Opinion
Israël n'a pas sa place à l'Eurovision alors qu'il commet des atrocités à Gaza
Gideon Levy, Haaretz, mercredi 17 septembre 2025
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Des manifestants se rassemblent à Bâle pour protester
contre l'inclusion d'Israël à l'Eurovision, en mai.
Crédit : Fabrice Coffrini / AFP
Une nation qui commet un génocide ne peut continuer à chanter. Et un monde qui voit une nation commettre un génocide ne peut chanter avec elle. Il ne peut pas non plus accepter le fait que cette nation veuille continuer à chanter comme si de rien n'était.
Le fait qu'Israël puisse même imaginer participer à un concours de chant, avec ses paillettes et ses effets spéciaux, au plus fort du génocide dans la bande de Gaza, alors que ses soldats tuent et détruisent sans pitié, montre qu'il a perdu le nord. Il aurait dû comprendre de lui-même qu'il n'a pas sa place dans une célébration internationale en ce moment.
S'il avait baissé la tête de honte et s'était retiré du Concours Eurovision de la chanson, il aurait conservé bien plus d'honneur qu'en lançant des accusations d'antisémitisme au monde entier, comme si c'était le monde qui commettait des massacres à Gaza plutôt que les Forces de défense israéliennes.
L'Eurovision Eurovision est un concours de chanson destiné aux chaînes publiques européennes. Israël y participe, comme à d'autres événements européens dans les domaines de la science, du sport et de la culture, grâce au traitement spécial que lui réserve l'Europe. C'est une semaine de plaisir et de chansons, mais aussi de nationalisme, pour les fans du genre. Le concours est considéré comme apolitique, mais en 2022, l'Union européenne de radio-télévision a exclu la Russie en raison de son invasion de l'Ukraine.
L'exclusion de la Russie était considérée comme allant de soi. Personne ne s'est plaint d'une « haine des Russes ». Qui voudrait danser la danse cosaque aux côtés de jeunes dont les amis bombardent des maisons à Kiev ? La Russie est donc exclue de l'Eurovision, comme il se doit. Son exclusion était une décision morale, et non une manœuvre politique. Et Israël n'a pas protesté contre cette décision.
L'invasion israélienne de Gaza est bien plus cruelle et génocidaire que l'invasion russe de l'Ukraine, même si cette dernière était également cruelle et criminelle. Si l'on compare ces deux conflits, par exemple en termes de nombre d'enfants tués – un indicateur qui reflète la barbarie –, 659 enfants ont été tués en Ukraine au cours des trois ans et demi de guerre, tandis qu'à Gaza, plus de 18 000 enfants children ont été tués en environ deux ans.
Peut-on même se demander si un pays dont les soldats tuent autant d'enfants a le droit de participer à un festival international ? De quoi parlent les Israéliens lorsqu'ils évoquent l'antisémitisme dans ce contexte ? Seuls le philosémitisme et l'amour d'Israël ont permis au pays de rester dans la compétition cette année. Il n'aurait même pas dû y être.
Les Israéliens font semblant d'être offensés. Nos médias idiots leur disent que tout le monde nous déteste à cause des musulmans en Europe. C'est plus facile à avaler pour les Israéliens, mais c'est évidemment un mensonge éhonté. L'Europe nous déteste à cause des enfants qu'Israël a tués à Gaza, pas à cause des immigrants musulmans. Aucune personne de conscience dans le monde qui a vu les images des atrocités commises à Gaza ne peut s'empêcher de détester ceux qui les ont perpétrées.
Contrairement aux Israéliens, dont les médias les aveuglent en les protégeant de ces images, le monde voit et ne peut plus rester silencieux. Ce n'est pas seulement le droit du monde, mais son obligation. Il aurait peut-être pu se montrer indulgent envers les Russes parce qu'ils vivent dans une dictature, mais il n'y a pas de rabais pour les pays qui se prétendent démocratiques.
Le gouvernement israélien représente son peuple, et la guerre à Gaza est acceptable pour la plupart des Israéliens. Le fait est que la grande majorité des Israéliens y ont participé, que ce soit de bon gré ou par simple obéissance aveugle, et que la plupart des Israéliens ne se soucient pas vraiment du génocide, mais seulement de récupérer les otages. Sans les otages, il n'y aurait pas ici de manifestations telles que celles qui ont lieu actuellement.
Nous méritons une punition insupportable, d'autant plus depuis que la phase de folie totale a commencé dans la ville de Gaza. Il ne s'agit ni de haine envers Israël ni de masochisme, mais simplement d'un sentiment de justice. Avec ce sang sur les mains, Israël ne devrait même pas essayer d'être admis dans un club qui accepterait des criminels comme lui parmi ses membres. Et danser à la Stadthalle de Vienne en mai sur le sang de Gaza détruite et ethniquement nettoyée ? C'est une honte pour l'Europe que seuls cinq pays se soient jusqu'à présent opposés à la participation d'Israël. Il ne mérite pas d'être là.
Gideon Levy, Haaretz, mercredi 17 septembre 2025 (Traduction DeepL)