L’histoire ne se répète peut-être jamais, mais avouons que le tandem Trump-Poutine ressemble furieusement à la tragique paire Hitler-Staline de 1939, du moins dans ses prises de pouvoir par le mensonge et la démagogie, la haine des autres, le chantage, la prédation des ressources et de territoires. Ils dessinent une sorte de Pacte germano-russe pour se partager l’Europe, cet ancien monde dominant qui n’a plus que les oripeaux de « mère de la démocratie » et ne peut que constater sa perte d’influence avec l’émancipation de ses anciennes colonies. De nouvelles puissances militaires et économiques comme la Chine et l’Inde, comptent les points et se laissent aller à leurs propres poussées d’impérialisme. Paniqués, confrontés aux agents fascistes du tandem infernal, entendez toutes les extrêmes droites du continent, au pouvoir ou en voie de l’être, nos dirigeants nous parlent de « troisième guerre mondiale », de sacrifices à faire pour nous réarmer, de chasse aux étrangers, supposés éléments d’une cinquième colonne. Imbus de leur historique supériorité sur le monde, les dirigeants européens se retrouvent séchés, piégés par ce qu’ils croyaient être des histrions prétentieux, mais se révèlent finalement de dangereux prédateurs, maniant l’insulte et le missile comme ils respirent. Les ex-dominants de l’Europe blanche sont réduits à l’état de pions négligeables, à qui tout échappe, de la géostratégie à la guerre économique, de la prépotence des multimilliardaires à l’hégémonie des machines et des maîtres du numérique. Macron, qui revendique pouvoir parler tous les autocrates de la Terre, se révèle incapable de faire la paix avec qui que ce soit, de Trump à Poutine en passant par l’Algérien Tebboune.
Pourvu qu’ils ne confondent pas mallette nucléaire et mallette de jeux
Trump veut contenir Poutine dans les limites historiques de feu l’Union soviétique, pour se concentrer sur la montée en puissance d’un troisième satrape, le Chinois Xi, qui pousse ses pions impérialistes sur tous les continents avec une discrétion de soubrette. Entre ces trois-là, ce n’est pas de la franche camaraderie, plutôt des jeux d’intérêts et de pouvoirs, à qui s’approprie le plus de ressources prélevées sur des affidés ou simplement des dominés. Et ces petits hommes, madame, jonglent avec les têtes nucléaires. Sous leur protection, Musk salue ses troupes, bras tendu, les oligarques sans frontières font leurs affaires et pillent toujours plus nos communs. Sous les coups de boutoir des droites conservatrices et extrêmes, en concurrence ou alliées de circonstance, les digues fragiles de l’État-social cèdent, en France comme ailleurs en Europe. Les légions trumpistes jettent les minorités culturelles et de genre, les femmes, les réfugiés ‒ tout ce qui ne ressemble pas à un masculiniste blanc et friqué ‒ dans les douves de leurs forteresses idéologiques, à l’image de ce qui se fait déjà en Russie, en Chine, en Turquie, dans les théocraties, etc.
L’environnement part en fumée
L’autre grand perdant, c’est le monde vivant, dont nous faisons partie intégrante, l’état environnemental et sanitaire de la planète et de l’humanité. Nous sommes TOUS les perdants du grand désordre qui naît sous nos yeux. Là encore, les fragiles digues du multilatéralisme et des mesures collectives de sauvegarde de notre monde cèdent sous le dynamitage de Trump et de sa clique. Sa négation de la catastrophe climatique, sa volonté de bâillonner la communauté scientifique, son ultra-capitalisme prédateur et consommateur premium de pétrole, son retrait de toutes les instances internationales qui tentent de veiller sur l’humanité, sont des appels d’air (vicié) pour toutes les forces mauvaises du capitalisme et des impérialismes. Plusieurs majors du pétrole en ont déjà profité pour annoncer se défaire de leurs engagements (pour ce qu’ils valaient) de modération dans leurs émissions de gaz à effet de serre. Les normes environnementales et les objectifs de freiner les sources d’entropie de notre monde, sont toutes en recul, à l’image du détricotage du green deal européen ou des nouvelles lois agricoles et de « simplification » des normes environnementales pour les grands projets en France. Il ne fait aucun doute que les émissions de gaz à effet de serre et les pollutions vont repartir de plus belle au fur et à mesure de l’avancée des impérialistes de tout poil sur les terres à fouir pour en retirer la substantifique moelle minérale.
Trump réduit les relations humaines à de simples transactions en dollars, Poutine à de brutales injonctions idéologiques. La loi du plus fort règne en maîtres du monde. Les bruits de bottes claquent de plus en plus fort, les vents mauvais du bellicisme se lèvent un peu partout, les haines confinent les peuples derrière des barbelés, il est temps de nous replonger dans nos livres d’histoire du XXe siècle pour deviner ce que sera le XXIe.