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Billet de blog 27 février 2024

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L'ahurissante partialité en faveur de l'Ukraine

L'attitude favorable des Occidentaux à l'égard de l'Ukraine en guerre contre la Russie est difficilement acceptable. Elle relève d'un fantasme rétrospectif contre l'URSS, elle oublie la nature désagréable du régime de Zelensky, elle tend à s'intégrer, via l'OTAN, à l’impérialisme américain et elle diabolise la Russie. C'est la visée de paix qu'il faut soutenir, ici comme ailleurs!

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                                            L’ahurissante partialité  en faveur de Ukraine 

Je vais sans doute susciter des désaccords polémiques, mais tant pis. Je ne suis pas un admirateur de Poutine, mais je suis stupéfait par la partialité du soutien à l’égard de l’Ukraine contre la Russie exprimé par les Occidentaux, français compris, en dehors de la gauche « extrême ». Cela mériterait tout un ouvrage, mais je contenterai de quelques arguments

1 Le soutien à l’Ukraine n’est que la projection sur la Russie d’un fantasme rétrospectif anti-soviétique. Il repose sur un contresens global et inacceptable sur ce qu’a été le régime stalinien : celui-ci n’a jamais été un régime « communiste » (même si Lénine le désirait vraiment) et ce malgré des acquis sociaux évidents ; il n’en a été qu’un contresens en acte(s) par rapport à l’idéal marxien sur le plan politique de la démocratie, spécialement. Sans compter, point tout aussi important, que Marx a toujours indiqué, sur la base de sa conception matérialiste de l’histoire et de la succession des modes de production, qu’une révolution anti-capitaliste n’étais possible que dans les conditions d’un capitalisme développé avec une masse immensément majoritaire de travailleurs liés à l’industrie, le contraire même de la Russie pré-révolutionnaire ! Il avait donc déconseillé cette « révolution », la vouant à l’échec sauf soutien d’une révolution réussie en Occident, qui n’eut pas lieu. Je ne développe pas, l’ayant fait dans des livres, mais il faut indiquer que alors c’est l’idée communiste elle-même qui a été rejetée intrinsèquement, y compris par des intellectuels ou des politiques censés connaître Marx, alors que sa réussite demeure crédible et même indispensable vu l’état actuel du monde qui nous mène à la catastrophe.

2 C’est dans ce contexte idéologique affligeant que l’on peut comprendre la situation en Ukraine. Ancienne région de la Russie soviétique devenue indépendante après la chute de l’URSS et la déferlante libérale en Occident, elle entend intégrer le monde Occidental via l’OTAN sur la base d’une revendication clairement nationaliste mais, tout autant, d’expansion économique intéressée. Or cette volonté, qui anime Zelenski, est soutenue, sans que cela soit clairement dit ou avoué,  par les médias et le monde politique, y compris français, dans le but de favoriser l’impérialisme économique américain des USA qui a longtemps dominé le monde et exercé sa malfaisance un peu partout, y compris à travers des guerres. Or il se trouve que cette situation unilatérale d’hégémonie se trouve aujourd’hui contrebalancée par le « Sud Global » et l’organisation des BRICS » dont la Chine est un pivot très estimable - contrairement à ce qu’une propagande anti-chinoise en dit constamment. Je ne développe pas non plus, car on peut contester la présence de quelques pays dans cette nouvelle « contre-alliance » mondiale, mais elle est globalement progressiste face à l’impérialisme américain : voir les analyses remarquables de Bruno Guigue à ce propos dans son livre Communisme (Delga).

3 Dès lors, l’attitude et même la stratégie de l’Occident, via l’Otan qui n’en est qu’un instrument, consiste à soutenir, sans le moindre recul critique, le régime politique de l’Ukraine, en oubliant tous les défauts internes de celui-ci : nationalisme exacerbé, corruption, atteintes à la démocratie concernant ses opposants, développement de marchés internationaux comme celui des céréales envahissant en particulier le pays voisin qu’est la Pologne et qui proteste ! Sans compter la demande ahurissante d’armes pour faite la guerre à la Russie, à laquelle les pays européens cèdent par intérêt économique et politique irresponsable, d’autant plus que cette vente se fait au détriment du sort de leurs peuples nationaux qui auraient besoin de cet argent !

4 Dernier point, qui n’est délicat qu’en apparence : la qualification du régime de Poutine de « dictature », qui justifierait qu’on le combatte à travers l’Ukraine, en lui prêtant au surplus une ambition de domination planétaire, ce qui est complètement délirant. Or il faut avoir conscience, en consultant des spécialistes de sciences politiques très informés sur la nature des différents régimes, que parler de »dictature » donc à propos du régime russe, est un contresens sémantique inadmissible mais répandu et que j’ai même entendu être formulé dans une émission de télévision sur la Chaîne 5, habituellement très honnête ou lucide. Non, il ne s’agit pas d’une « dictature » mais, ai-je lu, d’un « démocratie autoritaire »,  autoritaire donc, mais où il y a des élections (eh oui) et divers partis (dont un Parti communiste), ce qui en fait bien, formellement est-il rappelé, une « démocratie », mais avec des limites évidentes aussi, dont des formes violence à l’égard d’opposants extrêmes (comme en Ukraine d’ailleurs). A quoi on ajoutera un soutien massif de la population, ce qui est régulièrement passé sous silence.

Conclusion : on aura compris, je l’espère, que la guerre en Ukraine ne justifie pas un soutien aveugle à ce pays, au plan international en particulier et, inversement, que cette attitude n’interdit en rien des critiques internes concernant ce qui se passe en Russie. Mais elle interdit, surtout, qu’on se lance dans une stratégie et une propagande guerrières,  qui risquent de nous mettre sur la voie d’un possible conflit mondial… alors que ce qui se passe en Palestine est déjà suffisamment épouvantable à ce niveau. C’est d’une ouverture à la paix, via des négociations et des concessions réciproques, que nous avons besoin, contre le capitalisme et le déchaînement des intérêts guerriers qu’il alimente !

                                                                                                Yvon Quiniou

Additif: Je viens juste d'apprendre que Macron envisage l'hypothèse d'envoyer des troupes en Ukraine: lamentable et irresponsable!

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