Festival d'Avignon : le Off du Off

Ces papes se proclament "pas très catholiques" et viennent dirent à la foule qu'ils jouent L'émule du Pape de Michel Heim où les Borgia, dont Alexandre VI, sont mis en scène en alexandrins.

Si le "in" exit, le "off" continue : une véritable orgie avec 1336 spectacles ! Tout l'art est de se faire connaître quitte à enfourcher une multitude de stratagèmes : homme ou femme sandwich ; Edgar, qui raconte l'histoire d'un enfant de 10 ans annonçant à ses parents qu'il veut devenir danseur classique, se montre en personne dans la rue, en passant sa tête dans un trou de son affiche.

Dans un spectacle au magasin Théâtre, Yannick Bourdelle rend hommage à Robert Lamoureux : sous prétexte que ce dernier a joué la Chasse aux canards, on a droit dans l'avenue centrale d'Avignon à un canard juché sur une petite voiture téléguidée ! Ce qui compte avant tout c'est d'attirer l'attention, en étant si possible original.  

Nora Hamzawi fait la retape sur le trottoir. Momento, avec sa valise, appelle le public à venir le voir jouer Elastic. Les Filles du Nord, qui interprètent Le cirque des femmes, palabrent devant le théâtre du Verbe fou en tenue de scène.

C'est dans l'air du temps : les 63 pièces jouées dans le "in" avaient, selon Le Monde d'aujourd'hui (26 juillet), "comme un parfum d'apocalypse joyeuse", toutes les figures du Mal étant représentées, avec en tête 2666 et Les Damnés. Ajoutez à cela, une expo de photos d'Andres Serrano sur la "Torture".

Et bien, si j'en crois les affiches du "off", c'est pas triste non plus : La peur de Stefan Zweig, Le Mal court, Au bout du rouleau, Foutue guerre, Mémoires d'un fou, Dieu est mort…

Certains semblent s'interroger sur cette pléthore théâtrale : l'un prétend pouvoir "attirer les cons", tout en incitant les passants à venir nombreux. Un autre menace le distributeur de lui faire bouffer son tract. On a droit à cette question impertinente : "Sommes-nous encore en démocratie ?"

J'ai eu comme l'impression que Gérard Philippe à sa fenêtre et Molière, devant le Théâtre de la Ville, étaient perplexes.

© Yves Faucoup [photos et montages]

Billet n° 271

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