Ce réalisateur, scénariste et acteur franco-tunisien quinquagénaire incarne le renouveau du cinéma français.
Depuis son premier rôle dans "le thé à la menthe", produit par notre ami désertique, où il jouait le rôle d'un jeune immigré algérien vivant dans la précarité à Barbès-Rochechouart, il est passé derrière la caméra et a réalisé "La faute à Voltaire", "L'Esquive", "La Graine et le Mulet", "La Vénus noire" et "La Vie d'Adèle"*, qui vient d'être présenté dans la sélection officielle du 66e Festival de Cannes.
Passionné de théâtre (il avait joué "Un balcon sur les Andes" d'Eduardo Manet à l'Odéon en 1980 et mis en scène "L'architecte" au Festival d'Avignon), il s'est fait connaître au cinéma avec "L'Esquive" où il suivait une bande de collégiens de la banlieue répétant une pièce de Marivaux pour la classe de français. Ce film, qui révélera Sara Forestier, sera couronné en 2004 à la 30e cérémonie des Césars.
Ce sera ensuite "La Graine et le Mulet", prix Louis Delluc 2007 et lauréat des Césars 2008. Puis cette "Vénus noire" en référence à la "Vénus Hottentote", une curiosité malsaine issue du voyeurisme colonial...
Kéchiche est le fruit de l'heureuse rencontre de la culture occidentale et de la culture arabe : il est un mulet culturel, multiculturel. C'est un cinéaste qui privilégie les scènes de la vie quotidienne, banales, parfois insignifiantes mais tout à fait représentatives de la sensibilité humaniste de son tempérament artistique. Car il est un grand artiste, engagé contre l'intolérance, le racisme et l'injustice qui frappent ses frères et soeurs des banlieues.
Ne déclarait-il pas en 2011 aux Inrockuptibles : "Je souhaite de tout mon être une longue vie à cette révolte populaire (il s'agissait du Printemps arabe) qu'elle continue à faire des petits à travers le monde arabe, bien sûr, mais pas seulement. Je rêve de la voir se propager à toutes les dictatures, mais aussi à toutes les démocraties corrompues, partout où sévissent l'injustice sociale, le mépris et l'humiliation des hommes. Je rêve d'un soulèvement de nos banlieues."
En tout cas si le jury du Festival de Cannes a la conviction qu'il convient de lui décerner la palme d'or, ce sera la meilleure réponse à cette manifestation grotesque contre la loi Taubira.
Qué ? Chiche !
* récit d'une passion homosexuelle, les mues d'une jeune lesbienne.