Comme dans la langue chinoise, le mot arabe est idéogramme. Il n’a rien de défini, n’est jamais figé, est toujours prêt à se transformer. Chaque mot en invite un autre, puis un deuxième et une famille se forme, selon un procédé précis et continu qui multiplie la syntaxe à l’infini. De cette évolution permanente d’idées naît une pensée qui se renouvèle sans cesse, préférant toujours l’analogie à l’analyse. Les dimensions se multiplient, des métaphores se créent et deviennent intuition, révélation puis vérité. La langue arabe s’exprime avec le cœur.
Souvent, la musique arabe appelle à la passion; elle invite à délaisser la raison stérile, laisse la pensée vagabonde errer et imagine une vérité au-delà. La musique arabe s’écoute avec le cœur.

Il en est ainsi lorsque l’on écoute Asala Nasri. Asala Nasri ne dit pas les choses, elle nous les révèle en errant autour de son sujet. Certes, sa beauté ajoute au charme. Mais c’est sa voix envoûtante qui éveille les émotions de l’auditeur et l’incite à la passion, la joie, la tristesse, la révolte même, aidée en cela par une musique extatique.
L’actualité a fixé de nouveaux projecteurs sur cette chanteuse syrienne; sa chanson « Si le trône pouvait parler » a été présentée comme une invitation au départ de Bachar al-Assad. De fait, la chanteuse syrienne fut adoubée « voix de la rébellion ». La verité est que même les partisans de Bachar al-Assad ne sont restés insensibles à l’une des plus belles voix du monde arabe.
Au delà de la Syrie, c'est bien evidemment une chanson qui interpelle tous les pouvoirs...