A l'instar des hilotes, ces populations grecques de Laconie et de Messenie qui étant asservies aux Spartiates ne jouissaient - comme les serfs du Moyen Age - d'aucun droit ni d'aucune reconnaissance, les exclus de la société civile, aujourd'hui, sont les nouveaux ilotes de la démocratie.
N'étant pas concernés par le fonctionnement des institutions de la République, tous ces laissés pour compte de notre communauté nationale vont grossir le premier parti de France, celui des abstentionnistes.
Car s'ils ne figurent pas sur les listes électorales, ils refusent de se déplacer pour mettre un bulletin dans l'urne et vont ainsi apparaître dans les premières statistiques annoncées par les médias, les dimanches de consultation civique.
Ainsi une trés large fraction de la population semble se désintéresser de la marche des affaires de la nation ...
Cet incivisme récurrent n'est pas une maladie infantile de la démocratie, il est sans doute la tumeur cachée du suffrage universel qui n'est viable que s'il est assorti d'une préparation morale et pédagogique.
Evidemment, nous en sommes loin et les fameux slogans de Mai 68* peuvent s'afficher à nouveau, en toute clarté et aussi en toute justification lorsqu'il s'agit d'une élection au système majoritaire à deux tours qui élimine impitoyablement les sensibilités dites minoritaires ou ces "petites listes" comportant souvent des talents et des compétences.
On peut comprendre que dans ces conditions le refus de l'alternative "blanc bonnet / bonnet blanc" puisse s'imposer comme un réflexe civique.
Tant qu'une société laissera aux restaurants du coeur le soin de nourrir une grande partie de sa population, tant qu'une société laissera errer sans perspective d'avenir toute une fraction de sa jeunesse, tant qu'une société ne prendra pas les mesures urgentes pour que ses membres aient un toit, tant que le vent de paroles de ses dirigeants ne sera qu'un bruit de fond...
...les élections ne seront que gesticulations et abandon.
* élections, piège à cons ; élections, trahison.