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Billet de blog 21 mai 2024

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Quand le festival de Cannes "déraille"!

Le Festival de Cannes a osé présenter pour son ouverture un film de Quentin Dupieux, "Le deuxième acte" proprement lamentable, caractérisé par son extrême sophistication et sa violence. De quoi s'interroger sur la baisse de l'ambition esthétique et culturelle par les tristes temps qui courent!

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                                               Quand le festival de Cannes « déraille » 

Avec un additif!

Pour une fois j’interviens dans un  domaine que Médiapart n’aborde pas souvent, celui du cinéma qui est ma passion depuis mon adolescence et à cause d’elle. Il va être question du Festival de Cannes, indépendamment de ce qui a agité l’actualité, à savoir la question des agressions sexuelles dans l’univers cinématographique et qui n’est pas rien. Non, il va s’agir tout simplement de critiquer un film que j’ai trouvé lamentable et qui a fait l’ouverture du festival, mais hors compétition : comment donc a-t-il pu jouer cette fonction ?

Quentin Dupieux s’était déjà égaré dans son film précédent sur Salvator Dali, Daaaaaali, totalement vide, mais ici c’est autre chose. Avec "Le deuxième acte", nous sommes en présence d’un film sophistiqué et prétentieux, violent aussi dans ses dialogues, et je voudrais en indiquer la sophistication extrême. Il s’agit de trois films en un : le film d’ensemble que l’on voit ; un film qui est entrain de se réaliser et dont on assiste à la réalisation, avec des séquences partielles ; enfin, le spectacle et l’audition des acteurs en dehors du film qu’ils réalisent et qui s’« engueulent » à qui « mieux mieux » (si je puis dire) pendant plus d’une heure, réglant des comptes personnels dans l’ordre amoureux : un homme (Garrel) qui est aimé par une femme qu’il n’aime pas (il est à la fois homo et hétéro) et qui demande à son ami de l’aimer à sa place, tout cela en présence du père de cette femme. Or le film en profite pour faire rire la salle (qui était pleine) au début par des plaisanteries salaces et sans intérêt sur la sexualité et la longueur des « verges », puis s’enfonce dans des discussions virulentes et désagréables à entendre, voire sans intérêt comme quand on entend le père (Lindon) se vanter d’être engagé par un cinéaste célèbre et qu’il va gagner beaucoup d’argent,  ou indiquer, sans s’arrêter, qu’il est bavard, mimant précisément ce qu’il est !

Le seul bémol à ma réception critique et à ma déception (je suis même parti avant la fin), c’est l’allusion qui est faite, pour calmer le groupe, que le monde va non seulement mal, mais va à sa perte et qu’il ne faut donc pas se disputer et se gâcher la vie présente par des querelles - propos avec lequel je suis d’accord, mais qui ne sauve pas le film, lequel au surplus, le contredit. Par contre, ce qui m’inquiète c’est de constater que le niveau de l’inspiration esthétique et culturelle, et pas seulement dans le cinéma, baisse et que rares sont les critiques spécialisés qui osent le dire - à quoi s’ajoutent dans des journaux, pourtant de qualité, des annonces comportant des éloges dithyrambiques sans justification, commandités par les producteurs pour "faire vendre". Quelle triste époque, alors que l’art, par ses jouissances propres, pourrait être là pour nous consoler du reste !

                                                              Yvon Quiniou

Additif: Pour compenser mon pessimisme, voir le film "A la légère" de B. Latouche, d'une profondeur psychologique épatante!

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