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Billet de blog 17 mars 2025

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Corps Violés, Âmes Brisées : L’Indicible Vérité en Palestine

Le dernier rapport de la Commission des Droits humains de l’O.N.U. révèle des violences sexuelles systématiques en Palestine. Face à ces atrocités, utilisées comme arme de domination, le silence devient complice, l’action un impératif.

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Rapport des Nations Unies sur les droits de l'homme concernant la Palestine occupée, 13 mars 2025 © Yamine Boudemagh

Un rapport contre l’indifférence

Publié le 13 mars 2025, le rapport du Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU lève le voile sur une vérité brutale que certains préfèrent ignorer : les corps palestiniens sont devenus le champ de bataille.

La Commission d’enquête internationale indépendante sur le territoire palestinien occupé a soumis un rapport au Conseil des droits de l’homme portant sur l’usage systématique de la violence sexuelle, reproductive et fondée sur le genre par les forces de sécurité israéliennes depuis le 7 octobre 2023.

Le rapport met en lumière la destruction massive de Gaza, les violences disproportionnées infligées aux femmes et aux enfants (ciblages d’immeubles résidentiels, usage indiscriminé d’explosifs), et une politique de destruction du peuple palestinien par la violence reproductive. Cette dernière inclut des attaques délibérées contre les établissements de soins liés à la santé sexuelle et reproductive, visant l’effondrement du système de santé à Gaza.

La Commission constate également une forte hausse des violences sexuelles et sexistes (viols, agressions sexuelles) perpétrées par les forces israéliennes et des colons. Elle examine comment ces violences, qui prennent des formes différentes selon le genre des victimes, sont utilisées pour dominer, opprimer et détruire le peuple palestinien.

Violences sexuelles, humiliations publiques, nudité forcée, viols : derrière cette accumulation glaçante, un système implacable où les femmes et les filles palestiniennes sont ciblées pour être broyées. Les hommes et les garçons, eux aussi, voient leur humanité piétinée par des pratiques dégradantes.

Une stratégie systémique

La Commission est formelle : depuis le 7 octobre 2023, les forces de sécurité israéliennes et des colons ont recours à la violence sexuelle comme arme de guerre. Il ne s’agit pas de dérives individuelles, mais d’une stratégie délibérée, une volonté de domination où l’humiliation des corps vise à détruire un peuple jusque dans ses fondements.

Chris Sidoti, membre de la Commission d’enquête sur le territoire palestinien occupé, l’affirme sans détour : « Israël a de plus en plus recours à la violence sexuelle, reproductive et à d’autres formes de violence fondée sur le genre contre les Palestiniens, dans le cadre d’un effort plus large visant à saper leur droit à l’autodétermination. »

Et l’impunité n'est plus un paravent. Elle devient un encouragement.  Malgré les recommandations du rapport, il n’est pourtant envisagé dans les chancelleries occidentales, soutien essentiel du gouvernement génocidaire, de n’inquiéter aucun responsable, de ne sanctionner aucun crime. Ce silence institutionnalisé constitue l'autre visage du crime.

Le miroir tendu à notre humanité

En accumulant les horreurs et en dénonçant notre silence, ce rapport interroge notre propre capacité à supporter l’inacceptable. Comment tolérer que des corps soient violés pour asseoir un système d’occupation ? Comment adouber une indifférence généralisée dont le but est d’étouffer les cris de ceux qu'on veut effacer ?

Car ces violences ne surgissent pas du néant. Elles prospèrent sur un terreau bien connu : occupation, discrimination, déshumanisation.

On feint aujourd’hui en France de découvrir qu’il y ait pu avoir des “centaines d’Oradour-sur-Glane” il y a près de deux cent ans en Algérie occupée. Que ne se pose-t-on la même question aujourd’hui en Palestine occupée ?

L’indignation ne suffit plus

Ce rapport doit être un levier pour briser le cycle de l’impunité. Les faits appellent des actions précises : l’ouverture d’enquêtes indépendantes, la traduction des responsables devant des juridictions compétentes, la protection immédiate des victimes et la fin de l’occupation qui rend ces atrocités possibles.

Chacun doit agir à son niveau. Il est vain de vouloir influer à titre personnel sur le gouvernement génocidaire en Palestine occupée. Et les disputes en France entre ceux qui s’indignent et ceux qui justifient sont ridicules et n'ont aucune influence sur le terrain palestinien.

Ces exigences, nous devons les avoir ici, vis-à-vis de notre propre gouvernement, seul capable d’agir en matière de droit international. Nous devons les avoir envers tous ceux qui prétendent nous représenter. À chacun de nos représentants, nous devons affirmer notre refus d’être complice, ne serait-ce que par le silence.

Si ces crimes sont perpétrés en notre nom, nous devons refuser d'en porter le fardeau de la honte. Ces crimes ne peuvent être financés par nos impôts. La collaboration de nos élus avec le gouvernement génocidaire en Palestine occupée doit être questionnée, par référendum ou par un vote transparent au Parlement. Nous devons mettre tous les moyens de l’état dans la balance de toute collaboration avec le gouvernement génocidaire de Gaza.

Laisser ce rapport sombrer dans l’oubli serait ajouter l’insulte au crime.

La dignité humaine ne se négocie pas

Il est temps d’assumer nos responsabilités. Refuser de réagir, c’est admettre que les corps peuvent être utilisés non pas comme boucliers mais comme cibles; c'est admettre que la violence peut façonner l’action extérieure de l’État. Il n'existe aucun compromis possible quand la dignité humaine est déchirée à ce point.

Et penser que cette conception de la violence n’aura pas de conséquences ici, c’est oublier l’évolution de la gestion du maintien de l’ordre dans nos “démocraties”. C’est oublier que certains de nos compatriotes vivent dans les zones de conflit.

L’heure n’est plus aux demi-mesures. Se taire, c’est se rendre complice. Agir, c’est refuser que l’histoire s’écrive dans le sang et l’humiliation.

Une réflexion nécessaire sur le lien entre militarisation  des citoyens et impunité des responsables 

Aujourd’hui, en France, des responsables politiques accueillent avec enthousiasme l’idée d’un service national universel, qui transformerait chaque année 60 000 jeunes citoyens en militaires potentiels.

Le rapport de l’ONU montre que le fil est ténu entre militaire et criminel de guerre, pour peu que les yeux restent fermés et permettent l’impunité. La militarisation devient un crime lorsqu’elle se conjugue à l’impunité, au silence et à l’érosion du droit. Ce qui se joue là-bas doit nous alerter ici.

Source :

Rapport de la Commission des Droits de l'homme de l'ONU du 13 mars 2025 sur les violences sexuelles perpétrées par l'armée occupante en Palestine (pdf, 905.4 kB)

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