...mais, avant de vous faire découvrir le menu de ce gueuleton mémorable, il faut bien savoir que les Parisiennes et les Parisiens constituant la majorité de la population, crevaient littéralement de faim et de froid et ne survivaient que grâce aux mesures d'entraide et de solidarité prises et mises en oeuvre par la Garde nationale : il y eut ainsi 11 865 décès en décembre et 19 233 en janvier 1871.
Car le maire de Paris, Jules Ferry, a été incapable de gérer la pénurie et a laissé le marché dicter sa loi : le beurre atteint 30 francs (or) le Kg, la livre de chien vaut 4 frs, un chat 20 frs, un corbeau 5 frs, un rat 3 frs, un moineau 1,25 frs.
Par contre, les nantis appartenant aux classes aisées font une cure de gastronomie exotique : on mange de l'éléphant, du loup, du casoar, du porc épic, de l'ours, du kangourou...puisqu'on a laissé fusiller les bêtes du zoo et du jardin des plantes.
Selon le cuisinier Thomas Genin, le rat donne une viande d'une formidable qualité, fine quoique un peu fade, mais parfaite si elle est bien assaisonnée. Il en sert des terrines avec une farce de chair et de graisse d'âne...
D'autres recettes ont été conservées en archives : la daube de serpent python, le civet de lion, ou les crépinettes de rhinocéros.
Chez Peter's, le réveillon propose : des sardines, du céleri et des olives en hors d'oeuvre ; du saumon à la Berzelius en relevé ; un sajou (pot au feu de singe) au vin de Bordeaux en potage ; des escalopes d'éléphant avec une sauce aux échalottes en entrée ; de l'ours à la sauce Troussenel comme rôt ; des pommes et des poires en dessert...le tout largement arrosé du meilleur Chinon ainsi que du Champagne récupéré dans la vente aux enchères de la cave de Napoléon III.
C'était il y a cent-cinquante ans.
Bon appétit !
Nb/ cf un récit détaillé dans le vol 2 des "72 Immortelles" (éditions du Croquant)