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Billet de blog 24 juin 2016

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Leïla, Megi, Fatma, Santiago, lycéens menacés d'expulsion

Quatre lycéens, scolarisés dans le Gers, sans papiers, sont menacés d'une obligation à quitter le territoire. L'Inspection académique va jusqu'à refuser d'inscrire deux d'entre eux pour l'an prochain. Ils ont le soutien des enseignants, de parents d'élèves, de leurs camarades lycéens, des militants des droits de l'homme, de RESF et d'Amnesty international. Une nouvelle pétition est lancée.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L'Inspection académique fait là le boulot du Préfet, alors qu'une circulaire du Ministre de l'Éducation nationale du 20 mars 2002 précise que tout élève de nationalité étrangère, ayant entamé leur scolarité doit pouvoir se réinscrire, quel que soit son âge et même en l'absence de titre de séjour.

Illustration 1
[Ph. compte Facebook RESF]

Chronologie :

. Une première pétition est lancée (mars) :

Une pétition sur Change.org est lancée en soutien à Leïla, jeune Burkinabé : appel à la Préfecture du Gers pour qu'elle la laisse étudier au lycée de Mirande.

Illustration 2
18 mai, devant commissariat et préfecture [Ph. YF]

. Soutien à Leïla (18 mai) :

Un rassemblement a eu lieu devant la Préfecture et le commissariat d'Auch (Gers), cet après-midi, pour soutenir Leïla, une jeune fille originaire du Burkina Faso, qui, en visite en France auprès de sa tante, n'a pu repartir en septembre dernier dans son pays suite aux événements qui s'y déroulaient (coup d'État). Elle a été scolarisée au lycée de Mirande, sous-préfecture du Gers. Aujourd'hui, elle est sous menace d'expulsion et est assignée à résidence avec pointage chaque mercredi à la gendarmerie.

Illustration 3
Prises de parole de responsables CGT, FSU, Sud, UNSA, FCPE, Ligue des Droits de l'Homme [Ph. YF]

Elle a le soutien de RESF, réseau éducation sans frontières, de ses enseignants, des syndicats et de plusieurs militants en faveur des libertés. Aujourd'hui, la Préfecture n'acceptait de recevoir Leïla que si elle était accompagnée d'une seule personne, alors que RESF demandait la présence de sa tante, d'une responsable RESF et d'un prof du lycée de Leïla.

Illustration 4
Leïla et Agnès Méric rendant compte de l'entretien avec une représentante du Préfet [Ph. YF]

Face à l'intransigeance bornée de la Préfecture, après une longue attente, les représentants des syndicats ont fait part publiquement de leur consternation devant tant de "mauvaise foi", puis Leïla, accompagnée d'Agnès Méric, militante de RESF, était reçue par la directrice des "libertés publiques". Pour s'entendre dire qu'il faudrait qu'elle reparte puis revienne après avoir fait une demande de visa dans son pays en bonne et due forme. Le préfet pourrait s'engager à autoriser son retour ! Sinon, le Préfet peut faire preuve de mansuétude, et décider pour des raisons humanitaires de régulariser son séjour, sachant qu'elle passe son bac en France en juin. Et que son père réside en France, et a la nationalité française. Et qu'elle a à peine plus de 18 ans.

Illustration 5
Cercle du silence, le 7 juin [Ph. YF]

. Cercle du silence (7 juin) :

A l'appel de RESF (Réseau Éducation Sans Frontière), une trentaine de personnes ont fait silence pendant une demi-heure sur la place de la Libération, devant la mairie d'Auch (Gers). Par cette action, non-violente par excellence, chacun voulait dire sa solidarité avec les migrants et les réfugiés et sa volonté que notre pays les accueille dignement.

Illustration 6
[Ph. YF]

D'autant plus que dans le Gers, des lycéens sans papiers sont menacés par une Obligation à Quitter le Territoire Français (OQTF) :  Leïla (lycée Alain Fournier de Mirande), Megi (lycée du Garros à Auch), Fatma (lycée Pardailhan à Auch) et Santiago (lycée Clément Ader à Samatan). Trois d'entre eux ont déjà reçu l'assignation à quitter le territoire. Certains d'entre eux et certains de leurs camarades étaient présents à ce Cercle du silence.

Illustration 7
Rassemblement du 10 juin [Ph. YF]

. Rassemblement lycéen (10 juin) :

Un rassemblent de lycéens a eu lieu en fin de matinée à Auch pour soutenir 4 des leurs, sans papiers, Leïla, Megi, Fatma et Santiago, menacés d'être reconduits à la frontière.

Illustration 8
Prises de parole par des participants au rassemblement [Ph. YF]

150 personnes étaient présentes. Trois lycéens ont été reçus en Préfecture. Ils sont ressortis déçus de n'avoir pas obtenu satisfaction, c'est-à-dire une régularisation de la situation en France de ces jeunes poursuivant des études. Tout au plus sont-ils autorisés à finir leur année scolaire ! D'autres manifestations auront lieu, les lycéens revendiquent d'être reçus désormais par le Préfet. Une déléguée d'Amnesty International a pris la parole, ainsi que des personnes dans l'assistance souhaitant exprimer leur solidarité. Les lycéens ont régulièrement scandé "Non à l'expulsion, oui à l'éducation".

. Le sabre et le goupillon (19 juin) :

Illustration 9
Dimanche 19 juin, sur le parvis de la cathédrale [Ph. YF]

Ce soir, un concert avait lieu à la cathédrale d'Auch afin de collecter des fonds pour la rénovation des magnifiques vitraux du maître verrier Arnaut de Moles. C'était l'occasion de manifester, sur la place de la République, pour la défense de 4 jeunes à peine majeurs, menacés pas la Préfecture d'être reconduits à la frontière. Plus de cent personnes (lycéens, professeurs, personnels des lycées, parents d'élèves, syndicats de l'éducation nationale, militants des droits de l'homme) avaient répondu à l'appel. Le public qui venait assister au concert découvrait, à la lecture des pancartes et calicots, les raisons de cette effervescence. Les services de la Préfecture paniquaient à l'idée que cela puisse dégénérer. A tort, car ils n'ont pas d'intention belliqueuse celles et ceux qui luttent en faveur de cette jeunesse, dont cette jeune fille ayant subi des événements très douloureux dans son pays et qui en deux ans a appris le français et termine l'année en étant la meilleure élève de sa classe.

Sauf que l'Inspection académique refuse de réinscrire certains d'entre eux pour l'an prochain. Pas de cris, pas de chahut, et pas de pénétration dans le lieu du culte.

Illustration 10
Rue du commissariat et de la préfecture barrée aux manifestants, le préfet entre dans la cathédrale par une porte dérobée [Ph. YF]

Tout au plus, lorsqu'un prêtre en soutane impeccable s'est glissé dans la file d'attente, il a fallu contenir un mécréant qui parlait, on ne sait trop pourquoi, de "la calotte" et de "la Sociale" ! L'archevêque est entré, lui, courageusement par devant, et le préfet par une porte presque dérobée, en tous cas latérale, tout près de sa préfecture, la police bloquant la rue. Là, il y a eu quelques sifflets et… applaudissements. Les deux hommes se sont rejoints à l'intérieur de la cathédrale. Sans doute occasion, dans ce lieu saint, pour le Préfet si bien entouré, de méditer sur la meilleure décision à prendre, surtout après avoir vu Un homme d'État, film qui sort en ce moment sur les écrans, tourné dans le Gers, y compris devant cette cathédrale, et qui met en scène un homme de bien redoutant que les gens au pouvoir frayent avec l'extrême droite.

[ces textes sont des reprises à peine modifiées de petites chroniques déjà diffusées sur mon compte Facebook]

. RESF lance une nouvelle pétition (24 juin):

Illustration 11
[Ph. YF]

Vous pouvez signer la pétition Laissez-les s'inscrire en faveur de ces lycéennes dont l'Éducation Nationale interdit la réinscription : http://www.change.org/p/laisser-les-s-inscrire

 … et écrire aux autorités : Ministère, Préfecture, Académie. Voir adresses et compléments d'information sur le site de RESF : http://resf.info/article54354.html

 . Voir texte de RESF de Besançon (d'abord paru, avec le dessin, sur le site de mon ami Daniel Bordür, directeur de Factuel Info, journal en ligne de Franche-Comté) : Ces élèves sont à l'école aujourd'hui, nous voulons les retrouver à la rentrée ! Une trentaine d'enfants et d'adolescents concernés : "Dans les écoles maternelles Granvelle, Helvétie, Kergomard, les Sapins, la Viotte, Pouilley les Vignes, dans les écoles élémentaires Bourgogne, Champagne , Granvelle, Jean-Macé, Saint-Claude, dans les collèges Camus, Clairs-Soleils, Diderot, Stendhal, Victor-Hugo, Voltaire, dans les lycées Condé, Tristan-Bernard, des jeunes vivent dans l’angoisse. Habitant souvent depuis plusieurs années à Besançon, ayant appris la langue française, suivant une scolarité régulière, ils risquent de vivre des situations inhumaines : assignations à résidence, arrestations, mises en rétention, retours dans un pays que leurs familles ont fui et où ne les attend qu’un avenir incertain."

Illustration 12

Billet n° 268

Contact : yves.faucoup.mediapart@sfr.fr

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  [Le blog Social en question est consacré aux questions sociales et à leur traitement politique et médiatique. Voir présentation dans billet n°100. L’ensemble des billets est consultable en cliquant sur le nom du blog, en titre ou ici : Social en question. Par ailleurs, tous les articles sont recensés, avec sommaires, dans le billet n°200]

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