Génocide
Le plus simple, le plus commun est évidemment le génocide comme celui des Amérindiens dont le nombre est passé de 12 millions en 1500 à 237 000 en 1900.

Ethnocide
Moins meurtrier mais tout aussi efficace est l’ethnocide : Dénier à un peuple son identité nationale. Le constant déni de droit fait aux Palestiniens nous en fournit une parfaite illustration. Au début de leur expulsion de leurs propres territoires, lesPalestiniens étaient accueillis dans des pays frères qui, croyant bien faire, leur accordaient la nationalité du pays d’accueil sans se rendre compte qu’ils participaient ainsi à l’éradication de la notion même de citoyen palestinien de plein droit. De plus sournois ajouteront à cette éradication culturelle en évitant judicieusement le terme « palestinien »; on parle encore aujourd’hui dans les journaux de conflit « israélo-arabe». De plus vicieux iront jusqu’à nier l’existence historique du peuple palestinien malgré l’occurrence du terme dans de nombreux textes anciens y compris dans les textes religieux vénérés par ceux-là mêmes qui nient l’historicité du terme.
Pour expliquer la redoutable efficacité du génocide évoqué dans notre premier exemple, il faut préciser que les Amérindiens ont été aussi victime d’un ethnocide. Les colons américains ont éradiqué ainsi toute trace de la culture, de la langue et de la religion de ceux dont ils avaient volé la terre. On constate d’ailleurs les mêmes symptômes chez d’autres victimes de ces mêmes colons : les Afro-américains, dont aucun ne porte un nom d’origine africaine.
Nomacide
Plus subtil, encore moins meurtrier mais terriblement plus efficace est ce que l’on pourrait appeler le « nomacide », le meurtre par le nom. Il suffit de ne pas nommer un peuple pour qu’il cesse d’exister. En effet, les mots sont importants et le langage tue. La France nous en fournit l’un des exemples les plus parfaits et son Histoire pourrait être celle de l’art d’éradiquer les peuples. Que sont devenus tous ces peuples qui ont coexisté et fait ce pays ? Que sont devenus ces peuples de France non latins qui parlaient entre autres Angevin, Berrichon, Champenois, Franc-comtois, Gascon, Landais, Morvandiau, Normand, Ossalois, Poitevin, Saintongeais, Vivaro-alpin, Wallon,…? Des langues sans peuple côtoyant un peuple sans langue ! En dehors des peuples Basque et Corse voire Breton, dûment identifiés pour cause de terrorisme identitaire, ils ont tous disparus, tous « nomacidés », au profit du Français, cet être étrange, venu d’ailleurs, gréco-latinisé, et dont l’identité nationale reste aujourd’hui encore sujette à caution malgré de malheureuses tentatives politico-maladroites.
Un autre exemple, peut-être encore plus frappant, sera le sort réservé aux peuples d’Afrique du Nord; il est très difficile de parler des populations qui ont peuplé l’Afrique du Nord avant la colonisation française. Etonnant, non ?
Ces populations n’existeraient tout simplement pas. Certes, comme on ne pouvait nier leur existence physique, on les a alors adoubés du doux nom de « berbères ». Il faut bien évidemment comprendre « barbare », indigne de l’héritage gréco-romain qui fait l’Européen supérieur. Mais comme l’on est bien élevé dans les milieux orientalistes, alors on prononce le mot « barbare » avec une once d’accent pied-noir : « ber-bère ». Aujourd’hui, on dirait plutôt « bougnouls », « crouilles », « melons », « ratons », « frisés », entre autres… Et peut-être, dans deux mille ans, de fumeux orientalistes s’exprimeront sur la culture « bougnoule », la langue « crouille », la culture « melon », etc. Mais, en attendant, on trouve de très sérieuses études sur les « berbères », ce peuple mythique qui habite donc les territoires qui s’étendent du Maroc au Niger et de la Mauritanie à l’Egypte, peuple dont le seul point commun serait de parler une langue tout aussi « berbère » qui aurait toutes sortes d’origine pourvu qu’elle ne soit pas gréco-romaine.
Pourtant de plus érudits argumenteront que la civilisation nord-africaine a plus ajouté à la grandeur de l’Empire Romain que la prétendue civilisation gallo-romaine. Si l’on compte quelques empereurs romains algériens ou tunisiens, tels Septime Sevère, Macrinus et autres Emilien, on n’en compte aucun gaulois.

Ils ajouteraient certainement que, lors de son élaboration dogmatique,le Christianisme doit moins à la fille aînée de l’Eglise qu’à l’Afrique du Nord de Tertullien à Cyprien sans oublier le fameux Augustin d’Annaba ou le très érudit Arius, tous à l’origine de débats philosophico-religieux et d’écoles de pensée que peu de non-barbares pouvaient suivre à l’époque…
Autres peuples qui portent tous un nom pour peu qu’on le leur demande
D’autres encore attireraient l’attention sur la civilisation millénaire des Garamantes, des rapports étroits entre Rome et Cirta, la capitale numide ou bien de leurs voisins les Gétules, voire d’autres peuples qui portent tous un nom pour peu qu’on le leur demande. Pourtant les orientalistes continuent de parler de « berbères »…
A leur décharge, le rôle des idiots utiles sans lesquels il n’est pas de colonisation possible : les indigènes qui se revendiquent eux-mêmes « berbères ». Harkis culturels, ils se réclament d’une langue tout aussi « berbère » en espérant qu’un jour, un orientaliste, de préférence de race aryenne, leur apporte la bonne nouvelle : oui, malgré leur teint plus ou moins basané, ils seraient eux aussi issus de ce peuple mythique gréco-latinisé, et bien que Grecs et Romains soient des peuples du sud, ils seraient tous à l’origine blonds aux yeux bleus…
Car, là est l’objectif suprême de toute éradication, qu’elle soit génocide, ethnocide ou nomacide : Supprimer les peuples existants pour s’en inventer d’autres plus conformes à l’idée d’une race supérieure.