Opinion
Netanyahou pousse le cabinet de sécurité israélien
à adopter son ordre d'annihilation
Gideon Levy, Haaretz, mercredi 6 août 2025

Une jeune Palestinienne réagit aux destructions
après une frappe nocturne sur le centre de santé Sheikh Radwan,
au nord de la ville de Gaza, le 6 août 2025.
Crédit : AFP/OMAR AL-QATTAA
Pour la première fois dans l'histoire d'Israël, le cabinet de sécurité doit prendre une décision d'anéantissement jeudi. Le projet du Premier ministre Benjamin Netanyahou d'occuper la bande de Gaza, que personne au sein du cabinet de sécurité ne contestera, signifie confirmer le massacre de milliers de personnes, détruire les conditions de vie de plus de deux millions de morts-vivants et procéder à la destruction définitive d'une bande de terre animée et surpeuplée où des gens vivaient autrefois, mais ne le feront plus.
Si ce plan est pleinement mis en œuvre, jeudi restera dans les mémoires comme le jour où l'ordre d'extermination a été donné. On pourra peut-être encore apprendre ce jour en cours d'histoire, comme on apprend d'autres dates où le sort d'un peuple s'est joué. Les noms des décideurs seront dans l'opprobre.
Cette fois, les derniers masques seront tombés. Personne ne prendra plus au sérieux les rumeurs de destruction du Hamas ou de libération des otages. L'ordre d'extermination qui sera donné jeudi sera une condamnation à mort, mais pas pour le Hamas. Les premières victimes seront la poignée d'otages vivants handful of living hostages. Et immédiatement après, le sort de tous les habitants impuissants de Gaza sera scellé.

Rom Braslavski, 21 ans, dans une vidéo diffusée la semaine dernière
par le groupe terroriste qui l'a enlevé, le Jihad islamique palestinien.
S'il reste des membres du Hamas à Gaza, ils seront les derniers à souffrir. L'armée israélienne n'a plus eu d'affrontements militaires avec eux depuis longtemps.
Lorsque les chars de Tsahal sillonneront les ruines de la ville de Gaza et que les avions bombarderont les décombres de Rafah the rubble of Rafah, ceux qui souffriront seront les enfants, les personnes âgées, les femmes, les malades, les amputés et les personnes souffrant d'autres handicaps qui ont survécu jusqu'à présent. Ils n'auront aucun endroit où s'abriter des tirs aveugles d'artillerie et de drones.
Les combattants du Hamas, s'il en reste, resteront dans leurs repaires, que Tsahal n'a pas réussi à trouver en 22 mois. Il est peu probable qu'ils y parviennent maintenant. Mais qu'est-ce que cela change encore ?
Le Hamas a été vaincu militairement, mais s'est renforcé politiquement. Le prochain round ne changera rien à ce fait sans équivoque. Lorsque le poète Yehuda Amichai a écrit dans « Un chant pour la veille du sabbat » sur une guerre qui n'était jamais suffisante, je doute qu'il ait jamais imaginé à quel point elle ne serait jamais suffisante.
Les 60 000 personnes tuées à Gaza 60,000 people killed in Gaza n'étaient pas suffisantes, pas plus que les 20 000 enfants gazaouis ou le millier de bébés tués ou morts de faim.
Le millier de soldats environ tués n'étaient pas suffisants. Les souffrances des otages et de leurs familles n'étaient pas suffisantes. La destruction, la famine et le déplacement de centaines de milliers de personnes désespérées d’un endroit à un autre n’ont pas suffi.

Des troupes israéliennes se déploient avec leurs chars
près de la barrière frontalière avec la bande de Gaza,
le 1er août 2025.
(Photo de Jack GUEZ / AFP)Crédit : AFP/JACK GUEZ
Elles n'ont pas suffi à la guerre, et elles n'ont pas suffi à ses instigateurs – Netanyahou et ses partenaires, le chef d'état-major de Tsahal et ses officiers. La preuve en sera apportée jeudi au cabinet de sécurité.
L'ordre du jour de l'armée sera « Bougeons, bougeons, finissons-en ». Bougeons, bougeons, jusqu'à ce que Gaza cesse d'être un lieu où il soit possible de vivre, pour au moins une autre génération. Et c'est ainsi que le plan de nettoyage ethnique sera également mis en œuvre.
La décision de jeudi annoncera un transfert de population. Le cabinet de sécurité qui décidera de la réoccupation de Gaza décidera également de procéder à un nettoyage ethnique du territoire occupé.
Ce sera également la première décision de ce type dans l'histoire d'Israël. Contrairement au nettoyage ethnique qui a eu lieu lors de la précédente Nakba, en 1948 Nakba, in 1948, cette fois, il ne sera pas nécessaire de passer des années à fouiller les archives pour trouver un ordre explicite. Il sera publié jeudi, même indirectement.
Compte tenu des conditions de vie à Gaza, la décision de réoccuper la ville placera ses habitants devant un choix entre la mort et l'expulsion. C'est l'objectif visé par le gouvernement, avec le soutien de Washington et d'une partie importante des Israéliens.
Le cabinet de sécurité prendra la décision de l'approuver, et l'ensemble du cabinet suivra. Le courageux officier de Tsahal qui dénoncerait les crimes qui s'annoncent contre l'armée n'est pas encore né. Les médias applaudiront et étoufferont le prochain acte de ce spectacle d'horreur, comme ils l'ont fait pour les précédents.
La seule question qui reste sans réponse est : que fera le monde ? Continuera-t-il à condamner et à « reconnaître » la Palestine sans lever le petit doigt pour mettre fin à cette campagne d'anéantissement ? Seul le monde a le pouvoir de l'arrêter. En Israël, personne ne le fera. Et Netanyahou ? Il est peut-être encore nostalgique des jours heureux où son procès s'est déroulé dans la salle d'audience de la juge Rivka Friedman-Feldman.
Gideon Levy, Haaretz, mercredi 6 août 2025 https://www.haaretz.com/opinion/2025-08-06/ty-article-opinion/.premium/netanyahu-is-pushing-israels-security-cabinet-to-pass-his-annihilation-order/00000198-8090-d21c-a5bd-e7f404750000