Je crois avoir suffisamment critiqué les programmes de la télévision de service public pour me permettre aujourd'hui, de marquer ma satisfaction d'avoir assisté, hier soir sur France 2, à une superbe prestation audiovisuelle avec la résurrection de "Taratata". L'émission a réuni 4,3 millions de téléspectateurs, soit 20,9% de l'audience nationale, en deuxième position derrière "Danse avec les stars" (TF1).
En effet, brassant les styles et les générations, Nagui* et Gérard Pullicino nous ont offert un show musical d'une grande qualité, présenté sans verbiage excessif, dans un Zénith bourré à craquer (6000 spectateurs ?), avec une pléiade de célébrités du music-hall entourant Johnny Halliday, Eddy Mitchell, Alain Souchon, Laurent Voulzy ou Patrick Bruel : Louis Bertignac, Faada Freddy, Selah Sue, Véronique Sanson, Ibrahim Maalouf, Michel Jonasz, Bénabar, Christophe, Cats on Trees, Yael Naim, Maître Gims, Louane, Féfé, la famille Chedid, Youssoupha, etc...
J'ai particulièrement apprécié une jeune chanteuse de 17 ans, Marina Kaye, avec "Homeless".
Cette émission-culte, créée en 1993, arrêtée par la présidence Pfimlin, est reprise et relancée par Delphine Ernotte, la nouvelle patronne de France-Télévisions, dont c'est le premier acte majeur. A noter que la recette du Zénith devait être intégralement versée à la Recherche contre le cancer.
Hormis le plaisir que l'on pouvait éprouver en réécoutant "Gabrielle" ou les pulsations rythmiques du rappeur Maître Gims, la grande qualité de cette soirée est la participation du public, que Nagui a sollicité plusieurs fois, reprenant en choeur et avec une belle énergie, les refrains des chansons : ce qui donnait une formidable impression de communion collective, d'union et de fraternité.
A une époque où notre pays est la proie des divisions, des exclusions, des racismes, de haine, ce "taratata" arrive à propos comme une grande parenthèse de convivialité, comme un beau moment de réconciliation sociale.
L'histoire de la fraternité chorale, de la fête de la Fédération le 14 juillet 1790 avec le "ça ira", à cette "Marseillaise des tripes", gueulée à pleine voix dans le grand salon de l'Hôtel de Ville de Paris le 24 août 1944, prouve si besoin en est, que le peuple prend viscéralement conscience de son existence (et de sa force) lorsque ses voix se mêlent dans un grand bouquet harmonieux et rythmé. Même s'il ne s'agit pas d'un hymne.
Le chant aurait-il une vertu révolutionnaire ?
Il est un catalyseur de fraternité.
* à qui Fleur Pellerin vient de remettre l'Ordre national du Mérite