Après le discours à tiroirs de François Hollande sur les marches du Panthéon, après cette tentative de récupération politicienne d'un hommage légitime à quatre grandes personnalités de la Résistance, on pourrait s'interroger sur ce concept "d'indifférence" qui a été brandi comme la bouée de sauvetage d'un quinquennat qui coule...
Lorsque on échoue à règler (même à minima) les problèmes du présent, le recours à l'histoire est un expédient utile. Ce fut le cas avec Sarkozy et la lettre de Guy Môquet ainsi que par son incroyable péroraison du Vercors ; c'était la conclusion que l'on pouvait tirer hier de cette panthéonisation.
Dans la catégorie des "profiteurs de l'histoire", les chefs d'Etat sont donc bien placés pusqu'ils ont l'avantage régalien de choisir eux-mêmes les commémorations ! On pourra me rétorquer que c'est de bonne guerre et que cela n'a, en fait, pas beaucoup d'importance...
Par contre, il est une autre catégorie de "profiteurs" qui détient un pouvoir (usurpé) sur l'opinion publique : ce sont les programmateurs de la télévision du service public.
Leur action délétère est soit directement "inspirée" par les lobbies de droite qui tiennent le haut du pavé en ce moment : les "secrets d'histoire" de Stéphane Bern, le "métronome" de Laurent Deutsch voire les "Apocalypse" de Costelle, soit l'ignorance de ce qui existe et qui pourrait trouver une opportune rediffusion à un moment où l'actualité rend hommage au passé.
C'est le cas notamment avec l'excellente série intitulée "Femmes dans la guerre" (co-produite par ARTE et l'INA)* qui a le grand mérite d'être le témoignage choral des femmes ayant participé au même titre que les hommes, non seulement à la survie quotidienne des familles mais aussi dans les combats contre l'occupant, pendant la deuxième guerre mondiale.
Et la réalisatrice de cette série, Guylaine Guidez, a fait appel à toutes les sensibilités politiques de la Résistance ce qui aurait pu reéquilibrer le choix partiel et injuste de l'Elysée qui semble avoir rejeté les Communistes ; et c'est honteux !
Alors, sous pretexte de faire du neuf (la technique permettant désormais un meilleur formatage), ces programmateurs qui sont des bureaucrates intoxiqués par les jeux vidéo, négligent l'essentiel de leur mission : le message humain de l'évocation historique.
Mais sans doute la raison de l'audimat est-elle toujours la plus forte ?
Les Français auront donc la mémoire courte.
* en cinq épisodes d'une heure : "Temps de la peur" - "Temps de misère" - "Temps de service" - "Temps de courage" - "Temps de douleur" (cette série existe en DVD ; un livre comportant les témoignages a été édité chez Perrin)