Non Mélenchon, non, sois démocrate !
Après la victoire, souhaitable et probable, de Macron contre Le Pen à la Présidentielle, il se trouve que rien n’est acquis pour la suite car il va y avoir le troisième tour des législatives, qui pourrait rendre ce même Macron minoritaire et la gauche éventuellement majoritaire au parlement. Or à ce niveau, l’attitude de Mélenchon telle qu’il l’a annoncée après son bon score de candidat à la Présidence, n’est pas supportable. Elle révèle la prétention et l’arrogance qui l’habite, lui aussi, mais tout autant une volonté d’hégémonie à gauche qui n’est pas acceptable sur le plan démocratique et qui repose sur une fausse analyse que son orgueil lui inspire.
Car il oublie le fait que son score récent ne traduit pas une adhésion exclusive à la France insoumise mais, pour une grande part, un vote utile pour un candidat de talent qui, dans la cadre de cette élection présidentielle, pouvait battre Le Pen. Moi-même, ayant d’emblée appelé à voter Roussel, candidat communiste de qualité, à une époque où Mélenchon ne paraissait pas pouvoir être en deuxième position, j’ai sous-estimé sa montée progressive dans les sondages et j’aurais pu, du coup, être tenté de voter pour lui au dernier moment, malgré l’animosité indigne qu’il avait manifesté pour les communistes et une position sur la laïcité et l’islam très contestable, qui s’est traduite par l’exclusion inacceptable de Pena-Ruiz, ce porte-parole impeccable d’une laïcité intransigeante, toujours plus indispensable par les temps qui courent.
Mais l’essentiel est ce qui suit. Le voilà qui réclame pour les élections législatives une union de la gauche justifiée, sauf qu’il en exclut le PS et, surtout qu’il veut qu’elle se fasse avec ses autres partenaires (Verts et PC essentiellement) sur la base du rapport des forces qui s’est manifesté à la Présidentielle en sa faveur, incontestablement. Or un calcul que j’ai lu dans un journal fiable, indiquerait que, dans ce cas, 75/100 des candidatures et éventuellement des sièges, lui reviendrait, ce qui serait aberrant et totalement anti-démocratique. Deux points pour le démontrer : 1 A nouveau, cela revient à faire une fausse analyse de son récent score en négligeant la forte importance du vote utile, surtout aux derniers moments, de la part d’électeurs qui ne partagent pas totalement ni l’orientation de la France insoumise ni son mode de fonctionnement marqué par l’énorme pouvoir de son président et qui fait des Insoumis des soumis à sa personne, ce que je n’ai jamais admis dans ma vie militante pour un parti de gauche, PC compris, dans le rapport de ses adhérents à leur leader. 2 Mais aussi et surtout, il semble ignorer le véritable rapport des forces au sein de la gauche. Car il y a aussi le poids respectif de tous les partis de gauche dans les élections intermédiaires : municipales, départementales, régionales et leur représentation au Sénat, et cela ne fait pas du tout de la France insoumise le premier parti de gauche ! Et pour ne parler ici que du PC, que je soutiens, il oublie totalement (comme bien des commentateurs qui n’en parlent pas pour l’étouffer) que celui-ci est, de ce point de vue, le troisième parti de France et qu’il a même augmenté le nombre de ses élus aux précédentes élections municipales !
De ces deux points de vue, l’union indispensable aux législatives pour équilibrer, mieux contrer un Président largement réactionnaire parce que néo-libéral, au service des riches et centré au surplus sur sa seule ambition individuelle, devra se faire sur un programme partagé, c’est-à-dire discuté en commun sur la base du rapport réel des forces à gauche et en choisissant les candidats au parlement en fonction de ce rapport des forces. De ce point de vue, je suis de ceux qui continuent de penser que le peuple français à besoin d’un Parti communiste fort à tous points de vue, donc aussi intellectuellement et idéologiquement. La manière dont la pensée marxiste reprend vie en France et la conviction simultanée que la cause écologique doit s’inspirer de la critique marxienne du capitalisme pour triompher, me confortent dans cette conviction.
Conclusion : non, Mélenchon, non, tu ne dois pas imposer ton hégémonie à tes partenaires de gauche mais les intégrer à une démarche politique commune et démocratique.
Yvon Quiniou