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Billet de blog 2 février 2018

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LA SOCIETE DU SUJET DJIHADISTE. LE CORPS BOURGEOIS.

La violence radicale prêchent la lutte armée. Cette radicalité puise sa violence dans un ensemble convectif et hiérarchisé de groupes d'individus. Ils sont la matrice guerrière faite corps. Ce corps collectif abrite des agents sociaux provenant de milieux sociaux et économiques éparses, diversifiés et parfois dissidents. La bourgeoisie du djihad fait son apparition. Voici l'analyse d'un corps...

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LA SOCIETE DU SUJET DJIHADISTE

CATEGORIES PLONGEES DANS UN UNIVERSEL

ANALYSE D'UN CORPS ETRANGER...

I – LES BOURGEOISES ET LES BOURGEOIS DU DJIHAD. 

Les Bourgeoises et les Bourgeois du Djihad sont comme les déclassés moderne déçus issus de la post-modernité. Ils retrouvent dans cette lutte un semblant de justice évacuée par leur classe sociale...

Les Bourgeois du Djihad. Voilà une dénomination historique, rappelée à l'ordre du jour pour circonscrire ce phénomène de déclassement économique, social et culturel introduit dans un circuit de volontarisme individuel et collectif. Car la bourgeoisie en tant que groupe social appelant une partie de ses membres à l'intervention dans des mouvements sociaux ou politiques n'est pas un acte nouveau et isolé. Elle se glisse dans un schéma historique transversal ; il est lui-même un phénomène transhistorique, traversant des sociétés et des époques bien différentes.*

La Bourgeoisie faisant le jeu de l'économique et du politique est un groupe social relativement protégé de la paupérisation croissante des enjeux économiques de société.** Et c'est dans cette protection avertie outrageusement transgressée qu'il faudrait y percevoir un acte de démission des règles de son propre rang... par ses propres membres. En sortant des règles préétablies, les potentielles recrues de cette catégorie opèrent une jonction avec ce qu'elle détermine comme les souffre-douleurs de leur propre dogme ; une jonction avec les Damnés de la Terre (Frantz Fanon). Les opérations de ralliement du socle activiste de la lutte interviennent lorsque le délitement du tissu national parasite les idéaux révolutionnaires de justice et d'égalité. Les classés s'adressent aux déclassés dans un souci du soi national proposant une alliance de circonstance, entre les intellectuels et les classes paupérisés, entre les forces économiques vives et ce que l'on dénomme les " sans-grades ".

Les Bourgeois du Djihad ne souffrent pas de la marginalité économique et social au sens premier du terme. Appartenant à une catégorie économico-social relativement protégée,*** ils pénètrent celle de la catégorie religieuse par inquiétude collective. Un souci de la justice et de l'éthique, une problématique non résolue de la fraternité égalitaire et compassionnelle pleinement inscrite dans une vision de l'équitable et du justiciable. Une Histoire Française...****

Parmi les Bourgeois du Djihad, catégorie éparse bien que provenant de milieux socio-culturels assez élevés, les femmes ont un rôle bien différent des hommes. On pourra dire qu'elles assument un rôle qui leur sont assignées, un de ces rôles qui les prédestinent à des tâches spécifiques. Elles jouent une fonction délimitée et parfaitement périmétrée. Les ressorts qui atomisent l'avenir de ces jeunes femmes diffèrent de ceux des hommes. Circonscrire l'activité de ces femmes à des circonstances conjoncturelles liées à un facteur d'appel de leur conjoint, ou des hommes plus généralement, ne suffit pas à expliquer leur attraction. Car si cet volonté d'un ailleurs devient efficace et matérialisée par un départ concret, les raisons qui insufflent l'origine de leurs motivations se situent in vivo dans un territoire historique ( La France) au sein duquel le symbolique et le culturel se sont croisés dans une esthétique intellectuelle et spirituelle, matrices profondément ancrées de l'éducation. Une Education tournée vers la Libération et l'Emancipation de la Femme...*****

La France offre donc cette possibilité d'émergence de la Femme dans la sphère publique. Et si les récentes analysent convergent pour démontrer l'effet du féminisme sur la transformation mentale et idéologique des femmes, elles en appuient également la fortification de la montée de son extrême opposée (l'anti-féminisme) par l'invalidation de son existence (le féminisme). L'Histoire du Féminisme censée être une Histoire Emancipatrice devient dès lors perçue par les partantes en territoire de guerre comme une Histoire de l'Enfermement Stratégique des Femmes. Certaines en ont fait leur crédo, à la mesure de l'avancée de l'extrêmisation et de la radicalisation de l'idéologie féministe. Le féminisme et l'anti-féminisme poursuivent une trajectoire parallèle de radicalisation antinomique. Les deux doctrines idéologiques se répondent l'une l'autre. Les Femmes rejoindraient donc l'Etat Islamique par anti-féminisme occidental viscéral afin de faire contre-poids à une géographie de l'expansion idéologique déterminée, européen et américain.

Qu'est-ce que Le Féminisme ? D'où vient-il ? Quel est sa méthode et son procédé ? Quelle est sa visée ?

Si nous ne pouvons répondre à ces questions (principalement Monsieur Berouini... !), nous pouvons d'ores et déjà nous rabattre sur des cartes palpables provenant de réalités sociologiques. Mais ses réalités sociologiques ne disent pas grand chose en dehors du socle philosophique qui le sous-tend. Le Féminisme est un concept. Le Féminisme est une création conceptuelle. Le concept est le fruit de l'entendement, de la faculté critique et rationnelle bénéficiaire au collectif et dont l'individu en est tributaire. Savoir que le féminisme en tant que mouvement est issu d'une ontologie conceptuelle nous penche à accueillir le fruit de son mouvement à travers des catégories et des profils-types socio-économiques.

La Bourgeoisie culturelle et économique ainsi instruite et éduquée, formée et construite sur le plan intellectuel a élaboré le concept de Féminisme.****** Le Féminisme est donc une création conceptuelle bourgeoise. Le Féminisme penche à analyser la situation de la femme en société à partir d'une position située dans l'espace social. Le champ à partir duquel les féministes pensent le féminisme est celui de l'académie et d'une frange de la population formée au maniement de son outillage conceptuel.*******

Les Bourgeoises du Djihad incluent donc leur espace social d'origine comme espace de contestation et de revendication face à l'hégémonie de leurs propres discours, de leurs propres actes, de leurs propres actions, et en conséquence de leurs propres pouvoirs sur l'ensemble des catégories sociales, économiques et politiques. Jouant en quelque sorte en leur espace propre contre celui-ci, elles affichent, par l'insurrection de leur volonté et de leur incrustation au sein d'un nouveau territoire géographique, leur aptitude au déclenchement d'une guerre intellectuelle et symbolique ouverte... au cœur de leur monde social. Cela constitue les prémisses affichées d'un volontarisme individuel et collectif à la perpétuation d'une guerre réelle, entreprise à venir sur le territoire de l'Etat Islamique.

"Beaucoup de femmes pro-Daech viennent de la classe moyenne. Pour deux raisons qui tiennent de l’échec du féminisme. 1) Elles pensent que ce dernier a dévirilisé les hommes, qui ne sont plus des piliers sur lesquels se reposer. 2) On apprend toujours aux enfants que l’amour et le mariage pour la vie garantissent le bonheur. Cela aboutit à une forme de hiatus entre cette image idyllique basée sur la durée et une société toujours plus périssable et éphémère. Certaines femmes pallient ce hiatus en se rendant dans un pays où le mariage se fait à vie : l’Etat islamique ! Dans leur esprit, seul le djihadiste est garant de cette stabilité et met sa vie biologique en dessous de ses idées." Amélie Myriam Chelly.

Le mouvement des départs des bourgeoises djihadistes peut être dès lors interprété comme une transition entre le point d'origine et le point d'arrivée, annonçant ainsi par l'enclenchement d'un discours anti-classiste l'approche d'une guerre symbolique. Une guerre vers l'universalisable. Une guerre des mots, des pensées, des idées et des comportements prévenant dès lors la volonté affirmée d'une transaction de leurs propres discours en acte au cœur d'un territoire élancé dans une guerre réelle, le Territoire de l'Etat Islamique.********

Comment dès lors aborder la thématique de La Bourgeoise Djihadiste ?

Il faudrait en tous premier point se défaire des catégories classificatoires et prononcer sur un discours audible et intelligible l'amplitude d'une telle assignation à rôle sociale et économique. Car la Bourgeoise Djihadiste n'est pas une catégorie classifiable. Elle sort de son envers et se déploie dans une logique de contestation psycho-sociologique à l'encontre des manufactures de la pensée de son environnement primaire, la structure familiale. Elle pénètre un univers d'instabilité identitaire (celle des partantes issues de la deuxième génération des familles d'ascendance immigrée) sous la forme d'une lexicologie religieuse. Mais l'apparat religieux et l'accoutrement spirituel ne peuvent être qu'une escarcelle remontée cachant un conflit social habité et tâtonné par une logique la subjuguant, celle identitaire qui traverse une large couche de la population de français nouvelle branche. Quitter le prêt à penser social et économique pour habiter un lieu déconcerté et anxiogène relève d'une phénoménologie existentielle.*********

Dire que la bourgeoise djihadiste ne peut être une catégorie classifiable, c'est en outre avouer la symptomatologie d'un discours maintenant universalisable largement relayé à l'échelle planétaire (un certain type de discours féministe). Les femmes djihadistes ne proviennent pas de nulle part. Elles ne surgissent pas ex nihilo. Elles proviennent tout au contraire d'un lieu, d'un espace, d'un temps. Elles se métamorphosent sur les décombres d'un discours moralisateur, situé dans une période historique d'existence. Car si le mouvement féministe a produit une émancipation considérable, elle a en outre et par contre-coup produit une existence discursive intensive, les femmes djihadistes. Le féminisme contemporain a produit les femmes djihadistes. C'est en somme ce que relève les travaux de Farad Khosrokhavar et Fethi Benslama.********** Un discours en a alimenté un autre. Car les mouvements, aussi opposés soient-ils, sont avant tout des discours relayés et habités par des logiques et une forme propre, parfois (a)symétriques et incompatibles.

En épousant ce type de discours, les bourgeoises du djihad se positionnent contre un autre. En se rendant dans un territoire de guerre, elles se distancient au moins sur le plan psychologique et symbolique du territoire d'origine. Inscrustant de la sorte ce nouveau territoire des esprits par l'interposition d'un discours interface, leur volonté s'affiche moins dans une tentative explicite de faire guerre que d'une axiologie claire, celle de faire corps avec un contre-discours (opposé au discours féministe), dans un angle mort adoptant une contre-culture (contraire à la culture dominante) et puisant son élan de naturalité et de vitalité dans une contre-violence (face à la violence des frappes de guerre des armées occidentales au Moyen-Orient).***********

Les Bourgeoises du Djihad s'opposent donc fermement au féminisme occidental, tel que présenté et pratiqué par ses ferventes partisanes. En épousant une cause provenant d'un ailleurs géographique et historique, les bourgeoises du djihad accélèrent la procédure de démantèlement du féminisme et propulsent dans leur mouvement volontaire de participation à la construction d'un contre-discours l'échec avéré du féminisme. Un retour à un passé traditionnel, l'option devient bien plus que réformiste, elle en est légendaire...************ Car en affrontant de plein fouet un discours établi qui tend vers le progressisme, elles adoptent une construction narrative préexistant à l'époque de la modernité libérale concernant la femme.

Un passé historique refait surface dans l'élongation de leur discours... 

La bourgeoise djihadiste rêve de l'Homme Viril, comme toutes les autres en dépit de leur émancipation individuelle. La bourgeoise demeurent tout de même une femme traditionnelle, dotées d'un héritage catholique, pour certaines d'entre elles. La bourgeoise djihadiste reconquière l'Homme Viril dans et par le Mariage Traditionnel. La bourgeoise recrée les conditions effectives du passé... dans son projet d'insertion au sein de l'Etat Islamique...

Moins dans une posture de disqualification de toute tentative d'émancipation et de libération de la femme, elles optent conséquemment pour une des formes permissives et limitrophes d'un discours-frontière, jonglant entre l'acceptable et l'insondable, le pensable et l'impensable, l'interdit et le dangereux, celle de la négation d'une certaine forme et d'une certaine pratique de la modernité occidentale all inclusive. Celle d'une modalité de libération de la femme par l'entremise d'un certain type de discours ; le féminisme atrophiant selon elles le spectre possible de l'envergure et de la disposition masculine à agir nominalement en société.

Dès lors, elles situent leur position armée dans une posture centrale : une révolte considérée et perçue comme pure et purifiée de tout parasite venimeux entachant la disposition naturelle des rapports hommes-femmes. Elles s'en vont à la reconquête de la vertu, contre ce qu'elles postulent comme le vice, insularisée dans les quatre mythes dont fait si souvent référence les travaux de l'islamologue Rachid Benzine lors de ses interventions************* : 1) le mythe du Califat ; 2) le mythe de la Pureté ; 3) le mythe de l'Unité ; 4) le mythe d'un Nous exclusif, le Nous contre Eux. Un discours centrée sur l'imaginaire de la pureté et de l'unité... en collaboration avec l'Homme et son projet d'expansion territoriale.

Plus alors qu'une révolte pure, elles engagent notamment leur discours dans une forme de quintessence magnifiant une Révolution Philosophique. Loin de toute tentative d'explicitation argumentée, elles s'offrent le droit de contester un régime pratiquée de la femme par le combat en Territoire de Guerre. Non pas qu'elles désertent le champ philosophique, mais bien plutôt qu'elles pratiquent une philosophie de combat en soutenant de manière pratique et matérielle les djihadistes affiliés à l'Etat Islamique.*************

Elles partent également pour des raisons qui soit désarticulent, soit reproduisent le champ libre de la circulation de la sexualité telle que vécu en Occident. La chercheuse Amélie Myriam Chelly en a établie un panorama aussi large que possible dans ses écrits. Ainsi, elles affirment leur partance pour une destination non plus géographique mais bien historique et anthropologique. A la redécouverte d'une sexualité traditionnelle, en dehors des créations culturelles libertines... et du large éventail proposé par la circonspection de la situation sexuelle actuelle et contemporaine telle que vécu et pratiqué en Occident.

On l'aura compris. Il s'agira dès lors moins d'un discours réfléchie sur un a priori considéré encore comme non efficient (un anti-féminisme islamique), ou bien une réflexion sur une pensée et un discours non actée qui rendrait possible sa concrétisation immédiate, qu'une seule et véritable spontanéité discursive, une mise en pratique spontanée de leur volonté et de leur intuition.

Les Bourgeoises du Djihad sont à la reconquête d'un idéal perdu par les affres de la modernité. Elles portent en elles la vérité de la nature humaine, clament-elles, d'où le déclassement volontaire pour s'approcher encore plus près des déterminations biologiques féminines... La classe supérieure s'en est détachée par l'instruction et l'éducation, affirment-elles. La vérité se situe non pas dans un horizon élargie et une verticalité immanente mais dans les bas-fonds... d'une société qu'elles considèrent encore stable sur le plan des mœurs, des principes et des traditions. D'où une surprenante mais non moins paradoxale jonction avec le populaire, la populaire, ses règles et ses codes.

* Pour bien comprendre ce phénomène de la transfiguration de la bourgeoisie dans des luttes révolutionnaires : révolutionnaires maoïstes, extrême gauche internationale et islamisme radical, consulter les multiples analyses fournies d'Olivier Roy dans " Le Djihad et La Mort", Seuil, 2016.

** Frédéric Lordon, " La gauche ne peut pas mourir ", Le Monde Diplomatique, Septembre 2014.

*** Amélie Myriam Chelly, " Le prolongement pathologique de l'adolescent ", Article consultable sur le Blog de la chercheuse. Analyse des Islam Politiques Et des Radicalisations, AIPER.

**** Emmanuel Todd, " Après La Démocratie ", Editions Gallimard, 2008.

***** Amélie Myriam Chelly, " Le prolongement pathologique de l'adolescent ", cité ci-avant.

****** Consulter à cet effet les travaux de la sociologue Nacira Guenif Souilamas. Notamment " Des Beurettes "; " Les Féministes et Le Garçon Arabe ". Ou encore les travaux de Stella Magliani-Belkacem " Les féministes blanches et l'empire ". 

******* Idem.

******** Idem.

********* Consulter à cet effet les analyses de Amélie Myriam Chelly dans son rapport d'enquête sur les femmes djihadistes. 

********** Farad Khosrokhavar et Fethi Benslama, " Le Jihad des Femmes ",  Collection Seuil, 2017.

*********** Rachid Benzine, " Nour, pourquoi n'ai-je rien vu venir ? ", Editions du Seuil, 2016.

************ Amélie Myriam Chelly, " Le prolongement pathologique de l'adolescence ", cité ci-avant.

************* Rachid Benzine, " Nour, Pourquoi n'ai-je rien vu venir ? ", cité ci-avant.

************** Marc Trévidic, " Terroristes, les 7 piliers de la déraison ", Editions Lattès, 2013.

II - LES HOMMES ET LA PUISSANCE FAMILIALE PERE-FILS.... LE CAS DES NON BOURGEOIS DU DJIHAD.

Le moteur de l'engagement djihadiste revêt chez certains hommes un certain type d'idéal viril.* Il s'agit d'une reconquête largement délaissée d'une profanation qui a travaillé en force l'ensemble souterrain historico-anthropologique de la France. La perte de ceux que certains hommes perçoivent comme une entreprise de dévirilisation générale et dont la source proviendrait inéluctablement d'un discours transmuté en acte par le féminisme contemporain. La chercheuse Amélie Myriam Chelly s'est longuement penchée sur cette mise en situation. Moins l'effet d'une autorité hiérarchique inversée que celui d'un vase communicant entre une ancienne puissance détériorée, ou tout du moins, perçue comme telle (le père en est le représentant) et une nouvelle puissance affirmative en effervescence (le fils en serait le précepteur), les rapports de virilité dans l'engagement combattant se situent dans une phase de réinterprétation symbolique puisant son support dans une perception physique de la réalité familiale. L'idéal viril se positionne dans un noyau nucléaire au sein duquel puissance et impuissance se lient, se relient, s'annulent et se superposent dans une métaphysique pratique à vocation religieuse. Le physique, au sens premier, anatomique, biologique et physiologique se déploie manu militari dans une perspective directement métaphysique.

Certains radicalisés ont confié à la sociologue Amélie Myriam Chelly rechercher leur puissance dans l’impuissance de leurs parents. L’ambition est de mettre leurs parents dans une situation d’impuissance plus exacerbée que celle dans laquelle ils se sont retrouvés durant leur prime enfance. De même que leurs parents n’ont jamais compris leurs enfants, ils ne comprennent pas davantage les raisons du départ de leurs enfants vers la Syrie. Chez les hommes, ce discours est pris en tenaille dans une élongation biologique. Car chez les descendants d’un milieu familial immigré, autorité oblige, c’est Le Père qui fait La Loi. Mais en même temps, celui-ci a, dans les courbatures de leur profession, courbé l’échine, travaillant ainsi toute sa vie pour servir Les intérêts de L'Etat Français. Aux yeux de ses fils, il a fait figure de servitude volontaire. Plus faible physiquement, tradition oblige, le père continue à faire la loi chez lui, ce qui peut être perçu comme contre-naturel par ses fils. Certains hommes à mesure de leur évolution vont indirectement contester cet ordre des choses en faisant de leur arme lourde le prolongement de leur virilité pour signifier à leur père qu’ils ne se résolvent point à une servitude volontaire, silencieuse et punitive, à l'intérieur du foyer tout comme à l'extérieur du domaine familial.

* Amélie Myriam Chelly, " Trouver la puissance dans l'impuissance parentale ", Article consultable sur le blog, ameliemyriam.com. Analyse des Islam Politique Et des Radicalisations. AIPER.

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