Mon premier Covid date d’octobre 2022, et mon vaccin et les rappels du début de cette année-là. J’avais fini par décider de me faire vacciner dix mois plus tôt, après avoir passé 16 heures sur un brancard aux urgences (pour autre chose) et observé durant tout ce temps le boulot des infirmières et infirmiers n’arrivant plus à répondre à la demande. On peut dire que c’est pour eux que j’ai décidé d’y passer. RAS pendant plusieurs mois et finalement, le Covid a réussi à me contaminer.
J’ai déjà eu de vraies grippes, mais avec ce truc, le niveau des douleurs était vraiment plus élevé. Des courbatures dans tout le corps, surtout le dos et les jambes, et de ce que je me souviens, très peu de symptômes ORL, à part les oreilles un peu bouchées, mais comme c’est récurrent chez moi, je n’y ai pas prêté attention plus que ça. Ça n’a pas duré très longtemps, mais ça m’a bien crevée et comme ça faisait longtemps que je ne m’étais pas payé ça, j’ai réservé cinq jours de thalasso à Pornic. J’arrivais encore à faire des balades le long du rivage et à nager plusieurs centaines de mètres dans la piscine d’eau de mer.
Durant les mois qui ont suivi, je remarquais une fatigue persistante et puis des douleurs dans les jambes m’empêchaient de rester trop longtemps debout. J’avais trouvé un petit boulot d’écriture qui me demandait surtout d’être devant mon ordinateur, alors ça allait. Je côtoyais un peu de monde et on recommençait plus ou moins à se faire la bise. Je ne regrette pas d’avoir retrouvé un peu de ces contacts physiques, mais ça doit bien être comme ça que je me suis laissée recontaminer en octobre 2023 par une nouvelle salve de Covid, un truc de fou.
T’as jamais eu ça de ta vie, un truc pareil. Des douleurs musculaires à hurler, presque à en crever. C’est-à-dire à presque préférer mourir que de subir ça plus longtemps, et appeler le 15 pour savoir quoi faire. Rien, me dit le médecin au bout du fil. Antalgiques et attendre. Je ne vais pas vous envoyer aux urgences un dimanche ! Non, c’est bon, j’ai déjà vécu ça. Je me gave de Doliprane, j’applique une bouillotte, je hurle, je dors, ça recommence. Le lendemain, je vais chercher des tests Covid à la pharmacie. Négatif. Idem le lendemain où l’on me prescrit des analyses de sang. Je sais bien que c’est un nouveau Covid, mais le médecin me dit, si c’est négatif deux fois, c’est pas ça, pas la peine de faire un PCR.
Allô ? Votre taux de CPK est très très élevé, me prévient rapidement mon médecin. On refait des analyses et on vous prend un rendez-vous chez un neurologue (obtenu 4 mois plus tard).
Selon Doctissimo « La créatine phosphokinase ou CPK (ou créatine kinase ou CK) est une enzyme importante dans le métabolisme de l’énergie. On la retrouve dans de nombreux tissus et organes (cerveau, cœur, muscles…). Son dosage dans le sang permet de soupçonner une atteinte musculaire, cardiaque ou cérébrale. » Trop bien !
Le taux de CPK est redescendu rapidement, mais la fatigue et les douleurs musculaires ont persisté. Quand la toubib me tapotait les jambes avec son petit marteau, ça réagissait à peine. Elle m’a mis des bandes à Velcro autour des jambes qui mesurent les rythmes, les fréquences, mais je n’y connais rien, je l’ai laissé faire sans poser trop de questions. Tout ce que je sais, c’est que le résultat n’était pas terrible. Va pour un doppler des membres inférieurs, mais finalement, à l’examen, rien à signaler du côté de la circulation sanguine. Ok.
Le temps passe et c’est bientôt le rendez-vous avec la neurologue. Je demande à refaire des analyses de sang et comme j’ai encore pas mal de douleurs, on me prescrit à nouveau du Doliprane et du Tramadol. Comme il paraît que c’est un opioïde et qu’on peut être accro, je n’abuse pas. Max un par jour. J’ai de plus en plus de mal à me concentrer, mais après une heure de tests neurologiques, le verdict tombe : tout va bien. Ça doit être les médocs qui me font perdre un peu la tête, mais j’ai maintenant mal sous les pieds, en plus des jambes. Quand je me lève le matin, c’est insupportable, puis ça diminue en quelques minutes. Je ne comprends pas trop ce qui m’arrive.
Lors d’une nouvelle consultation, la remplaçante de mon médecin, me demande si j’ai mal au dos. Oui, bien sûr, un peu, comme d’habitude… Alors il reste l’IRM, me dit-elle. Ça arrive souvent que les douleurs dans les jambes soient provoquées par un problème au niveau des lombaires. Va pour l’IRM ! J’ai eu de la chance de ne pas attendre des mois pour l’examen. Après avoir appelé, sans succès, pendant plusieurs jours les centres de Rennes, j’ai fini par avoir un rendez-vous dans un centre d’imagerie rural et en plus, de bénéficier d’un désistement un mois avant la date fixée.
C’est pas pour vous raconter ma vie que je détaille les étapes, mais pour rendre compte du parcours de soins auquel on est confronté de nos jours. Comment c’est chaud d’obtenir des rendez-vous, des diagnostics, des traitements, pour qu’au bout du compte, un praticien avoue enfin : « Quand on a tout testé et rien trouvé, oui, il reste ça, le Covid long ». C’est ce que m’a dit le radiologue à la fin de l’IRM, après que je lui ai parlé de l’ostéopathe que j’avais vu quelques jours auparavant.
J’avais eu une douleur hyper vive, archi douloureuse à l’aine droite, comme une brûlure, mais sans aucune trace externe. Un ami à qui je racontais cela en précisant que j’avais plein de soucis depuis le Covid a immédiatement réagit. Il m’a conseillé d’aller voir cet ostéopathe qui avait lui-même eu un Covid long et savait de quoi il parlait, de quoi on parlait, nous, les gens atteints de ce truc. Lui préfère dire SPC pour Syndrome Post Covid, qu’il définit comme « Resserrement global des tissus conjonctifs associé à une inflammation sous-jacente lié au système nerveux autonome. » Et j’ai pris rendez-vous.
J’avais préparé un topo récapitulatif, mais il l’a à peine lu. Il a tout de suite compris de quoi il s’agissait. C’est vraiment agréable quand un praticien comprend ce qu’on lui raconte et on se sent en confiance quand lui-même a vécu les mêmes symptômes. La séance a duré une heure et à la fin, il m’a dit : « Vous avez de la chance, c’est sur les jambes ! » Ah bon ? « Oui, il s’agit d’un resserrement des tissus et ça pourrait être sur les poumons ou sur le cœur. Ça compresse les organes et ça peut être difficile de s’en sortir si c’est sur un organe vital. »
J’ai donc eu de la chance et quand je suis sortie de son cabinet, ma posture était complètement modifiée. Je ne marchais plus dans la crispation, je retrouvais un peu de mobilité.
La première nuit, j’ai vraiment douillé. Quand ça fait des mois que le corps est contracturé, la détente est d’autant plus difficile, mais j’ai tenu le coup ! J’ai laissé passer les jours et petit à petit, les douleurs se sont amenuisées, sans totalement disparaître. Encore les pieds, un peu les jambes, mais plus rien à l’aine. Et c’est là que j’ai eu comme une crise d’appendicite et une violente crispation du bas-ventre, mais plus mal nulle part ailleurs, et puis c’est revenu, au fur et à mesure que la douleur au ventre diminuait. C’est tout de même un drôle de truc le corps !
J’ai raconté tout ça à l’ostéo lors de la deuxième séance, il avait l’air content, mais encore étonné de certains symptômes. Il a dit : « J’ai pas fini d’en découvrir avec ce truc ! »
Bref, si je vous ai raconté tout ça, c’est que depuis que j’ai compris de quoi il s’agissait, j’ai cherché un peu sur Internet ce qu’en disait les institutions médicales et je suis tombée de haut. Ils savent tous parfaitement de quoi il retourne. Que les symptômes soient musculaires, ORL, nerveux ou je ne sais quoi d’autre, ils savent ! Il n’y a qu’à voir les listes qu’ils produisent, les analyses qu’ils font et les rapports qu’ils rendent. Assurance maladie, Inserm, OMS, Vidal, Santé publique France… Ils détaillent tous parfaitement les parcours des malades avec des statistiques en veux tu, en voilà, mais dans le huis clos de leur cabinet, ils s’abstiennent d’avancer le diagnostic, car ils n’ont pas grand-chose à proposer.
Je me demande s’il y a des directives pour ne pas dire aux patients que 10 à 20% de la population infectée (soit au moins 2 millions de personnes) est atteinte de ces prolongations. Il vaut certainement mieux laisser le gouvernement punir les professionnels des arrêts maladie qu’ils prescrivent soi-disant à outrance.
Et moi, j’attends que ça passe.
- Étude de l’Inserm du 26/06/2023 sur les 2 millions de personnes atteintes de Covid long et liens utiles
https://www.inserm.fr/c-est-quoi/interminable-cest-quoi-le-covid-long/ - Détail des symptômes du Covid long sur Ameli, le site de la Sécu
https://www.ameli.fr/llle-et-vilaine/assure/sante/themes/covid-19/covid-19-long/covid-long-symptomes-prolonges-covid-19 - Questions / Réponses à propos de l’affection Post-Covid-19 (OMS)
https://www.who.int/fr/news-room/questions-and-answers/item/coronavirus-disease-(covid-19)-post-covid-19-condition - Étude du Comité de veille et d’anticipation des risques sanitaires (Covars), sur le site du Vidal
https://www.vidal.fr/actualites/30515-covid-long-de-nombreux-progres-restent-a-faire.html - Dossier Coronavirus (Covid 19) sur le site de santé publique France
https://www.santepubliquefrance.fr/dossiers/coronavirus-covid-19 - Article du 8 février 2024 sur les dernières études à propos du Covid et ses conséquences, sur le site du Vidal
https://www.vidal.fr/actualites/30633-bonnes-et-mauvaises-nouvelles-de-la-covid-19.html
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