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Billet de blog 26 janvier 2017

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L'Assiette au beurre

Le «Penelope gate» déclenché par le «Canard enchaîné» s'inscrit dans cette vieille tradition des lanceurs de scandales, dont la jubilatoire «Assiette eu beurre», créée le 4 avril 1901 par Samuel Schwartz est le prototype.

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C'est dans le sillage de cette formidable libération de la parole qui eut lieu lors des deux mois de la Commune de Paris que naquit cette presse satirique démuselée qui prit pour cible les larcins, les exactions et les turpitudes de la république bourgeoise.

"L'Assiette au beurre" qui précéda de quatorze ans la fondation du "Canard enchaîné" par le couple Maréchal, fût l'inlassable pointeuse des scandales qui ponctuèrent les premières années de la IIIe République, cette "république des ducs" dont avait accouché l'assemblée monarchique de Versailles et qui installa dans la pratique parlementaire, la routine des passe-droits et l'usage ordinaire des prévarications.

"L'affaire Dreyfus" constitua un moment privilégié pour tous les journaux satiriques dont le célèbre dessinateur Caran d'Ache fut la vedette pour ses deux tableaux "Ne parlons pas de l'Affaire" : une famille à table, soupe tranquillement. On la retrouve en dessous, échevelée et hurlant, nappe arrachée et vaisselle brisée, avec cette légende explicative : "ils en ont parlé !".

La république étant devenue la cour des "notables", il n'est pas étonnant qu'ils n'aient eu aucun scrupule à tendre leurs mains vers cette "assiette au beurre" providentielle dont ils étaient les gérants...

Et là, me revient un souvenir d'adolescence que je vais me permettre d'évoquer : au début des années cinquante, j'avais fait partie d'une délégation étudiante qui devait porter à l'Assemblée le résultat d'une pétition concernant la revendication du pré-salaire organisée par l'UNEF.

Ayant sollicité tous les groupes parlementaires, nous n'avons été reçus que par le groupe communiste, en la personne de Pierre Villon*.

Je me souviens parfaitement de cet homme, trés maigre, d'une grande dignité dans son costume rapé de pauvre. Il nous avait écouté attentivement et nous avait dit d'une voix douce qu'un "représentant du peuple devait n'avoir d'intérêt que pour les autres, et en priorité pour la jeunesse".

Il avait exactement le profil du mandataire que décrivait le Comité central de la Garde nationale le 25 mars 1871 :

"Evitez ceux que la fortune a trop favorisés, car trop rarement celui qui possède la fortune est disposé à regarder le travailleur comme un frère...Cherchez des hommes aux convictions sincères, des hommes du Peuple, résolus, actifs, ayant un sens droit et une honnêteté reconnue."

C'était il y a 146 ans.

* grand résistant, membre du CNR, député de l'Allier, mari de Marie-Claude Vaillant-Couturier

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