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Billet de blog 27 février 2016

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Un sondage nommé César

Le cinéma serait-il enfin reconnu comme étant porteur de "vingt-quatre fois la vérité par seconde" ?

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La traditionnelle cérémonie de remise des Césars, la quarante et unième, qui eût lieu hier soir au théâtre du Chatelet, a été la parfaite démonstration d'un cinéma français qui a choisi de s'orienter vers la projection du réel.

En effet, les 4598 membres de l'Académie des Arts & Techniques du Cinéma (dont je suis) ont préféré voter pour les oeuvres ayant comme sujet les problèmes sociaux ou sociétaux plutôt que de choisir les films selon des critères purement esthétiques.

Cette préférence thématique nous permet donc de considérer cette manifestation comme étant une véritable interrogation de l'opinion, une lecture de la température de ce grand corps malade qu'est actuellement notre pays...Un sondage grandeur nature.

Et la sélection finale, qui concerne aussi bien les longs que les courts métrages, est révélatrice de nos préoccupations, de nos peurs et de nos angoisses, ainsi que de nos espoirs.

J'ai moi-même visionné une petite moitié des DVD du coffret de la production 2015, et je peux témoigner de la réalité de ce que j'affirme avec, probablement en plus, ce supplément indicible qui nous fait sentir le non-formulable et le magma sociologique du non-dit.

Ainsi, les deux films qui ont dominé la compétition, "Fatima" et "Mustang" sont tous les deux l'expression de la problématique difficile  de l'émancipation sociale, rendue encore plus difficile dans le cas de l'intégration inter-sociétale, la situation dramatique et précaire des migrants faisant l'objet du beau film de Jacques Audiard "Dheepan", palme d'or du dernier festival de Cannes.

Intégration encore avec "La tête haute" d'Emmanuelle Bercot dont le jeune héros, rebelle et révolté, incarné par Rod Paradot, a reçu le César du meilleur espoir.

Intégration enfin, ou plutôt réinsertion dans le monde du travail, avec "La loi du marché" de Stéphane Brizé, montrant l'absurdité de ce traitement du chômage abandonné à l'incompétence d'une bureaucratie coupée des réalités de l'entreprise. 

Vincent Lindon, qui est toujours excellent, porte sur ses épaules, toute la détresse de cette force de travail sacrifiée, de cette humanité rejetée, de ces oubliés du progrès : il est le symbole absolu de la décrépitude française !

Mais dans le grand dilemme réalité/fiction, les "professionnels de la profession" ont tout de même rendu hommage au réalisateur Arnaud Desplechin qui a signé avec "Trois souvenirs de ma jeunesse", une oeuvre d'une grande sensibilité littéraire et d'une élégante écriture cinégraphique, et ils ont couronné "meilleure actrice 2015" cette admirable comédienne qui chantait Frot, dans le film jubilatoire intitulé "Marguerite".

Cette soirée a été marquée enfin par deux événements : l'admission de Claude Lelouch dans le cénacle du cinéma français (mieux vaut tard que jamais) et la prestation originale et plaisante de Florence Foresti qui a su déniaiser cette fastidieuse distribution des prix grâce à sa fantaisie débridée.

Vive le cinéma !

Jean A.Chérasse

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