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« Ma nature, mon futur, l’agriculture ! », clame la FNSEA sur son site internet pour motiver les jeunes, slogan qu’elle a également lancé à l’attention du peuple des fans du Tour de France cycliste. C’est vrai que le syndicat patronal aime la nature ‒ sauf les papillons, les abeilles, les plantes qui ne sont pas bancables, les haies qui rayent les carrosseries des tracteurs… ‒ et qu’il prépare un avenir radieux aux générations futures ‒ si elles ne crèvent pas trop tôt de cancers. Si la FNSEA met autant de pression sur le(s) gouvernement(s) pour la réintroduction de pesticides interdits, c’est que l’agriculture industrielle, qu’elle soutient ardemment, en pulvérise massivement partout où elle sévit (65 600 tonnes en 2023)1 et avec beaucoup de pertes à tous vents. À un point tel que les nuages qui survolent notre beau pays s’en trouvent généreusement ensemencés : entre 20 et 140 tonnes flottent chaque jour au dessus de nos têtes. C’est ce qu’à découvert une équipe de chercheurs du laboratoire de météorologie physique de l'université de Clermont-Ferrand, épaulés par des confrères italiens. Ils se sont installés au sommet du Puy de Dôme, à 1500 m d’altitude, pour y pomper et analyser l’air ambiant. Et il n’est pas forcément très respirable, surtout si on se retrouve la tête dans les nuages. « Nous avons mesuré la concentration de 32 pesticides dans l’eau des nuages », relèvent-ils, y compris des pesticides interdits en France « provenant en grande partie d'un transport régional à longue distance ».2
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En cause, des traitements effectués lors de conditions météo inappropriées, venteuses, mais aussi l’érosion éolienne qui soulève les poussières contaminées, alors que haies et bosquets, qui pourraient en retenir une partie, continuent de disparaître. Cette pollution de l’air s’ajoute à celle des eaux de surface et souterraines et, bien entendu, aux terres agricoles qui se meurent.
Nuages dopés aux pesticides et aux plastiques
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On ne contemple plus les nuages et leurs formes poétiques comme avant, sachant que herbicides, fongicides, insecticides, toute la panoplie du parfait sulfateur, s’y trouvent en un savoureux cocktail. La bouffée d’air aspirée, qu'elle soit en pleine campagne ou sur un sommet, est finalement à peine moins inquiétante qu’une goulée prise au bord du périphérique parisien. Avec les autres pollutions, chimiques, en particules… le cumul absorbé par nos poumons et ceux de nos enfants devient détonant. Enfants qui sont déjà aux premières loges lorsqu’ils sont riverains des zones fortement traitées comme les vignes, les vergers, selon, là encore, une étude récente de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et Santé publique France.3 D’autres chercheurs, toulousains ceux-là, avaient constaté en 2022 la présence de microplastiques dans ces mêmes nuages au sommet du Pic du Midi de Bigorre, à 2876 m d’altitude.4 La gravité faisant son travail, la pluie lessive ces dangereux polluants puis arrose, entre autres, nos jardins, les zones naturelles et les terres agricoles en bio. Un lessivage salissant, en quelque sorte.
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Le « transport régional longue distance » fait dire à des voix (innocentes) : « c’est pas moi, c’est les autres ! », estimant que ces pesticides interdits ont passé clandestinement la frontière, au même titre que les éléments radioactifs de Tchernobyl. D’ailleurs, la majorité des pollueurs atmosphériques comptent sur le vent pour « nettoyer » l’atmosphère locale, comme on ouvre la fenêtre après une flatulence odorante. Une mauvaise foi évidente lorsqu’on recense les affaires de trafic de pesticides 5 ou de contrebande avec l’Espagne, 6 plus coulante sur la longueur des produits chimiques autorisés. Un tabou dans les milieux agricoles qui absorbent ce commerce illégal avec appétit étant donné le coût des pesticides.7 Ce qui ne semble pas obérer les bénéfices de l’industrie agrochimique qui se porte bien, merci, et qui ne supporte pas le poids de l'éthique et de la morale puisqu’elle se permet de fabriquer les poisons interdits en Europe pour une exportation vers des contrées lointaines et moins sourcilleuses, parce que pauvres.8
Pendant ce temps, d’autres se démènent pour nous sortir de cette soupe chimique. Le troisième Appel de La Rochelle « pour la création d’une convention citoyenne pour une transition agricole » vient d’être lancé ce week-end par écologistes et associations environnementales, en présence de nombreux d’élus.9 Avec en arrière plan les 2,1 millions de signataires de la pétition contre la loi Duplomb. Encore faut-il que cet espoir ne soit pas douché par une pluie de pesticides.
Pour notre santé, arrêtons de respirer et sortons couverts !
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1. La France est championne d’Europe pour l’utilisation de pesticides. Malgré une légère baisse en tonnage en trompe-l’œil ‒ les molécules vendues sont plus concentrées ‒, la boulimie de chimie de l’agriculture industrielle essentiellement, reste à un niveau élevé. https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/etat-des-lieux-des-ventes-et-des-achats-de-produits-phytosanitaires-en-france-en-2023.
2. https://pubs.acs.org/doi/10.1021/acs.est.5c03787.
4. https://www.cnrs.fr/fr/presse/des-microplastiques-retrouves-dans-l-air-pur-des-pyrenees.