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Billet de blog 22 avril 2013

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Un revival inquiétant de la droite d'antan?

Je suis allé hier au rassemblement de la Bastille appelé au départ par Act up parce qu'il m'a semblé que la question du droit au mariage pour les couples homosexuels n'était hélas plus une formalité. Cette question, à mes yeux, ne devrait même pas se poser tant ce que chacun - sauf violences non consenties - fait de sa vie sexuelle et/ou amoureuse ne doit pas connaître d'entrave à quelque épanouissement.

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Je suis allé hier au rassemblement de la Bastille appelé au départ par Act up parce qu'il m'a semblé que la question du droit au mariage pour les couples homosexuels n'était hélas plus une formalité. Cette question, à mes yeux, ne devrait même pas se poser tant ce que chacun - sauf violences non consenties - fait de sa vie sexuelle et/ou amoureuse ne doit pas connaître d'entrave à quelque épanouissement.

L'erreur du gouvernement PS provient de ce que, contrairement à d'autres gouvernements européens, il n'est pas allé assez loin dans cette loi et a donc laissé au moins paraître une certaine faiblesse dans laquelle les réactionnaires de la pire espèce se sont engouffrés. Ce qui aurait dû être une formalité (votée, après tout, par des conservateurs anglais et/ou néo-zélandais) est devenu un objet de fixation et de clivage politiques faisant renaître, pour parler comme Carl Schmitt, une ligne politique fondamentale entre amis et ennemis.

Décidément, la politique est une chose fascinante puisqu'elle peut naître de rien. Plus exactement, sous nos yeux (horrifiés pour ce qui me concerne), ressort un clivage entre ceux qui sortent les drapeaux vendéens dans les beaux quartiers et ceux qui se retrouvent à Bastille pour défendre les opprimés bastonnés ici et là pour leurs orientations sexuelles. La droite, de l'UMP au FN (puisque l'UDI est pour le mariage gay), a donc réussi via la rue ce qu'elle ne pouvait assumer dans l'espace parlementaire : l'alliance de fait avec l'extrême droite. Il suffisait, si l'on peut dire, de trouver un angle d'attaque ; elle l'a trouvé avec le mariage gay, rappelant au passage à chacun d'entre nous que si la France a une grande tradition révolutionnaire, la réaction rance y reste puissante avec quelques saisissants prurits.

Comme le rappelait un orateur, hier, à la Bastille, les homophobes qui défilent avec Boutin, Barjot et Bourges sont tout autant islamophobes et homophobes que racistes et antisémites. Le problème, désormais, qui se pose est que ces gens-là, la France rance, sont sortis du bois et se comptent à longueur de manifestations haineuses (quand Virginie Tellenne alias Frigide Barjot dit qu'elle défile pour l'humanité, elle exclut les homos de ladite humanité - ce qui, évidemment, ne peut que faire froid dans le dos). Le rang de manifestants qui voit, côte à côte, Christine Boutin et Gilbert Collard ressuscite la droite qui avait été rayée de la carte par la Seconde guerre mondiale et le naufrage des ligues dans la Collaboration. Pour Boutin (et pour François !), c'est toujours mieux que la résurrection du Christ lui-même car il n'est pas certain que celui-ci approuvât, même tacitement, les coups portés à des homosexuels ces derniers jours.

Ce qui, donc, pouvait il y a encore quelques semaines passer pour une farce glauque semble désormais constitué. La droite décomplexée sarkozyste connaît son épisode de rue sur fond de crise et, les prochains jours et semaines nous le diront, il n'est pas à exclure qu'on assiste là à une réelle capacité politique subjective et constituée d'une droite renouant définitivement avec son passé pré-gaulliste, c'est à dire de l'époque des ligues.

Sans doute Copé compte-t-il du reste là-dessus pour, définitivement, prendre la tête de l'UMP contre un Fillon qui serait accusé d'avoir quelques remords à basculer vraiment dans une politique extrêmement droitisée, y compris sur la question des moeurs... C'est une politique évidemment dangereuse pour la droite car à ce jeu, ce seront forcément les pires figures qui émergeront (on a commencé à les voir avec un député accusant les partisans du mariage gay d'êtres des assassins d'enfants).

Une possible ultra-droitisation de la droite est donc à l'ordre du jour. Il semble, du reste, qu'en politique tout soit possible à partir du moment où une intelligence politique (individuelle ou collective) trouve une entrée. Ici, c'est le mariage gay. Cette entrée se déclinera comme cela a déjà commencé avec l'égérie versaillaise sévère et portant magnifiquement son nom : Béatrice Bourges. Le racisme va se libérer, l'islamophobie va continuer, de plus en plus violemment, à polluer l'espace public.

Cette situation, enfin, fait le jeu de beaucoup de gens et de beaucoup de partis au sein du capitalo-parlementarisme. Hollande, du reste, a une responsabilité dans cette situation. Sa loi est a minima et n'est pas dénuée de tartufferie puisque si le texte voté par la gauche autorise le mariage, il n'autorise à peu près que cela - reportant la question de la procréation médicalement assistée pour les lesbiennes aux calendes grecques. De plus, certaines figures dites morales de la gauche, comme Jospin et Agacinski, ont abondé dans le sens des opposants au mariage gay et ont ainsi donné l'image d'un projet peu soutenu même "à gauche". C'est qu'au fond, le PS lui-même peut apprécier la situation comme sous Mitterrand, il se frottait les mains de la puissance électorale du FN.

Ce calcul est risqué. Nous ne sommes plus dans les années 1980-1990 où l'épouvantail lepéniste faisait voter PS même en traînant des pieds. Le raisonnement, certes fallacieux, était "Mitterrand ou le FN" et nos démocrates apeurés votaient pour l'ex-vichyste... Le PS, donc, compterait sur ce revival de la droite dure pour, une fois de plus, se tirer d'affaire momentanément. Possible, d'ailleurs, qu'il garde Paris, ville de bobos libertaires, grâce à cette tactique.

Mais sur la durée, la situation risque d'être bien plus grave comme le montrent les mondanités vaticano-frontistes via les sourires échangés entre Mme Boutin et l'avocat Collard. Un certain nombre de digues ont sauté. L'islamophobie se porte comme un charme. La crise, violente, est là. La réaction - c'en est même fascinant tant c'est presque incroyable - renaît dans la rue...

Laissons donc le PS à ses calculs d'apprenti-sorcier. Il va falloir trouver de quoi faire face pour aujourd'hui. C'est à dire de façon nouvelle, radicalement inédite.

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