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Billet de blog 29 mai 2025

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« L'Allemagne doit changer, non pas malgré son passé, mais grâce à lui. » Gideon Levy

« L'Allemagne est aujourd'hui confrontée à son épreuve morale la plus difficile depuis la Shoah. » Après l’invasion de l’Ukraine « elle a pris la tête des sanctions contre la Russie ». Il est temps pour elle « d'exprimer sa solidarité avec la victime, de se libérer des chaînes du passé qui l'éloignent des leçons de la Shoah. » Gideon Levy. Un article crucial.

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Opinion
La culpabilité de l'Allemagne envers son passé
l'a maintenue bien trop longtemps silencieuse sur Gaza

Gideon Levy, Haaretz, jeudi 29 mai 2025

Illustration 1

Une personne tient une pancarte alors que des gens se rassemblent
pour une manifestation de solidarité avec Israël à Berlin,
en Allemagne, l'année dernière.
Credit: Annegret Hilse / Reuters

L'Allemagne a trahi la mémoire de l'Holocauste et ses leçons. Un pays qui considérait que sa plus haute mission était de ne pas oublier a oublié. Un pays qui s'était promis de ne jamais se taire est resté silencieux. Un pays qui a dit un jour « Plus jamais ça », et maintenant c'est: « encore ça », avec des armes, des financements, et le silence. Aucun pays ne devrait mieux que l'Allemagne savoir « discerner les processus nauséabonds ». Chaque Allemand en sait bien plus que Yair Golan. Ici, en Israël, ils sont en plein essor, et pourtant l'Allemagne ne les a pas encore reconnus pour ce qu'ils sont. Ce n'est que récemment qu'elle s'est réveillée, trop tard et avec trop peu d'effet.

Quand l'Allemagne voit la Marche des drapeaux à Jérusalem Flag March in Jerusalem, elle doit voir la Nuit de Cristal. Si elle ne voit pas les similitudes, elle trahit la mémoire de l'Holocauste. Quand elle regarde Gaza, elle doit voir les camps de concentration et les ghettos qu'elle a construits. Quand elle voit les Gazaouis affamés, elle doit voir les malheureux survivants des camps. Quand elle entend les discours fascistes des ministres israéliens et d'autres personnalités publiques sur les massacres et les transferts de population, sur l'absence d'« innocents » et sur le meurtre de bébés, elle doit entendre les voix glaçantes de son passé, qui ont tenu le même discours en allemand.

Elle n'a pas le droit de se taire. Elle doit porter le drapeau de la résistance européenne face à ce qui se passe dans la bande de Gaza. Pourtant, elle continue d'être à la traîne par rapport au reste de l'Europe, aussi inconfortable soit-elle, non seulement en raison de son passé, mais aussi en raison de sa responsabilité indirecte dans la Nakba indirect responsibility for the Nakba, qui n'aurait probablement pas eu lieu sans l'Holocauste. L'Allemagne a également une dette morale partielle envers le peuple palestinien.

L'occupation israélienne n'aurait pas eu lieu sans le soutien des États-Unis et de l'Allemagne. Durant toute cette période, l'Allemagne était considérée comme le deuxième meilleur ami d'Israël. Elle était inclusive et inconditionnelle It was inclusive and unconditional. Aujourd'hui, l'Allemagne paiera pour ses longues années d'autocensure sévère, durant lesquelles il lui était interdit de critiquer Israël, le sacrifice sacré.

Toute critique d'Israël était qualifiée d'antisémitisme labeled antisemitism. La juste lutte pour les droits des Palestiniens était criminalisée. Un pays où un grand empire médiatique exige encore de ses journalistes qu'ils s'engagent à ne jamais remettre en cause le droit d'Israël à exister, comme condition d'embauche, ne peut prétendre respecter la liberté d'expression. Et si les politiques actuelles d'Israël mettent en danger son existence, ne devraient-ils pas avoir le droit de le critiquer ?

En Allemagne, il est difficile, voire impossible, de critiquer Israël, quoi qu'il fasse. Ce n'est pas de l'amitié, c'est un asservissement au passé, et cela doit cesser face à ce qui se passe à Gaza what is happening in Gaza. La « relation privilégiée » ne peut inclure une reconnaissance des crimes de guerre. L'Allemagne n'a pas le droit d'ignorer la Cour pénale internationale, créée en réponse à ses crimes, en débattant du moment opportun pour inviter un Premier ministre israélien recherché pour crimes de guerre. Elle n'a pas le droit de répéter les clichés du passé et de déposer des fleurs à Yad Vashem, à 90 minutes de route de Khan Younis.

Illustration 2

Un manifestant pro-palestinien serre le poing
lors d'une manifestation devant le bâtiment
de l'Université Humboldt, au milieu du conflit en cours
entre Israël et le groupe islamiste palestinien Hamas,
à Berlin, en Allemagne, le 22 mai 2024.
Credit : Axel Schmidt/ REUTERS

L'Allemagne est aujourd'hui confrontée à son épreuve morale la plus difficile depuis la Shoah. Quelques semaines après l'invasion de l'Ukraine par Vladimir Poutine, c'est elle qui a pris la tête des sanctions contre la Russie. Vingt mois après l'invasion de Gaza, l'Allemagne n'a toujours pris aucune mesure contre Israël, se contentant de formuler un soutien de façade identique à celui des autres pays européens.

L'Allemagne doit changer, non pas malgré son passé, mais grâce à lui. Il ne suffit pas que le chancelier Friedrich Merz affirme qu'il n'est plus possible de justifier les bombardements de Gaza. Il doit prendre des mesures pour y mettre un terme He must take measures to help stop it. Il ne suffit pas que le ministre des Affaires étrangères Johann Wadephul affirme que l'Allemagne ne se laissera pas « mettre dans une situation où nous devons faire preuve d'une solidarité forcée ».

Il est temps pour l'Allemagne d'exprimer sa solidarité avec la victime, de se libérer des chaînes du passé qui l'éloignent des leçons de la Shoah. L'Allemagne ne peut continuer à rester les bras croisés et à se contenter de condamnations tièdes. Face à la gravité de la situation à Gaza, ce silence est honteux pour l'Allemagne.

Gideon Levy, Haaretz, jeudi 29 mai 2025 (Traduction Google) https://www.haaretz.com/opinion/2025-05-29/ty-article-opinion/.premium/germanys-enslavement-to-its-past-kept-it-silent-on-gaza-for-far-too-long/00000197-1830-d0e9-abd7-3db0ec550000

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