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Billet de blog 28 novembre 2018

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HSBC-RAPHANEL : la France championne des Impôts de puis 3 ans en Europe

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Illustration 1

La France reste championne d'Europe des impôts

C'est un record qui n'étonnera pas les «gilets jaunes» qui protestent contre la lourdeur des impôts. Pour la troisième année consécutive, la France affiche le plus haut niveau de taxation en 2017, selon les données publiées par Eurostat mercredi. L'année dernière, les recettes fiscales (impôts, taxes et cotisations) ont pesé 48,4 % du PIB dans l'Hexagone, contre 47,3 % en Belgique et 46,5 % au Danemark, les deux autres pays sur le podium.

Première du classement depuis 2015, la France a vu le poids des prélèvements obligatoires augmenter de 0,7 point en 2017. Elle distance ainsi un peu plus encore la Belgique et s'affiche au cinquième rang des pays qui ont le plus alourdi la fiscalité l'année dernière, derrière Chypre, le Luxembourg, la Slovaquie et Malte. Autant de pays qui bénéficient, malgré cette hausse, d'une fiscalité très légère.

Illustration 2

Impôts, taxes et cotisations sociales ont augmenté dans quinze pays de l'Union européenne

Plus généralement, impôts, taxes et cotisations sociales ont augmenté dans quinze pays sur les 28 que compte l'Union européenne (UE). Ils ont baissé en revanche dans treize États, notamment en Hongrie, en Roumanie et en Estonie.

La moyenne de l'UE s'élève à 40,2 % du PIB en 2017, en hausse de 0,3 % par rapport à 2016. L'Irlande reste le pays à la fiscalité la plus avantageuse, avec un taux de prélèvement obligatoire de 23,5 %. Un niveau exceptionnellement faible au sein du Vieux Continent, plus de deux fois moins élevé que celui de la France.

Dans le détail, la France doit sa première place à l'importance des cotisations sociales (18,8 % du PIB, contre 13,3 % en moyenne dans l'UE). Quant aux impôts pesant sur les revenus des ménages et leur patrimoine, ils pèsent moins lourd en France qu'en moyenne dans l'UE.

D'après le gouvernement - qui n'applique pas la même méthodologie qu'Eurostat - le niveau des prélèvements obligatoires devrait légèrement baisser cette année et l'année prochaine, de 45,3 % en 2017 à 45 % en 2018, puis à 44,2 % en 2019. L'objectif d'Emmanuel Macron est de les baisser d'un point sur le quinquennat.

Cet article est publié dans l'édition du Figaro du 29/11/2018.

Impôts : les raisons de la colère

Pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron s'est confié à Philippe Besson. Quand l'écrivain lui a posé la question des sondages de popularité, celui qui n'était pas encore président de la République anticipait déjà qu'ils ne resteraient pas aussi élevés en sa faveur: «J'essaie de tout accueillir avec calme. Le problème, c'est qu'ils se retournent. La clé, c'est de savoir tenir dans les moments de retournement.»

Ce fameux moment, le chef de l'État l'a atteint. Sa cote de popularité a plongé depuis plusieurs mois. Il est la cible directe des «gilets jaunes», ces Français en colère contre les augmentations des taxes et impôts qui ont bloqué une partie du pays le samedi 17 novembre et en début de semaine. Pour le moment, Emmanuel Macron et son premier ministre Édouard Philippe tiennent bon.

«Si on cède, on fait comme les autres avant nous», explique Benjamin Griveaux, le porte-parole du gouvernement, en référence notamment aux pressions des «bonnets rouges» et à la décision de François Hollande de renoncer à l'écotaxe. Or, justement, Emmanuel Macron a été élu parce qu'il promettait, entre autres, de ne pas faire comme ses prédécesseurs. «Le pire signal serait de ne pas avoir une ligne droite, ajoute Benjamin Griveaux pour justifier que le gouvernement ne renonce pas aux augmentations des taxes sur les carburants. Ça voudrait dire qu'on ne croit pas à ce qu'on fait.»

73 % des Français soutenaient les «gilets jaunes»

Cette inflexibilité s'explique aussi par le chiffre avancé par le ministère de l'Intérieur sur la mobilisation des «gilets jaunes». Pourquoi le gouvernement céderait-il face à moins de 400.000 manifestants alors qu'il n'a pas renoncé en mars dernier à sa réforme de la SNCF quand 300.000 personnes étaient dans la rue à l'appel des syndicats? D'autant qu'au bout de deux jours, les points de blocage étaient quasiment tous éliminés. 

Au gouvernement, on balaye d'un revers de la main l'hypothèse du retour de la manifestation par procuration, à l'instar de ce qui s'était passé en 1995 quand les Français soutenaient massivement les grèves contre le plan Juppé. Selon l'institut Elabe, 73 % des Français ont soutenu la mobilisation des «gilets jaunes». Un chiffre relativisé par un ministre: «Evidemment, tout le monde soutient celui qui réclame une baisse des impôts!»

Au fond, au gouvernement, on n'est pas loin de reprendre ce propos, mis par Michel Audiard dans la bouche de Jean Gabin, «le Président» du film d'Henri Verneuil : «C'est une habitude bien française que de confier un mandat aux gens et de leur contester le droit d'en user.» Car un événement est passé inaperçu dimanche dernier: les résultats du premier tour de la législative partielle dans la première circonscription de l'Essonne

«Ça m'amuse de voir les tentatives de récupération par l'opposition. C'est le système qui est contesté, et ces gens-là sont l'incarnation absolue de ce que les Français rejettent»

Un membre du gouvernement

Dans le climat de contestation de la majorité, dans un département du bout de l'Ile-de-France, les électeurs avaient la possibilité d'envoyer un message clair. Près de 80 % d'entre eux ne se sont pas déplacés et ceux qui ont pris le chemin des urnes ont placé le candidat soutenu par La République en marche, Francis Chouat, en tête (30 %). S'il est toujours difficile de tirer des leçons d'une élection partielle, il ressort tout de même que les opposants à Emmanuel Macron n'ont pas, pour le moment, réussi leur pari. 

Le second tour opposera le candidat de la majorité à Farida Amrani, de La France insoumise. Mais il faudrait, faute d'union de la gauche, une addition des électeurs de Marine Le Pen (13,7 %) et de ceux de Jean-Luc Mélenchon (17,8 %) pour inverser l'ordre de dimanche dernier. C'est l'autre leçon qu'au gouvernement on tire de cette séquence: les oppositions ont bien du mal à récupérer politiquement le mouvement. «Ça m'amuse de voir les tentatives de récupération par l'opposition, rigole un membre du gouvernement. C'est le système qui est contesté, et ces gens-là sont l'incarnation absolue de ce que les Français rejettent.»

«Il faut tenir et maintenir la hausse des taxes», insiste un ministre qui se félicite qu'Édouard Philippe n'ait pas répondu favorablement à la demande du patron de la CFDT, Laurent Berger, de réunir «les syndicats, les organisations patronales, les associations pour construire un pacte social de la conversion écologique».«Ce n'est pas du tout le sujet! On ne va pas mettre autour de la table tous les gens qui ont planté le système!» Le gouvernement n'est pas prêt, même s'il apprécie Laurent Berger, à faire la courte échelle aux syndicats pour leur permettre de revenir dans le jeu. D'autant moins qu'en milieu de semaine, les barrages étaient de moins en moins nombreux et que la jonction avec les transporteurs routiers pour bloquer les routes et les raffineries n'était pas acquise.

Un livret jaune du pouvoir d'achat

Mais, au gouvernement, on se garde bien de tout triomphalisme. D'abord parce qu'incontrôlable, ce mouvement peut rebondir à tout moment. Une manifestation est prévue ce samedi à Paris. Ensuite parce que les ministres savent, malgré les dénégations officielles expliquant que c'est davantage le travail qui est mis en avant par le président, que la promesse d'augmentation du pouvoir d'achat a bien été faite. 

En septembre 2017, le ministre de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, claironnait sur RMC: «On va donner un treizième mois aux Français. C'est très concret et je pense que ce n'est jamais arrivé dans l'histoire de la République!» Sûr de son fait, il faisait publier par Bercy un petit livret jaune du pouvoir d'achat, recensant les huit mesures phares, de la suppression de la taxe d'habitation pour 80 % des Français à l'augmentation du minimum vieillesse en passant par la revalorisation du complément mode de garde.

Le gouvernement attendait d'ailleurs avec impatience la fin du mois de janvier, espérant que les salariés français verraient concrètement sur leur feuille de paye l'augmentation de leur pouvoir d'achat grâce à la baisse des cotisations sociales sur leur revenu. Seulement, le premier ministre, Édouard Philippe, a décidé, fin août, d'étaler cette baisse en deux temps. Fin janvier, les quelques euros gagnés sur la feuille de paye sont passés inaperçus face aux autres hausses.

«Je ne crois pas à la mesure spectaculaire qui éteint le feu. Face à l'irrationnel, on reste rationnel et on reste concret»

Benjamin Griveaux, porte-parole du gouvernement

Les espoirs du chef de l'État se sont reportés sur la fin de l'année. Avec la baisse de la taxe d'habitation puis la deuxième vague de baisse des cotisations sociales, cette fois les Français allaient se rendre compte de l'action positive du gouvernement sur leur pouvoir d'achat. Patatras! La hausse du prix des carburants a totalement anéanti toute possibilité de convaincre les Français dans ce domaine. Il faut dire qu'ils ont été échaudés par des années de discours politiques sur ce thème alors que, dans leur vie quotidienne, ils ressentaient l'inverse. 

Ainsi, François Hollande explique, dans une conférence de presse en mai 2013: «L'idéal serait de ne pas augmenter les prélèvements des ménages en 2014»! Alors qu'à l'Élysée, depuis 2012, il doit faire face au «ras-le-bol fiscal» des Français. Et qu'il a augmenté les prélèvements obligatoires de 125 milliards d'euros pendant son quinquennat, selon les calculs de Virginie Pradel, fiscaliste de l'Institut Vauban, à partir des données de l'Insee. D'après ces chiffres, «de 2002 à 2017, les prélèvements obligatoires ont augmenté de 369 milliards d'euros». De Chirac (+ 149 milliards) à Hollande (+ 125) en passant par Sarkozy (+ 95), tous ont contribué à cette hausse.

Hausse des taxes en janvier 

Pour essayer d'éteindre l'incendie qui couve, le gouvernement parie sur la pédagogie. «Je ne crois pas à la mesure spectaculaire qui éteint le feu, s'avance Benjamin Griveaux. Face à l'irrationnel, on reste rationnel et on reste concret.» Le porte-parole du gouvernement reconnaît sa part de responsabilité: «C'est de notre faute si des Français n'ont pas demandé à bénéficier des mesures qu'on a prises. Ça me rend dingue de voir que 560.000 personnes n'ont pas demandé le chèque énergie

Alors que le gouvernement a décidé de le passer à 200 euros, ce qui, selon les calculs du porte-parole, permettrait de compenser la hausse du prix des carburants pour un conducteur qui ferait 15.000 kilomètres par an. Mais voilà, il a beau multiplier les exemples, une grande majorité des Français restent sourds. Parce qu'ils ne le croient pas quand le gouvernement envisage, selon le rapport économique, social et financier de présentation du budget, une hausse du pouvoir d'achat en 2019 de 1,7 %, après 1,6 % en 2018.

À la demande de Bruno Retailleau, le groupe des sénateurs Républicains a «constaté une perte de pouvoir d'achat de 2,2 milliards d'euros en 2018-2019 pour 98 % des ménages et un gain pour 2 %». Toujours selon cette note, «les 2,2 milliards de perte de pouvoir d'achat sont concentrés sur les classes modestes et supérieures, soit 40 % des ménages. Les classes moyennes (60 % des ménages) seraient moins touchées, grâce notamment à la baisse de la taxe d'habitation, mais l'augmentation des taxes sur l'énergie accentue leur perte de pouvoir d'achat. Les classes fortunées (1 % des ménages) sont très gagnantes (6 % de gain de pouvoir d'achat).»

Le gouvernement aurait tort de croire, si le mouvement des «gilets jaunes» s'essouffle, qu'il en aura terminé avec la grogne fiscale des Français. Quand le premier ministre explique qu'il «garde le cap», cela signifie qu'il ne renonce pas aux prochaines augmentations des carburants. Au 1er janvier 2019, une nouvelle hausse interviendra (6,5 centimes pour le diesel et 2,9 pour l'essence). Si les prix du pétrole remontent, la question du pouvoir d'achat se reposera avec d'autant plus d'acuité qu'à la fin du mois de janvier le prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu sera opérationnel. À moins de cinq mois des élections européennes (mai 2019), premier scrutin national depuis l'arrivée d'Emmanuel Macron à l'Élysée…

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