Après l'accident d'avion qui a coûté la vie au PDG de Total et après ses obsèques nationales à Saint-Sulpice, il y eût moult commentaires dont la plupart s'apparentaient plus à un panégyrique qu'à la simple compassion humaine. Toutefois en marge de ce consensus,quelques voix insolentes se sont manifestées pour rappeler les méfaits du géant pétrolier...
Autrement dit la classe des "honnêtes gens" a rendu hommage à l'un de ses illustres membres, en présence des hautes autorités de l'Etat.
Cette taxinomie (l'appelation "honnêtes gens") est apparue pour la première fois sous la monarchie de Juillet alors que la bourgeoisie, qui avait été incitée par Guizot à s'enrichir, tenait le haut du pavé. Elle prospéra évidemment sous Napoléon III et forma le socle inébranlable qui porta l'exécrable Adolphe Thiers au pouvoir avec cette "république monarchienne" de Versailles.
Dans son fulgurant essai, "Nationalistes et Nationaux", l'excellent Henri Guillemin a consacré cette expression en la faisant entrer dans le vocabulaire historique.
Aujourd'hui, le parangon des "honnêtes gens" semble bien être Monsieur Pierre Gattaz, le président du Medef. Il vaut sans doute mieux que son odieuse marionnette des "Guignols de l'info" mais il sussure avec une parfaite hypocrisie le langage apaisant de la collaboration de classe, de l'abandon du modèle social français qui est d'après lui une condition sine qua non de la création de richesses, c'est à dire du retour de l'emploi.
C'est d'ailleurs la carte de maîtresse du chantage qu'il exerce à l'égard du gouvernement (cf mon billet "Le grand chantage")
Il était ce matin l'invité de France Inter où il a fait patte de velours en développant son argumentation de "bon sens", le message d'un patronat bien-pensant destiné aux porteurs de casquettes, aux salauds de pauvres, à la plèbe des chomeurs.
Le capitalisme ne peut avoir un visage humain.