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Le "catastrologue"
Ils se sont affrontés à fleuret moucheté, avec un tantinet d'agressivité, non pas sur des questions de fond, mais surtout quant il s'agissait de dire : "c'est moi le premier qui l'a dit" ou "s'il y a quelqu'un d'innocent ici c'est bien moi".
Sinon, leurs propositions en matière sociale et économique, grosso modo, visent à taper fort, à cogner, pour bien cadrer avec le discours néo-libéral qui a le vent en poupe depuis quelques années, grâce à des médias pour la plupart propriété du CAC 40 et donc au service de la cause. Ces prétendants sont persuadés, à force de lire les éditorialistes et les trolls sur les sites des médias, et aussi d'écouter les "journalistes" en service commandé, qu'il faut appliquer la "stratégie du choc".
La litanie a été la suivante, en vrac :
- privatiser Pôle Emploi
- supprimer les emplois aidés
- instaurer une dégressivité des indemnités de chômage
- supprimer les 35 heures, passer à 37, 39, 42 ou plus encore
- baisser les charges sociales et les supprimer pour le Smic
- mater les syndicats
- organiser des référendums d'entreprises pour contourner les syndicats
- augmenter l'âge de la retraite (course à l'échalote : Juppé 65 ans en 2026, Sarko 64 en 2025)
- supprimer l'ISF : les riches ne doivent pas fuir le pays
- augmenter la TVA (de 3 points) : de toute façon les pauvres ne partiront pas
- réduire les dépenses publiques de 100 milliards
- réduire les impôts sur les sociétés
- supprimer 300 à 500 000 fonctionnaires
- supprimer le statut de la fonction publique, même pour les enseignants (le réserver aux secteurs régaliens)
- aligner les retraites du public et du privé, sans annoncer la moindre négociation, par exemple sur les niveaux de salaires
- réduire ou supprimer l'Aide Médicale d'État
- accroître les inégalités en rehaussant le quotient familial (3000 € par enfant déduits pour ceux qui payent beaucoup d'impôts)
- palabrer sur le taux du déficit budgétaire (car si l'on veut baisser les impôts des plus riches, il faut peut-être envisager de creuser le déficit)
- défiscaliser les heures supplémentaires (mesure démago et coûteuse en emplois non créés et pesant 4 milliards d'euros dans le budget de l'État)
- augmenter le minimum vieillesse : seule mesure positive du catastrologue...
En somme, tout sourire, ils ont dit aux Français : "vous allez morfler". "Faites-nous confiance, toutes ces restrictions permettront à l'économie de redémarrer et un jour viendra où vos petits-enfants ou arrière-petits-enfants verront leur avenir s'éclaircir". Ils n'ont rien dit de l'environnement, de la qualité de la vie, et n'ont ouvert aucune perspective un tant soit peu républicaine, rien sur l'égalité, rien sur la fraternité, et la liberté, pour eux, ce n'est que celle du renard libre dans le poulailler libre.
[14 octobre]
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Juppé se mélange les pinceaux
Au cours du débat pour la primaire de Les Républicains sur TF1 hier soir, Alain Juppé a eu un peu de mal pour dire ce qu'il entendait par dégressivité des allocations chômage. Il a dit textuellement, en hésitant : "20 % à partir de l'année [sic], et 20 % à partir de 18 mois". Sauf qu'une semaine plus tôt, sur France 2, à L'Émission Politique, avec Pujadas et Salamé, il a dit : "moins 25 % au bout d'un an, 25 % au bout de 18 mois". On sent le flottement : des mesures à peine étudiées, on les lance pour marquer les esprits, sans se souvenir exactement de quoi il s'agit (derrière il y a pourtant la vie de millions d'êtres humains, tout de même).
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Du coup ses problèmes avec les milliards paraissent moins graves (quoi-que) : il fera, nous annonce-t-il, des économies de 80 à 85 millions d'euros sur le quinquennat. Lors de l'émission sur France 2 la semaine dernière, s'adressant à Jérôme Kerviel (que France 2 avait eu l'idée saugrenue d'inviter comme "expert"), Alain Juppé avait parlé des 2,2 millions de la Société Générale. Dans les deux cas il s'agissait, bien évidemment de milliards. Reconnaissons qu'il s'est corrigé de lui-même. Mais, en ce qui concerne les économies budgétaires, il n'a pas expliqué pourquoi, il y a quelques jours seulement, il parlait de 80 à 100 milliards.
[Afin que l'on ne puisse croire un instant que je vise particulièrement le vraisemblable prochain président de la France, je note en passant que Manuel Valls lors de l'émission Des Paroles et Des Actes, sur France 2, le 24 septembre 2015, face à François Fillon, invité comme contradicteur, a parlé d'une dette publique augmentée de "600 millions" de 2007 à 2012 (sous Sarkozy et Fillon). Bien sûr, ni Fillon qui n'y a pas intérêt, ni Pujadas qui n'est peut-être pas au courant, n'ont rectifié. Valls non plus. On n'est pas à 600 milliards près !]
Toutes mes excuses à ceux qui vont m'en vouloir d'avoir regarder ce "débat". J'essaye simplement de donner des biscuits à ceux qui ne disposent pas forcément d'une information précise dans les domaines que privilégie mon blog, à savoir les questions sociales.
[billet évidemment rédigé d'après mes notes et vérifications faites sur les vidéos en replay]
[14 octobre]
"Non au tout social"
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Lors du "débat primaire" de jeudi, Bruno Le Maire a prôné la suppression du "tout social". Pour l'expliquer, il est parti dans une déclaration alambiquée, incompréhensible, dans un fourre-tout où il disait qu'il fallait laisser place à la solidarité, qu'à l'hôpital des gens venaient pour se faire soigner alors que ce n'était pas justifié (laissant apparemment entendre qu'il y avait là des économies considérables à faire) puis il a enchaîné aussitôt sur l'Aide Médicale d'État qu'il faudrait supprimer. Il n'est pas certain que le téléspectateur aura compris que cette dépense qui ruine la France, si elle n'est pas totalement négligeable, ne représente cependant que 1/1000 du budget total sanitaire et social du pays. L'AME est destinée à prendre en charge des soins pour des malades étrangers en situation irrégulière, parce que la France, pour le moment, n'a pas encore sombré dans une dictature inhumaine, mais aussi pour préserver la santé des citoyens français. Mais voilà qu'il part dans un commentaire indigne, summum du mensonge et de la démagogie (se calquant sans dignité sur les commentaires les plus ignobles qui sévissent sur Internet) : "on rembourse des soins à des étrangers en situation irrégulière alors que des citoyens français, qui en ont besoin, ne peuvent pas se soigner" !
[15 octobre]
. Trois posts que j'ai publiés sur Facebook les 14 et 15 octobre.
. Rappel : mon billet du 12 octobre sur ce blog à propos de la déclaration non commentée d'Alain Juppé lors de L'Emission Politique sur France 2 n'excluant pas de baisser le RSA s'il le faut : Alain Juppé prêt "à baisser le RSA"
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Billet n° 284
Contact : yves.faucoup.mediapart@sfr.fr
Tweeter : @YvesFaucoup
[Le blog Social en question est consacré aux questions sociales et à leur traitement politique et médiatique. Voir présentation dans billet n°100. L’ensemble des billets est consultable en cliquant sur le nom du blog, en titre ou ici : Social en question. Par ailleurs, tous les articles sont recensés, avec sommaires, dans le billet n°200]