Les Anglais ont eu Margaret Thatcher, les Américains Hillary Clinton, les Allemands ont Angela Merkel, les Danois Helle Thorning-Schmidt, les Polonais Ewa Kopacz, les Bengalis Sheikh Hasina, les Brésiliens Dilma Rousseff, les Argentins Cristina Fernández de Kirchner, les Libérians Ellen Johnson-Sirleaf… Nous, en France, n’avons personne. Pourquoi ? Pourquoi les femmes politiques françaises ont l’air si tarte ?
Si l’on devait faire la liste des femmes politiques les plus pertinentes dans le monde, aucune femme politique française ne serait seulement nominée pour en faire partie. Pourtant, en France, nous rencontrons tous les jours des femmes d’exception, à l’école, à l’hôpital, au tribunal, au C.N.R.S., parfois à la maison tout simplement mais jamais en politique. Pourquoi ?
On peut et on doit ne pas être d’accord avec les idées de Madame Clinton mais chacun doit convenir et de son charisme et de sa pertinence lors de ses conférences. Quand elle parle, on l’entend et on l’écoute. A titre de comparaison, le verbatim de Nicolas Sarkozy lors de sa dernière conférence à Séoul laisse pantois devant tant de mièvrerie.
Il ne s’agit pas ici de comparer les femmes politiques françaises avec leurs pendants masculins, comparaison qui ne serait pas forcément à leur désavantage d’ailleurs. Dans le cas du dernier couple présidentiel français, Carla Sarkozy est une polyglotte accomplie quand son président de mari a de la peine à ânonner sa propre langue. Carla Sarkozy a réussi une carrière brillante dans le privé en se hissant au plus haut niveau mondial de la profession lorsque son mari, pourtant de droite, doit essentiellement ses rémunérations à de l’argent public. Et l’on pourrait continuer cette comparaison à profusion, elle donnerait toujours un avantage à l’élément féminin du couple Sarkozy. C’était d’ailleurs déjà le cas du père et c’est celui du fils, puisqu’ils ont tous deux fait d’excellents mariages sur le plan financier. Mais là n’est pas le propos.
Le seul intérêt de cette comparaison tient dans la perception de l’ex-couple présidentiel où les français collent pourtant plus facilement l’image de compétence au mari plutôt qu’à la femme. Quand bien même l’incompétence du mâle est patente.

La dernière élection présidentielle française ne comptait que 3 femmes parmi les dix candidats. Toutes ont souffert d’un déficit d’image en termes de compétences et ont fait l’objet de quolibets sexistes. Pourtant, parmi elles, se trouvaient deux femmes qui avaient réussi professionnellement avant de s’engager politiquement : Nathalie Artaud, agrégée d’économie et de gestion et Eva Joly, juge d’instruction.
Certes, la vie politique française, quel que soit le sexe de ses représentants, n’est pas empreinte du sceau de la compétence. Il suffit d’avoir été le témoin d’une audition à l’Assemblée Nationale pour mesurer l’abysse qui sépare la compétence de la société civile et l’incompétence de celles et ceux censés la représenter politiquement. On se souvient aussi d’Anne-Sophie Lapix apprenant à compter à Marine Le Pen. Pour cette raison, il est essentiel d’exiger de toute femme et homme politique d’avoir eu une vie professionnelle réelle en dehors de la politique.
La femme française a culturellement et historiquement un rôle plus effacé dans ce pays; c’est ce qui explique qu’elle soit si sensible à la prétendue soumission de la femme musulmane. Cette soumission imaginaire de l’Autre lui renvoie son propre rôle social, bloque tout argumentaire rationnel et lui fait attribuer, contre toute évidence, un caractère résigné et docile à la femme méditerranéenne, pourtant connue pour son exubérance.
Ce rôle public en retrait n’empêche certes pas la femme politique française d’être efficace mais il l’empêche d’imprimer la vie politique, de lui redonner le sens qu’elle a perdu. Or c’est surtout ce que l’on attend du renouvellement de la classe politique : une plus grande ouverture d’esprit, une plus grande compétence. En France, une femme politique n’est souvent qu’un homme politique en jupon, sa copie presque conforme. Il a fallu un Sarkozy pour voir apparaître une Morano, un Ayrault pour une Batho,...
Où sont les rôles modèles pour les générations futures ? Or ce sont ces modèles qui manquent surtout dans la vie politique française.
Une des raisons de ce décalage tient peut-être dans le fait que la femme politique française se base encore sur son pouvoir de séduction plutôt que sur sa propre compétence et sa connaissance des dossiers. La parodie de Ségolène Royal par Florence Foresti faisait mal car elle touchait juste.
Peut-on imaginer la carrière d’Angela Merkel en France ?