Au lendemain de l’évacuation violente des réfugiés de la Halle Pajol par les Compagnies Républicaines de Sécurité, je me suis rendu, mardi 9 juin à 18h00, à l’appel à un rassemblement d’amitié avec celles et ceux que l’état français refuse de considérer comme étant d’ici alors que ceux-ci sont arrivés en France au péril de leur vie (ce qui n’est le cas d’aucun de ceux qui aujourd’hui les persécutent).
D’emblée, j’ai rapidement perçu que le rassemblement de la rue Pajol n’était pas ridicule. La foule, pas non plus immense, était toutefois compacte, déterminée et en colère après ce qui s’était passé la veille et les fameux « riverains » (mis en avant par le gouvernement et la mairie parisienne socialistes pour dénigrer les réfugiés) qui étaient à leurs balcons regardaient le rassemblement d’un bon œil, certains le filmant, même, avec leur téléphone portable.
Ce qui s’est passé mardi soir peut être résumé en deux temps. D’abord, un rassemblement que la gauche liée à la majorité municipale a vainement tenté d’encadrer avec des prises de paroles au terme desquelles elle pensait faire rentrer les militants et militantes chez eux. Cet aspect du rassemblement a duré moins d’une heure et, franchement, si le rassemblement s’était limité à cela, ç’aurait été pathétique. En fait, après les prises de paroles, il a été demandé aux participants de se disperser mais en l’espace de quelques minutes, des militantes et militants du NPA, d’Ensemble et d’autres, nombreux, sans-parti se sont spontanément organisés en manifestation se dirigeant vers le boulevard de la Chapelle, au milieu des voitures et, une fois encore, sous le regard approbateur des riverains d’un 18ème arrondissement qui est à rebours de la France rance et raciste que nous décrit à longueurs de colonnes et de journaux radio-télévisés le médiatico-parlementarisme.
Cette manifestation était au sens propre extraordinaire puisque même si, ce sont les chiffres du Monde, elle ne comptait que 500 manifestants, ceux-ci étaient déterminés et cela changeait des kermesses moroses (para)syndicales qui ont déjà intégré la défaite. Beaucoup de colère (et de révolte, donc), des slogans criés à pleins poumons («Qu’elles soient de droite ou socialistes, abrogation de toutes les lois racistes ! », « Nous détruirons les centres de rétention, pierre par pierre et mur par mur ! ») et des voitures sur le boulevard perdues au milieu des manifestants.
Parmi les manifestants, beaucoup de jeunes gens, dont certains du PCF visiblement, mais peu d’officiels de la gauche (à la notable exception d’Eric Coquerel du PG, venu toutefois sans son écharpe républicaine, puis de quelques élu.e.s EELV) et, encore une fois, une révolte brute et non calculée qui desserre l’étau réactionnaire et morne dans lequel nous avons parfois l’impression d’être pris. Si l’on compare cette manif à celle de jeudi 10 contre la réforme du collège, on peut en mesurer l’énergie et la spontanéité prometteuses.
Il y avait donc, ce soir-là, une ambiance qui rappelait celle de Saint-Bernard il y a presque 20 ans et, d’ailleurs, un cordon de CRS bouclait les accès à ce lieu symbolique, histoire pour l’Etat PS, quand même, d’éviter d’avoir affaire à des images pour lui dramatiques, à savoir la superposition de deux violences étatico-policières contre des gens pauvres qui ne demandent qu’un logement et de quoi vivre décemment.
J’ai donc quitté la manifestation bien plus optimiste que je n’y étais arrivé. Le 18ème (mais je suis peut-être naïf) est un lieu de résistance par sa réalité multinationale et multiculturelle absolument moderne avec lequel le pouvoir et la mairie PS auront du fil à retordre.
Billet de blog 12 juin 2015
Compte-rendu du rassemblement puis de la manif rue Pajol, Mardi 9 juin 2015 au soir.
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