La manif intitulée "Jour de colère", les débordements qu'elle a suscités et les quelque deux-cent-cinquante interpellations qui ont été pratiquées par les forces de police, ne peuvent que rappeler l'une des sombres pages de notre histoire contemporaine : la crise du 6 février 1934.
Après le limogeage du préfet de police Jean Chiappe suite à l'affaire Stavisky, les groupes de droite ("Jeunesses patriotes", "Phalanges universitaires") ainsi que l'Action françaises et les Ligues d'extrême-droite ("Ligue des patriotes", "Solidarité française", "Francistes", "Fédération des contribuables") sans oublier les anciens combattants regroupés au sein des "Croix-de-feu" du colonel de la Rocque...appellent à manifester le jour même de l'investiture de Daladier comme Président du Conseil, place de la Concorde, en face de la Chambre des députés.
La manifestation va vite tourner à l'émeute et à la guérilla urbaine. Jets de projectile, pierres, moellons, arceaux de fonte brisés, morceaux de vitres et de bitume. Les forces de l'ordre sont harcelées, subissent quelques tirs sporadiques et seront dans l'obligation d'ouvrir le feu à leur tour au moins à trois reprises au cours de la soirée.
Il y aura 14 morts et 657 blessés dont deux décéderont plus tard des suites de leurs blessures dont un Garde républicain.
Face à la gravité de la situation, Daladier se résoudra à démissionner. Et un gouvernement dit "d'union nationale" sera formé sous la présidence de Gaston Doumergue (ancien Président de la République) avec les principales figures de la droite parlementaire et, en prime, comme ministre de la Guerre, le Maréchal Pétain*.
Le souvenir délétère de cette page d'histoire devrait nous faire réfléchir car ces événements se sont produits dans le sillage de la grande crise économique de 1929, au cours d'une période marquée par des scandales financiers, un chômage croissant et l'impuissance d'un gouvernement sans véritable soutien populaire...
Faut-il faire un dessin ?
NB/ pour en savoir plus sur le 6 février 1934, lire l'excellent livre de Serge Berstein (Julliard)
* cf mon film "La prise du pouvoir par Philippe Pétain"