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Billet de blog 24 juin 2025

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Moyen-Orient: les dieux ou la raison?

La situation désastreuse au Proche-Orient m'amène à m'inspirer du journal libération pour y faire face, aussi, par un appel à la raison contre les religions. Car au-delà des enjeux économiques ou nationalistes qui opposent Israël et l'Iran, il y a un sectarisme religieux délirant de part et d'autre. Il faut donc revenir à une approche critique des religions pour ouvrir aussi une voie à la paix.

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                                                        Moyen-Orient : les dieux ou la raison ?

Pour commenter l’effroyable situation au Moyen-Orient, je vais faire appel à une affirmation courageuses et extraordinairement lucide du journal Libération : « Entre tous ces dieux, la raison a bien du mal à se frayer un chemin » (lundi 23 juin). La formule « tous ces dieux » vise l’importance de la religion, en l’occurrence des identités religieuses nationales dans le conflit entre Israël et l’Iran, par-delà les enjeux géopolitiques et économiques qui les opposent et auxquels l’analyse politique, spécialement médiatique, se cantonne malheureusement. Formule d’autant plus importante qu’elle doit inciter tout intellectuel à renouveler le regard critique sur les religions aujourd’hui, regard que de grands philosophes ou simplement penseurs ont porté sur elles et qui a fait leur honneur. Et aujourd’hui, en France, il n’y a que quelques mouvements de pensée qui l’entretiennent comme La libre Pensée, l’Union rationaliste ou encore les organisations laïques liées à la FOL.

Or ce qu’il faut bien voir d’emblée - et même si cet aspect des choses recouvre idéologiquement d’autres motivations bassement matérielles ou « humaines » comme la puissance économique, le nationalisme ou le pouvoir politique tout court - c’est ce qu’il en est de l’influence du facteur religieux dans ce cas… alors qu’on aurait pu croire et souhaiter qu’il s’affaiblisse dans notre modernité, après tous les désastres qu’il a alimentés dans le passé. Israël d’abord. Voilà un Etat qui, après avoir été créé sereinement pour accueillir  un peuple dévasté par le nazisme et dans une forme laïque ou démocratique, s’est raidi sur son identité religieuse et amène ses gouvernements à se réclamer d’une transcendance divine pour s’approprier en droit et en fait un territoire : comment accepter un pareil fantasme irrationnel même si un pluralisme minimal existe dans ce pays?

L’Iran ensuite. Son « guide suprême » Ali Khamenei dirige en dictateur son pays et il le fait sur la base d’un prophétisme islamique, religieux donc, proprement délirant, d’une intolérance et d’une violence extrêmes, au nom duquel il revendique le droit de dominer le monde pour imposer sa croyance et éliminer ceux qui n’en veulent pas. A quoi s’ajoute un totalitarisme dit « spirituel »  en interne, qui l’entraîne à asservir des millions de « fidèles » et à les pousser de force dans des prières et des rites totalement aliénants. Ceux qui ont pu voir à la télévision récemment des phénomènes collectifs qui frisent la « folie mentale » me comprendront : on en sort abasourdi et malheureux pour l’humanité ! Or c’est bien cet absolutisme religieux, contraire à la liberté de l’esprit, qui entraîne ce « guide » à vouloir la mort de l’Etat israélien. Cela ne justifie pas qu’on l’agresse pour une raison ou une autre - sa prétention à posséder une arme nucléaire comme Israël -  ni qu’on attaque sa souveraineté, ni, enfin, qu’on élimine par la force son pouvoir gouvernemental - c’est à son peuple et ses autres dirigeants politiques de le faire. Mais cela mérite qu’on critique une fois de plus ce à quoi peut mener une religion.

Enfin, derrière tout cela ou, en écho à mon commentaire critique, il y a Trump. Je laisse délibérément tous les aspects odieux du personnage comme toutes ses exactions aux Etats-Unis ou de par le monde - tout cela est unanimement rejeté et commence même à l’être par ceux qui l’ont élu au pouvoir. Non ce qui est proprement ahurissant, ici, c’est la manière dont cet homme violent, prédateur économiquement, raciste même pour une part, hostile à l’immigration, se réclame officiellement et publiquement de Dieu : on a pu tout récemment non seulement le voir gesticuler une nouvelle fois devant la télévision, mais s’appuyer trois fois sur sa foi chrétienne pour justifier sa politique globale, faisant fi de ce qui, dans sa foi, et malgré tout, pourrait la contredire moralement, comme le précepte de l’amour du prochain. Cela est à la fois odieux et incompréhensible à notre époque !

Pour finir et sans développer ce que j’ai écrit par ailleurs et depuis longtemps, je me contenterai de constater que nous assistons à un recul désastreux de l’esprit critique face à la religion et ses impostures théoriques et pratiques. - recul qui est donc aussi celui de la raison face à elle et contre elle. Non qu’il faille rejeter les religions ou comme on dit « les dieux »,  et les exclure de l’espace public - un agnostique comme moi n’est pas du tout sur cette position officielle, même s’il souhaiterait que leur influence s’amenuise progressivement pour permettre aux hommes d’assumer pleinement leur humanité hors de toute déraison. Mais le problème est bien là : sans faire référence à tous les grands penseurs qui l’on critiquée sur ce plan, il me suffira, pour me faire comprendre sinon accepter, de me référer à Kant : celui-ci, théoricien indépassable de la morale universelle, a bien accepté la religion, mais « dans les limites de la simple raison » (c’est le titre d’un de ses livres), tant intellectuellement que pratiquement, c’est-à-dire hors des excès que je viens de dénoncer !

                                                                                             Yvon Quiniou

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