écrit Arthur Arnould*, qui joue, suivant le musicien, Sauvons Rome et la France ! ou la Marseillaise. C'est au peuple de lui faire jouer le Ca ira !"
La politique à coeur ouvert !
* Communeux, auteur d'un remarquable essai intitulé "L'Etat et la Révolution".