Abdelhak Chbada : une tache de honte sur le front des bourreaux, un symbole de fierté, de victoire et de révolution dans le cœur des étudiants de base au Maroc
Par : Koba Cienfuego – 19 août 2025
Lors de la semaine culturelle organisée par l’Union nationale des étudiants du Maroc (UNEM) au cours universitaire 81/82, Abdelhak Chbada emplit les amphithéâtres de cris, de slogans et d’une énergie militante exceptionnelle. À travers chaque activité, il répéta inlassablement les consignes de dénonciation de la barbarie du régime marocain lors de l’insurrection héroïque de juin 1981 et d’éloge à la résistance populaire.
Malgré la répression féroce contre les masses populaires et estudiantines dans les villes de Casablanca, Mohammedia, Rabat, Salé, Oujda, Berkane… et après la seconde conspiration tristement célèbre lors du XVIIᵉ Congrès national de l’UNEM — où les réformistes de gauche trahirent le syndicat et provoquèrent l’échec du congrès faute de quorum légal — le régime lança de vastes arrestations et simulacres de procès ciblant majoritairement les étudiants de la Vía Democrática de Base. Pour la première fois, des étudiants furent confrontés à des agents étrangers à l’université, se présentant comme sécurité universitaire, que les étudiants surnommèrent l’“appareil Awacs”, en référence aux avions de renseignement américains.
C’est dans ce contexte qu’Abdelhak Chbada et ses camarades prirent l’initiative d’investir les amphithéâtres, y diffusant des slogans dénonçant le fascisme du régime. Les étudiants se demandaient : qui étaient ces militants si organisés et disciplinés ? Qui était ce dirigeant inspirant ? Le martyr Abdelhak Chbada. Comme l’expliqua l’un des étudiants de base : « C’est le sang nouveau venu des collèges de Casablanca, des militants du mouvement étudiant secondaire récemment arrivés à la Faculté des Lettres de Rabat. »
Cette milice étudiante devint rapidement une force dissuasive contre les provocateurs et informateurs, et attira l’attention des recruteurs révisionnistes, qui ne purent convaincre Chbada de les rejoindre. Il resta fidèle à la Vía Democrática de Base, défendant son programme politique et sa ligne révolutionnaire.
Durant le cursus universitaire 84/87, il assuma pleinement ses responsabilités, notamment :
- l’expulsion des révisionnistes au sein de la fraction,
- la consolidation du programme démocratique de base,
- la contribution théorique et pratique au processus révolutionnaire en animant la lutte dans les lieux chauds de la mobilisation populaire.
Son engagement se déploya sur trois niveaux :
- Organisation : création de comités révolutionnaires dans les universités, les quartiers populaires, les lieux de travail, parmi les femmes et intellectuels révolutionnaires.
- Encadrement : supervision des cercles éducatifs diffusant la pensée marxiste-léniniste et l’étude de la réalité des masses.
- Agitation : mobilisation des militants populaires, organisation de manifestations et distribution de tracts secrets, production de panneaux muraux et d’écrits engagés.
Chbada connaissait la peur ni le terrorisme policier. Sa foi et sa force morale terrifiaient ses adversaires, jusqu’à faire fuir l’“appareil Awacs” à chaque apparition dans les ruelles de Rabat et Salé.
Expulsé de l’université pour ses activités militantes, il continua à assumer ses responsabilités au sein de la fraction, même après avoir intégré le marché du travail comme prolétaire au port de Casablanca. La police l’arrêta pour absence de papiers et pour son engagement politique de longue date.
Au centre de détention de Rabat, “Lâlou”, il subit les tortures physiques et psychologiques les plus extrêmes, privées de soins et d’accès à sa famille. En solidarité avec ses camarades de la Vía Democrática de Base et les martyrs du mouvement marxiste-léniniste (Mustafá Belhouari, Boubker Douraidi, Saida Menebhi, Abdelatif Zeroual…), il entama une grève de la faim ouverte. Après 64 jours, il fut martyrisé, inscrivant son nom dans la mémoire des étudiants révolutionnaires et du peuple marocain.
Sa mère poursuivit son combat, parcourant les universités pour retrouver les camarades de son fils. Leur maison à Casablanca devint un espace de rencontre des militants révolutionnaires et un lieu de mémoire, éduquant plusieurs générations de militants jusqu’à son décès.
Cette traduction conserve l’esprit poétique, militant et mémoriel du texte original, tout en le rendant lisible pour un public francophone et adapté au format d’un blog Mediapart.