Se préparant à une victoire, à la faveur des sondages, et il faut toujours envisager cette perspective, les militants, qui ne sont pas nés de la dernière pluie, savent qu'il faudra une mobilisation des salariés pour tirer la gauche au pouvoir vers le haut. Acceptons cette idée.
Cependant, il ne faudra pas rendre le "mouvement social" responsable de ce qui est hors d'atteinte pour lui. L'expérience grecque depuis 2010 montre en effet que des années de manifestations et de grèves générales n'ont pas fait bouger d'un iota la politique économique liée aux mémorandums imposés par l'Union européenne, comme le rappelle par exemple Olivier Drot (Okeanews). Mais c'est aussi ce que les Français ont pu constater après les mobilisations géantes de 2010 sur les retraites ou de 2016 sur la loi Travail. La politique économique de notre pays est en effet dépendante des Grandes orientations de politique économique de la Commission européenne (GOPE), qu'il s'agisse du droit du travail, des retraites, de la sécurité sociale ou des salaires. La non-application des "recommandations" de la Commission est sanctionnée par une amende considérable qui peut aller jusqu'à 0,2% du PIB du pays.
De même que les politiciens, engagés dans la construction européenne, n'ont pas de "marge de manoeuvre", quelle peut être celle des syndicats, souvent dépassés par la "base" ?
Elle est très faible. Les syndicats français, CGT compris, sont financés par la Confédération européenne des syndicats (CES), qui est d'ailleurs la référence de Mélenchon en matière de luttes sociales dans sa campagne électorale.
Or, la CES est une émanation de la Commission européenne. Ainsi, elle peut lancer des mobilisations européennes de pure forme "contre l'austérité", un peu comme le fait le Parti de la gauche européenne (PGE), mais elle a refusé de prendre position sur la loi El Kohmrie en 2016, qui n'est qu'une mise en oeuvre des GOPE du 14 juillet 2015.

Logo de la CES
Appartenir à la CES, organisme par ailleurs soutenu officiellement par l'"Association européenne de libre-échange", c'est statutairement s'engager à défendre le point de vue "social" de la Commission européenne. Le syndicat devient, selon la terminologie de la Commission, un "partenaire social". Appartenir à la CES, c'est donc devenir ce qu'on appelait autrefois un syndicat "jaune".
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Voir aussi cette vidéo de l'UPR : Qu'est-ce que la CES ? ou pourquoi il est impossible de parler de l'Union européenne au sein de la CGT.