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Comment inventer une vérité alternative à un simple tableau festif, humoristique et inclusif ? Les évêques ont eu des vapeurs à la vision d’un Philippe Katerine, Bacchus d’opérette (les enfants auront sûrement reconnu un schtroumpf) allongé (presque) nu au milieu d’une réjouissante troupe de drag-queens. Au point d’avoir des troubles de la compréhension puisqu’ils ont confondu l’institution de l’eucharistie par Jésus-Christ avec une parodie des bacchanales grecques et romaines en l’honneur de Bacchus/Dionysos, un Festin des dieux (impies) de l’Olympe célébrant… l’olympisme. Pouvant difficilement croire à un manque de culture de ces professionnels de la Bible, il semble que les mitrés se soient jetés sur cette cible facile pour remobiliser leurs paroissiens, jusqu’à leurs ouailles de l’extrême droite, les ultra-cathos. Le pauvre Philippe Katerine, artiste iconoclaste qui refuse de se prendre au sérieux et tente de décoincer les plus fossilisés, a été crucifié sous des messages de haine et de rejet bien peu chrétiens le lendemain de ce « festin », selon le même timing que le Christ. « Cette cérémonie [d’ouverture des JO] a malheureusement inclus des scènes de dérision et de moquerie du christianisme, ce que nous déplorons très profondément », ont communiqué les prélats, 1 ajoutant : « nous pensons à tous les chrétiens de tous les continents qui ont été blessés par l’outrance et la provocation de certaines scènes. » Le très sympathique évêque de Nîmes, Nicolas Brouwet, a même demandé aux prêtres de son diocèse, d’organiser des « messes de réparation » à ce qu’il considère comme une offense.2 L’excommunication n’est pas loin à moins qu’il choisisse un châtiment plus corporel.
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Les évêques de France ont donc instrumentalisé un tableau de spectacle vivant pour inventer un pseudo-affront et jouer, sans vergogne et sans pudeur, les puritains. C’est vouloir faire oublier les dérives sexuelles d’un clergé très masculin et le rapport accablant de la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Église (Ciase)3 dénombrant au moins 216 000 victimes des ecclésiastiques, décrivant un phénomène « massif » et « systémique » et publié en octobre 2021. Il serait intéressant de savoir si la centaine d’élèves de Notre-Dame-de-Bétharram, 4 qui ont déjà porté plainte pour de tels abus et violences étalés sur une période de trente ans, ont été plus choqués par la polissonnerie de Philippe Katerine et Thomas Joly que par les exhibitions nocturnes des calotins censés leur inculquer les valeurs chrétiennes : « En 1957 est arrivé un jeune prêtre qui, la nuit, profitait qu'on soit endormis. Il était soutane ouverte, il venait sous les draps, masturber et faire une fellation. Comme on était terrorisés, on ne bougeait pas », témoigne Jean-Marie Delbos, 77 ans, élève de l’institution de 11 ans à ses 16 ans.5 Le clergé ‒sans oublier ses petites mains laïques et baladeuses ‒ déborde donc trop souvent du cadre liturgique pour donner des leçons de morale artistique et jouer les vierges effarouchées.
« Ce qu’il y a de beau dans la religion chrétienne, c’est le pardon. Donc je demande pardon si j’ai offensé. Les Chrétiens du monde me l’accorderont, j’en suis sûr », déclarait le lendemain Philippe Katerine sur CNN.6 Le pardon des évêques lui sera-t-il accordé ? Il risque d’attendre aussi longtemps que les victimes violées ou abusées sous les crucifix ont attendu une reconnaissance de leurs souffrances. Tout au long de ces décennies de silence, le pardon était, semble-t-il, plus facilement accordé aux agresseurs qu’aux victimes par des prélats miséricordieux. Soutane ou culotte courte, la honte doit changer de costume.
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3. https://www.ciase.fr/rapport-final/.
4. L’institution Notre-Dame-de-Betharram se situe près de Pau dans les Pyrénées-Atlantique. https://www.francebleu.fr/infos/faits-divers-justice/affaire-notre-dame-de-betharram-de-nouvelles-victimes-temoignent-plus-de-cent-plaintes-desormais-deposees-7794992.