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Billet de blog 29 novembre 2015

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Des Prolos et des Réacs

Commentaire à chaud de l'émission "Des Paroles et des Actes" du 26 Novembre dernier. Bernard Cazeneuve était invité à répondre aux questions de prolétaires triés sur le volet. Puis Hubert Védrine et Jean-Pierre Raffarin essayaient en vain de ne pas paraître ridicules à coté d'un spécialiste autoproclamé d'un domaine de recherche académique qui n'existe pas.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

La France peut s’enorgueillir d’avoir un réseau d’experts sur tout le territoire. Il s’agit par exemple des chercheurs du Centre National de Recherche Scientifique (CNRS) ou encore de l’Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques (INSEE). Dans chaque grande ville de province, se trouvent une ou plusieurs universités. Dans chacune de ces universités,  se trouvent des chercheurs dans un nombre de domaines très variés. Ces experts reconnus sont rarement interrogés par les médias.

A leur place, nous subissons chaque jour les commentaires d'experts autoproclamés dans des domaines de recherche qui n’existent pas.

Illustration 1

 Pire, « Des Paroles et des Actes » est une émission où l’on pousse le ridicule à demander à des néophytes de questionner nos hommes politiques. C’est intellectuellement assez confortable pour ces spécialistes de la langue de bois. On obtient alors des dialogues où la réflexion laisse la place au traitement émotionnel de l’information ; C’est ce qui explique pourquoi ces émissions dégoulinent de mièvrerie.

La France a connu des ministres de l’intérieur exaltés. Bernard Cazeneuve est un ministre de l’Intérieur apaisé. C’est donc un bon ministre. Et il y avait beaucoup de questions effectivement à poser à Bernard Cazeneuve. Compte tenu de la situation actuelle, la question urgente aurait dû être celle-ci :

Qui contrôlent nos barbouzes ?

Aux Etats-Unis, on assiste régulièrement au questionnement des responsables des services secrets américains par les élus de la république. Ces entretiens sont diffusés à la télévision. En France, on ne voit pas ces contrôles démocratiques.

Pujadas présente Cazeneuve comme « l’homme en charge de notre sécurité ». On devrait s’arrêter là. Pourquoi est-ce le rôle du ministre de l’Intérieur de s’occuper de notre sécurité militaire ? Pourquoi n'est-ce pas le rôle du ministre de la Défense ?

Le Ministère de la Défense nous protège d’un ennemi extérieur.

Depuis Mazarin, le rôle du ministère de l’Intérieur consiste en matière de sécurité à surveiller ses propres citoyens.

Dans une démocratie idéale, la sécurité aurait deux volets : un volet sécuritaire certes mais aussi un volet du bien-vivre ensemble. Cela suppose des conditions où chacun sent qu’il est un citoyen essentiel de cette démocratie. Le terrorisme naît de l’absence de droits et de justice sociale. Pour atteindre cet idéal, il est nécessaire de bien répartir les rôles et de ne pas se tromper de cible.

  • La défense de notre pays devrait être la responsabilité du Ministère de la défense. Laissons la sécurité aux professionnels.
  • Le Ministre de l’Intérieur devrait avoir pour rôle unique d’organiser territorialement notre démocratie. En un mot, il devrait être en charge du bien-vivre ensemble, tant au niveau du citoyen que de celui des collectivités territoriales ; Il devrait s’assurer que chacun puisse être entendu, qu’il puisse obtenir ses droits et réaliser ses devoirs.
  • Enfin, la gestion des cultes devrait relever du Ministre de la Culture. Il n’y a aucune raison de considérer une religion comme une menace à la sécurité de notre pays. Au contraire, elles sont toujours un apport culturel.

Comme toujours, nous avons subi une logorrhée d’information qui ne nous informe pas. C'est d'ailleurs ce qui est fascinant dans la couverture médiatique des récents évènements. Nous avons eu un flux constant et permanent d’informations et pourtant si l’on pose les questions les plus élémentaires sur ces tragiques évènements, nous réalisons que nous ne savons rien :

  • Combien d’assassins au Bataclan ? Les témoins parlent de deux terroristes. La police nous en donne trois mais n’en a identifié que deux.
  • Pourquoi les assassins ont-ils pris des otages ? Quelles étaient leurs revendications ?
  • Pourquoi sont-ils restés 3 heures ? Qu’attendaient-ils ?

Il y en a d’autres aussi. Mais ce qui est fascinant, c’est l’amoncellement d’informations qui fabrique en fait de l’ignorance. Cette fois, ce sont les journalistes qu’il faut questionner. Et c’est aussi à eux de se questionner eux-mêmes. C’est la raison de la désaffection des médias traditionnels et le succès d’internet. Et c’est ce qui renforce la précarité du métier de journaliste.

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