Sans vouloir refaire le parcours de l'Idée européenne depuis l'Empire romain jusqu'à nos jours, il n'est pas inutile de rappeler les quelques jalons qui ont été plantés dans le corpus prospectif de l'imaginaire du vieux continent, depuis la Révolution française, en excluant tout esprit de conquête.
Saint-Just d'abord, ce chevalier libertaire, puis le "premier partageux" Gracchus Babeuf prolongé par Buonarroti, Goethe, Victor Hugo, Fränkel et Eugène Pottier, Jaurès, Barbusse, Aristide Briand, Marceau Pivert, Henri Frenay, et bien évidemment Winston Churchill en 1945.
Ils ont tous compris qu'il fallait trouver à tout prix le moyen d'arrêter cette fatalité des affrontements, des guerres et des massacres, à l'issue d'un millénaire particulièrement riche en apocalypses et en hécatombes. Et en même temps, ils n'étaient pas insensibles à la réussite de la naissance d'un nouveau monde, formé sur les bases de la doxa fédérale.
Mais au lieu de s'inspirer du modèle américain (ou Suisse), ils se sont laissés orienter vers une structure mercuriale commune, laissant de côté ce qui aurait du servir de ciment à l'union : la démocratie politique. Tant et si bien qu'ils ont créé une Europe Bruxelloise qui n'a aucune âme ni aucune légitimité démocratique.
Alors, comment sortir de cette impasse ? Comment éviter que le Brexit devienne contagieux et que cet ersatz d'Europe ne perdure qu'en tant que super-marché pour quelques nations abonnés à l'euro, dominé par l'Allemagne, ou bien comme un champ de tir offert aux spéculateurs du monde entier ?
Le fédéralisme européen peut être l'une des réponses salutaires à la crise ouverte par le Brexit car il permettrait à une "Europe des peuples" de puiser sa légitimité non plus dans la volonté des diplomaties nationales, mais directement dans celle des individus, les femmes et les hommes qui vivent sur le vieux continent.
L'Europe citoyenne fédérale confierait le pouvoir à des institutions responsables devant le suffrage universel européen. Cela impliquerait l'abolition du principe d'unanimité qui est aux antipodes de l'idéal démocratique. En privilégiant les rapports de force économiques dans la gouvernance bruxelloise actuelle, l'unanimité favorise la loi du plus fort et les tendances hégémoniques...
Or l'Europe a besoin d'être fédérée en une union de citoyens, selon le principe de l'égalité juridique. Sinon leur liberté risque d'être aliénée.
Il ne faut plus voir la construction européenne à travers le prisme de l'hyper-centralisation. Car "l'Europe des peuples" n'a aucune vocation à étouffer les libertés et les identités régionales ; d'ailleurs le régionalisme est trés europhile.
L'exemple de la Commune de 1871 est éclairant : plus une démocratie est localisée, plus elle est respecteuse de l'être humain. Ainsi une démocratie européenne se contenterait de créer un espace de liberté qui ne se préoccuperait que de ce que les échelons inférieurs ne peuvent plus faire seuls...
Donc, pourquoi la France ne se mobiliserait-elle pas pour promouvoir une démocratie fédérale ?
Hollande a une magnifique carte à jouer :
Refonder l'Europe.