L'assassinat de Hervé Gourdel est un crime abject mais la récupération de ce crime par un Hollande qui frétille d'aise dès qu'il endosse la panoplie du va-t-en-guerre est assez glaçante.
Que le Président parle des Français qui ont voté à 25% pour le Front national aux dernières élections comme d'un peuple "épris de liberté" qui susciterait de ce fait la haine des jihadistes, voilà qui est à tout le moins extrêmement problématique. Il faut refuser l'unité nationale qui, si elle unit l'Etat, divise le peuple et donnera un vernis démocratique à la xénophobie islamophobe ambiante.
La période qui s'ouvre est potentiellement explosive et, dans l'ombre, les éternels islamophobes qui crient à la guerre civile parce qu'au fond, ils la souhaitent, se frottent les mains. Le discours de Hollande à propos de la mort épouvantable de Hervé Gourdel va dans le sens de ces apprentis-sorciers. N'oublions pas toutefois que les Algériens, musulmans ou pas, et que les Irakiens et les Syriens, musulmans ou pas, sont les premières victimes des bandits qui ont décapité Hervé Gourdel. N'oublions pas non plus le sort réservé aux Frères musulmans en Égypte par un pouvoir au moins tacitement approuvé par tous nos républicains laïcards...
Comme dans la plupart des guerres (les guerres justes existent mais elles sont rares), il faut garder la tête froide, ne pas être impressionnable et demeurer opiniâtrement un militant de la paix, y compris civile pour ce qui est d'ici - en France.
Hervé Gourdel est mort, tué par des gens qui ne sont pas plus barbares, sinon dans la mise en scène psychopathologique de leur exaction, que par exemple les soldats israéliens qui, pendant tout l'été 2014, ont bombardé le peuple sans défense de Gaza avec le soutien d'Obama et de Hollande. Pour ne parler que des crimes occidentaux les plus récents.
La barbarie de DAECH n'existe que parce que l'Occident dégoulinant de bons sentiments a détruit les équilibres politiques et l'État irakien. Saddam Hussein était certes un dictateur cruel mais l'Irak baassiste voyait vivre ensemble chiites, sunnites et chrétiens. Ce qui était valable pour Saddam Hussein vaut aussi pour Bachar Al Assad en Syrie aujourd'hui dont les adversaires jihadistes sont pires que la dictature qu'ils combattent.
La démocratie vaut mieux que la dictature mais il n'est pas sûr que le jihadisme soit préférable au baassisme...
S'agissant de la France, la passion criminelle islamophobe va trouver dans ces derniers événements une occasion de se relancer et il faudra être ferme contre cela. Si les crimes de DAECH frappent l'imagination, il faut avoir à l'esprit que l'Occident satisfait de lui-même et faisant sempiternellement la leçon au monde est à l'origine de bien plus de morts que les groupes de cinglés islamistes avec lesquels les musulmans et musulmanes du quotidien n'ont rien à voir !
DAECH comme Éric Zemmour par exemple ont en commun le désir glaçant d'une guerre "de civilisation" sanglante et fumante. Il faudra refuser de mettre le doigt dans cette logique et, pour ce qui concerne la France, de continuer à combattre avec véhémence l'islamophobie toujours croissante. La bande de la revue Causeur, par exemple, doit bénir les allumés de DAECH.
Défendre la paix ; s'opposer à la guerre. Dénoncer les pompiers pyromanes qui ont fait le lit des cinglés criminels sévissant aussi bien en Libye qu'en Syrie et en Irak. Être du côté des gens de partout et contre l'impérialisme aux conséquences toujours plus désastreuses.
Refuser les essentialisations islamophobes. Être debout contre notre impérialisme et nos propres incendiaires et/ou criminels.