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Billet de blog 26 octobre 2024

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Truffaut : un portrait conformiste et biaisé

Etant de la même génération que François Truffaut, j'ai attentivement regardé le grand documentaire biographique qui lui a été consacré sur France V et qui est signé David Teboul...

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...étant moi aussi un cinéphile formé et nourri par les ciné-clubs, il se trouve que ma rencontre avec celui qui allait devenir une icône de la nouvelle vague a eu lieu à la fin des années Cinquante c'est à dire au moment où le futur réalisateur s'est acharné à pourfendre dans l'hebdo ARTS les grandes figures du cinéma français en lutte contre les accords Blum/Byrnes.

Nous fréquentions les mêmes salles et après une soirée au Cardinet qui avait programmé "Alexandre Nevsky" d'Eisenstein, je raccompagnais Truffaut jusqu'à l'hôtel de Tunis où il habitait, à proximité de la place Clichy.

Sur le parcours, nous avions trouvé des packs de lait qui venaient d'être livrés et nous avons bu l'une de ces bouteilles.

Je me rappelle très bien de notre conversation, particulièrement animée, car je lui ai reproché avec véhémence son pamphlet contre Claude Autant-Lara, cinéaste anarchiste dont j'avais adoré "Le diable au corps"...

Je l'ai revu plusieurs fois après cette algarade et il m'a raconté sa vie après avoir déserté de la Légion étrangère car il voulait fuir l'enfer quotidien du foyer familial de ses parents adoptifs ; il eut la chance de trouver un emploi de livreur à l'association "Travail et culture", grâce à la bienveillante sollicitude d'André Bazin, dont il avait accepté la protection paternelle.

Il s'était alors construit une vie totalement orientée vers la connaissance littéraire et le plaisir du cinéma, en fréquentant les bibliothèques municipales ainsi que les salles obscures.

Le documentaire qui lui est consacré focalise toute son enfance et toute son adolescence sur "Antoine Doinel", ce qui est un faux-sens car ce personnage issu des "Quatre-cents coups" est une projection imaginée par un auteur désirant se fabriquer un passé mythique dont le parcours est néanmoins validé par des faits vécus, qui ne sont utilisés que pour justifier la cohérence de l'autobiographie rêvée !

François Truffaut est en réalité un brillant autodidacte, un Rastignac cinématographique qui a eu l'intelligence d'apprendre son métier de cinéaste en le pratiquant, ce qui n'obère en rien la réussite de "Jules et Jim" et la magie de "La sirène du Mississipi" où Il a trouvé en Belmondo un clone-porte parole bien supérieur à Jean-Pierre Léaud.

Voilà donc un cinéaste qui s'est imposé en s'opposant aux autres ; mais son oeuvre, scolaire et académique, est la reprise laborieuse du travail de ceux qui l'ont précédé !

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