Analyse
« Ils veulent me mettre en prison » :
La véritable cible de la coalition de Netanyahou
dans le scandale des fuites au sein de Tsahal
La fuite et la dissimulation orchestrées
par la procureure générale de Tsahal ont causé
d'immenses dégâts, mais l'indignation
des membres de l'organisation criminelle
connue sous le nom de coalition de Netanyahou
n'est qu'une mise en scène.
Leur véritable cible est la procureure générale.
Gidi Weitz, Haaretz, jeudi 6 novembre 2025
Agrandissement : Illustration 1
Israel's Attorney General Gali Baharav-Miara
attends a court hearing in November.
Credit: Yonatan Sindel/Flash90
La procureure générale israélienne Gali Baharav-Miara a compris depuis longtemps que la campagne de vengeance menée contre elle ne connaît aucune limite, que le Premier ministre Benjamin Netanyahu et ses sbires ne lui pardonneront pas d'avoir refusé de le sauver sans encombre de son procès pénal, ni d'avoir pris position contre la réforme judiciaire de son gouvernement.
Il y a plusieurs mois, la procureure générale a déclaré à un juriste chevronné qu'ils ne se contenteraient pas de la démettre de ses fonctions. Ils veulent la voir en prison.
La fuite amateur d'une vidéo par la procureure générale militaire, la générale de division Yifat Tomer-Yerushalmi, et en particulier la dissimulation destructrice qui a suivi, sont tombées comme des fruits mûrs entre les mains de l'organisation criminelle qui dirige l'État d'Israël.
Le ministre de la Justice Yariv Levin Justice Minister Yariv Levin, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir et leurs associés se sont empressés de se montrer profondément choqués. Ce fut un magnifique spectacle d'hypocrisie mettant en scène une bande dépourvue de toute retenue ou conscience, qui méprise la loi et la moralité et glorifie les contrevenants.
Au cours des derniers mois, le Premier ministre, le ministre de la Défense, le ministre des Affaires étrangères et d'autres personnalités se sont rendus en pèlerinage chez le rabbin Yoshiyahu Pinto Rabbi Yoshiyahu Pinto, qui a purgé une peine de prison pour corruption. Ses disciples avaient utilisé la machine à poison contre un haut responsable de la police, Efraim Bracha, jusqu'à ce que celui-ci mette fin à ses jours ended his own life.
Le gang a envoyé le député du Likoud Tally Gotliv, soupçonné d'infraction à la sécurité, siéger au comité le plus sensible de la Knesset serve on the most sensitive Knesset committee. Les membres du gang sont invités à des fêtes organisées par le criminel condamné Rafi Kedoshim Rafi Kedoshimf, ils côtoient les ministres May Golan et Eli Cohen et, bien sûr, ils idolâtrent le défendeur n° 1, le Premier ministre, qui a profité de son statut au fil des ans pour extorquer des avantages à des milliardaires qui voulaient s'associer à lui.
Maj. Gen. Yifat Tomer-Yerushalmi in 2023.
Credit: David Bachar
Pour ce gang, la procureure générale militaire Tomer-Yerushalmi était et reste secondaire, une étape intermédiaire vers la véritable cible : la procureure générale Gali Baharav-Miara Attorney General Gali Baharav-Miara. Le ministre de la Justice Levin cherche donc à la démettre de ses fonctions dans l'enquête sur l'affaire de la vidéo divulguée et à la transférer à un juge d'instruction qui partage les mêmes opinions que la coalition gouvernementale, dans l'espoir que cela suffira à condamner cette femme, ennemie du peuple.
L'architecte du coup d'État gouvernemental rêve de preuves, authentiques ou fausses, que Baharav-Miara était au courant du secret concernant la fuite et la dissimulation. Pour l'instant, aucune preuve de ce type n'a été trouvée – et même Tomer-Yerushalmi ne le prétend pas –, mais Levin ne se décourage pas pour autant.
Une telle voie – la piéger – a déjà été tracée par Moshe Saada, membre du Likoud à la Knesset, dont les réalisations douteuses en matière d'application de la loi peuvent être consultées dans le procès-verbal du procès contre l'avocat Ronel Fisher.
Dans une interview accordée cette semaine à la radio 103FM, Saada a expliqué que l'enquête devrait être confiée à « quelqu'un au sein de la fonction publique, quelqu'un du bureau de la procureure qui a déjà participé à des enquêtes et qui ne rend pas compte actuellement à la procureure générale. Cette personne viendrait et serait nommée pour mener l'enquête à sa place, et c'est elle qui déciderait qui serait interrogé sous caution », a déclaré Saada.
« Je suppose qu'il ou elle interrogera [Baharav-Miara] sous caution », a ajouté Saada. « Et bien sûr, cela a des implications, car à partir du moment où elle est interrogée sous caution, elle ne peut plus continuer à exercer ses fonctions. C'est aussi simple que cela. »
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu,
entouré de membres de la coalition,
observe le discours du président Donald Trump devant la Knesset,
le parlement israélien, à Jérusalem le mois dernier.
Crédit : Jalaa Marey, AP
Une fois que la procureure générale aura démissionné, il sera possible d'épargner à Netanyahu son procès pénal, de mettre sous clé l'affaire du Qatargate, d'enterrer les affaires mettant en cause des ministres du gouvernement et de convoquer une équipe spéciale chargée d'enquêter sur les exploits de Naftali Bennett et Jonathan Tadmor, procureur au procès de Netanyahu, ainsi que sur ceux de Shikma Bressler Shikma Bressler, leader de la contestation. La coalition gouvernementale, qui a déjà installé l'un des siens à la tête de la police secrète, serait alors libre de s'occuper des juges.
« L'objectif est clair », a récemment déclaré une personne occupant un poste clé dans la fonction publique, « évincer Baharav-Miara et Isaac Amit [le président de la Cour suprême] et prendre le contrôle total de la division des enquêtes ». De cette façon, personne ne pourrait empêcher ceux qui détiennent le pouvoir de piller les caisses publiques et de menacer leurs adversaires. Ils ont la Russie, la Turquie et la Hongrie dans leur ligne de mire.
Ce qui rend Levin, Saada & Co. fous, c'est l'absence d'indication que Baharav-Miara soit au bord de la rupture face à cette campagne démente, comme Israël n'en a jamais connu. La voiture de la procureure générale ne sera pas retrouvée abandonnée près de la plage, même si les ministres du cabinet la boycottent, la traitent comme si elle était invisible et salissent obsessionnellement sa réputation dans des interviews et des réunions du cabinet. Lors d'une récente conversation privée, Yariv Levin a déclaré que la personne qui la déteste le plus est l'actuel ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar Gideon Saar, qui l'a nommée procureure générale.
Le seul qui la salue en premier, qui entretient des relations de travail avec elle et qui prend soin de lui témoigner du respect est Netanyahu. Il a de la classe. Il sait qu'il y aura toujours quelqu'un pour faire le sale boulot à sa place.
Un gouvernement différent, sensé, aurait demandé à Baharav-Miara et Tomer-Yerushalmi de répondre à des questions incisives. Toutes deux portent une responsabilité conjointe dans ce qui semble être un échec juridique et moral inconcevable : une faiblesse totale dans le traitement des violations du droit international dans la guerre à Gaza.
Dans ce contexte essentiel, la voix de la procureure générale n'avait pas été entendue. Un pays qui n'enquête pas sur ses propres crimes invite des parties extérieures à fouiller dans ses affaires, à arrêter ses soldats de haut et de bas rang et à les traduire en justice. Mais le gouvernement Netanyahu-Levin-Ben-Gvir est la chose la plus éloignée de la raison que l'on puisse imaginer. Au contraire, il est l'incarnation d'une psychose nationale.
Gidi Weitz, Haaretz, jeudi 6 novembre 2025 (Traduction DeepL)